POLITIQUE - INTERVIEW JOSIANE CORNELOUP

Députée LR de Haute-Saône, Josiane Corneloup a voté, hier, la motion de censure avec 18 de ses collègues LR, contre l'avis de la direction du parti. Elle explique pourquoi.

« Priver la représentation nationale de ce vote est un vrai déni de démocratie »

Marc Eynaud. Vous faites partie des députés LR qui ont voté la motion de censure. Pourquoi avoir fait ce choix ?

Josiane Corneloup. Quelle que soit la position sur la réforme des retraites, il n’est pas acceptable qu’une loi de cette portée puisse être adoptée sans vote des représentants de la nation. Le gouvernement et Emmanuel Macron sont allés trop loin. Tout d’abord, le fait de passer ce texte qui est une réforme majeure touchant tous les Français, dans un projet de loi de finances rectificative, donc, dans un texte budgétaire, alors que ce texte n’a rien à y faire. Le gouvernement savait très bien que cette manœuvre lui assurerait le recours au 49.3 sans qu’il soit comptabilisé pour l’examen des autres lois ordinaires. Ensuite, l’utilisation du 47.1 pour limiter les débats à vingt jours à l’Assemblée nationale, puis le 44.3 au Sénat qui a organisé un vote bloqué, pour finir par le 49.3, je trouve que tout cela est intolérable. Priver la représentation nationale de ce vote est un vrai déni de démocratie qui n’est pas acceptable. Je n’ai pas pu voter et je n’ai pas pu porter la voix des électeurs qui m’ont accordé leur confiance lors des dernières élections législatives.

M. E. Qu’avez-vous voulu sanctionner ?

J. C. J’ai voulu sanctionner le fond et la forme. En effet, personnellement, nous savons que le montant des pensions va baisser si rien n’est fait, donc, oui, il faut faire une réforme des retraites. Mais je trouve dommageable que nous nous focalisions sur les conséquences plutôt que sur les causes. J’avais déposé de très nombreux amendements visant à relancer une vraie politique familiale pour encourager la natalité, qui n’a jamais été aussi basse. J’avais également déposé de nombreux amendements visant à développer l’employabilité des seniors, qui est bien plus basse en France que dans d’autres pays. Tout cela visait à élargir, demain, l’assiette de cotisation. Tous mes amendements ont été jugés irrecevables.

M. E. Élisabeth Borne a accusé les députés LR qui ont voté la motion de jouer une carte personnelle. Qu’en pensez-vous ?

J. C. Je ne me sens pas du tout concernée car mon vote ne correspond en rien à la défense d’une situation personnelle. Je vote toujours en mon âme et conscience en ayant une mûre réflexion sur le fond. Je trouve que cette réforme des retraites a été mal pensée, très mal présentée et elle n’est pas amenée au bon moment. Nous avons bien d’autres sujets sur lesquels le gouvernement devrait se pencher.

Marc Eynaud