Dissolution des Soulèvements de la terre : un mois après, que fait Darmanin ?
« Darmanin au cachot, les tritons dans l’eau ». Ces 6, 7 et 8 mai, les Soulèvements de la terre organisaient une nouvelle mobilisation à Léry, commune située à quelques kilomètres de Rouen. Cette fois-ci, pas de mégabassine, mais un projet d’autoroute qui révolte ces activistes radicaux. L’occasion pour le collectif, entre deux actions coup de poing, de se pavaner et de rappeler son existence au gouvernement, alors que Gérald Darmanin promettait en mars dernier sa dissolution.
Inaction de l’exécutif
Les scènes de guérilla urbaine, auxquelles les Soulèvements de la terre nous avaient habitués, ont laissé place en ce début du mois de mai à des actions militantes pour entraver – à défaut de pouvoir arrêter – le projet de contournement Est de Rouen. Pendant qu’un premier cortège plantait des clous dans les arbres censés être abattus – action qui soulignons-le peut se révéler fatale pour les bûcherons qui seront amenés à scier ces troncs – d’autres activistes se regroupaient pour creuser des mares ou bloquer la circulation sur l’autoroute A13. Ce week-end militant, qui fait suite à une mobilisation fin avril contre le projet d’autoroute Castres-Toulouse, montre bien que les Soulèvements de la terre continuent d’agir malgré les menaces de dissolution proférées à leur encontre par Gérald Darmanin le 28 mars dernier. Ce jour-là, lors d’une séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, le ministre de l’Intérieur promettait de dissoudre ce collectif pour « incitation et participation à la commission de sabotages et de dégradations ». Dans la foulée, Beauvau envoyait à différents membres, identifiés comme meneurs, un courrier expliquant les griefs retenus contre leur collectif. Le 7 avril, le groupe, soutenu par d’autres associations, répondait au ministre de l’Intérieur et réfutait les accusations portées contre ses membres. « Les Soulèvements de la terre ne sont pas un groupuscule d’ultragauche mais une large coalition horizontale de collectifs et d’organisations variées » expliquent-ils sur leur compte Twitter. Et d’ajouter fièrement : « On ne dissout pas un mouvement ».
Mais depuis cet échange, plus rien. Gérald Darmanin a beau rappeler au micro de BFM TV y être « toujours extrêmement favorable », les conseils des ministres se succèdent et aucun décret de dissolution n’est pour le moment pris à l’encontre des Soulèvements de la terre.
Face à l’extrême gauche, l’exécutif tremble
Derrière cette inaction, se cache sans nul doute une crainte pour l’exécutif de voir son décret retoqué par le Conseil d’État comme ce fut le cas pour le Groupe antifasciste Lyon et ses environs (GALE) dont la dissolution a été suspendue par les Sages du Palais Royal il y a un an. Car contrairement à de nombreux groupuscules dissous par le passé, les Soulèvements de la terre ne sont pas une association de type loi 1901. À cette non-existence juridique s’ajoute une autre difficulté : l’absence d’organisateurs et de représentants légaux. Une horizontalité, mise en avant par les membres du collectif, qui complexifie les démarches de dissolution. Cependant, cet écueil n’avait, semble-t-il, pas dérangé le gouvernement lorsqu’il s’était agi de dissoudre les Zouaves Paris en janvier 2022, collectif qui n’était pas non plus une véritable association. En effet, à l’instar du groupuscule identitaire, les Soulèvements de la terre, qui possèdent leur propre site internet, leurs porte-paroles, leur logo, leurs réseaux sociaux et leurs communiqués de presse, peuvent être considéré comme un « groupement de fait ». Or un « groupement de fait » peut être dissous, rappelle la législation en vigueur. D’autre part, la loi dite de lutte contre le séparatisme offre un fondement juridique - participation « à des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens » - à la dissolution du collectif qui a organisé et participé à la manifestation interdite de Sainte-Soline.
Il fut un temps où le gouvernement se montrait moins frileux pour dissoudre certains collectifs. Il avait fallu seulement un mois pour faire disparaitre Génération Identitaire et seulement 15 jours pour dissoudre l’Alvarium, groupe identitaire angevin. Plutôt que de demander l’interdiction des manifestations d’ultra-droite, Gérald Darmanin ferait bien de se saisir à nouveau du dossier « Les Soulèvements de le terre » et plus largement d’agir contre les violences d’extrême gauche.
Clémence de Longraye
Date de dernière mise à jour : 09/05/2023
Ajouter un commentaire