
Introduction au roman d’Orwell.
Né en Inde en 1903, Georges Orwell, décédera en 1950, à Londres des suites de la tuberculose.
En 1948, il écrit son roman d’anticipation « 1984 » et le publie en 1949, un an avant sa mort.
Pragmatique, visionnaire, esprit libre, Orwell a bâti son roman telle une tragédie théâtrale en trois actes. L’issue du IIIe acte sera tragique pour Winston Smith, membre du Parti et héros central du roman. Ce IIIe acte est sans aucun doute la partie du roman qui laissera le plus de traces pour bien comprendre les rouages d’une dictature, d’un régime totalitaire, de l’islamisme et même de l’islamo-gauchisme.
O’Brien est un personnage clé, important, du Parti inférieur. Il incarne dans le roman d’Orwell le côté obscur. De cet obscurantisme dont on parle beaucoup, notamment dans la dictature des mollahs d’Iran. En outre, on retrouve cet obscurantisme dans les pouvoirs despotiques et autoritaires relatés dans film la Guerre des étoiles. Dans le roman d’Orwell, le côté obscur est incarné par le haïssable dictateur « Big Brother ». Et, l’erreur fatale du candide Winston aura été de minimiser la face cachée d’O’Brien en lui révélant, à cœur ouvert, ses penchants politiques pour la Fraternité, ignorant que O’Brien pourrait bien être Big Brother, le dictateur du parti unique l’ANGSOC. C’est seulement au IIIe acte que le sadique O’Brien, se révélera être son pire bourreau, son ennemi absolu.
Dialogues choisis montrant le triomphe du bourreau :
« Nous vous avons amené ici pour guérir votre cerveau et vous soumettre au supplice du démembrement du corps. Vous êtes mentalement dérangé, vous souffrez d’une mémoire défaillante. Nous allons vous retirer toute certitude, jusqu’à vous faire nier ce que voient vos yeux, et douter de votre conscience.
(O’Brien désigne 4 doigts de sa main, et demande à l’écartelé de les compter). À chaque mauvaise réponse, l’écartèlement deviendra plus douloureux. Finalement, sous l’effet prolongé de la torture, Winston finira par douter, jusqu’à répondre que 4 doigts feront parfois 3 ou même 5 ».
Le bourreau impitoyable excelle dans le lavage de cerveau.
L’ignorance c’est la Force, disent les slogans de propagande de Big-Brother sur les télécrans !
« Nous vous effacerons de l’histoire, vous serez vaporisé et versé dans la stratosphère. Il ne restera plus rien de vous. Ni un nom dans un registre, ni un souvenir dans un esprit vivant. Vous serez annihilé dans le passé, aussi totalement que dans le futur ». Ainsi va le sadisme d’O’Brien = « B-B ».
Et de poursuivre : « Comment un homme use-t-il de son pouvoir sur un autre ? Le pouvoir c’est infliger de la douleur, de l’humiliation, sinon il reste un doute. Le faire obéir par la souffrance ne suffit pas. Le pouvoir c’est déchirer (au sens de formater) l’esprit des hommes et de les rassembler à son gré. Le pouvoir n’est pas un moyen mais une fin ». Dans notre monde seuls subsisteront le triomphe et l’auto-humiliation. Tout le reste nous le détruirons, y compris le passé. Le passé est interdit, car lorsque l’on coupe l’homme de son propre passé, alors on peut le couper de sa famille, de ses enfants, des autres hommes. Il n’y a aucune légitimité, exceptée envers celle du Parti. Il n’y a aucun amour excepté pour Big Brother. Tous les autres plaisirs, nous les détruirons. Si vous voulez vous représentez une image du futur, imaginez une botte qui piétine éternellement un visage humain ». (Mythe de Sisyphe du totalitarisme).
Winston, longuement torturé dans les geôles du ministère de l’Amour, et malgré une résistance courageuse dit : « Vous échouerez, vous serez forcément vaincu, la vie vous vaincra. Tôt ou tard ils vous mettront en pièces. La haine, la peur de la vie ne vaincra jamais l’esprit de l’homme libre ».
Et, O’Brien de répondre en torturant Winston, allongé et ligoté, sur la table d’écartèlement :
« Nous contrôlons la vie, à tous les niveaux. Nous créons la nature humaine. Un homme nouveau. Les hommes sont infiniment malléables. Les prolétaires sont des animaux. L’Humanité est le Parti. Si vous vous considérez comme un être humain, vous êtes le dernier de votre race. Votre espèce est éteinte. Nous sommes les héritiers. Comprenez-vous que vous êtes seul ? Vous êtes hors de l’histoire. Vous êtes inexistant. Levez-vous et regardez-vous ! Vous êtes en train de mourir, le dernier être humain est devenu un déchet entre nos mains. À la fin nous vous fusillerons lorsque nous serons sûrs que vous aimez Big Brother » !
« Ni le passé, ni le présent, ni le futur n’existent par eux-mêmes. La réalité est dans l’esprit humain, pas dans celui de l’individu qui commet beaucoup d’erreurs car il est mortel, mais l’esprit humain du Parti est collectif, il est donc immortel !» La Tyrannie du pouvoir s’autoglorifie en meute !
Wilson – qui pourtant détestait Big Brother – finira après son passage dans la terrifiante salle n° 101, prêt à subir la terrifiante torture chinoise, des rats affamés lui dévorants le portrait. Big Brother l’aura alors déshumanisé, décervelé, vidé de sa personnalité, jusqu’à le rendre inoffensif au café du Châtaignier. Seul à une table, devant un échiquier, le regard soumis au télécran, Winston avale toute la propagande du Parti unique de l’INGSOC.
Après la visite de Julia, son amour interdit et entravé par le Parti, un jeune barman lui servira un second verre de gin auquel il aura mélangé un antidépresseur ou un poison, à effet retardé ?
À ce moment, le télécran passe en boucle les aveux de culpabilité de Winston, s’accusant même de mensonges qu’il n’avait jamais commis.
Voici ses aveux de culpabilité.
… Je tiens à m’accuser de toutes une série de crimes. J’ai séduit les membres du Parti des 2 sexes. Je suis allé plusieurs fois en zone prolétarienne. J’ai délibérément contracté la syphilis pour transmettre la maladie à ma femme et à d’autres membres du Parti. Avec d’autres agents j’ai fabriqué de la fausse monnaie, détruit du matériel industriel et pollué les réserves d’eau. J’ai guidé des bombes eurasiennes vers notre 1re région aérienne par des signaux codés, pour assurer notre bombardement. Me voilà victime de l’influence de Goldstein. Je suis coupable à tous les niveaux. Je suis content d’avoir été pris car j’étais dérangé mentalement. Maintenant, aujourd’hui, on m’a guéri. Je vous demande d’accepter l’amour que je porte à notre chef. Je veux qu’on accepte mon amour pour notre leader. Je demande à être fusillé, pendant que mon esprit est propre.
Julia aussi subira les pires tortures. Toute sa rébellion, sa duplicité, sa folie amoureuse, sa perversité lui ont été extirpés. Julia est une jolie brune, âgée de 29 ans. Elle avait fait l’amour, déjà bien des fois, avec des membres du Parti malgré que cela soit interdit. Elle se disait corrompue jusqu’à la moelle, mais adorait faire l’amour. Son corps nu était amour. Pour brouiller les pistes de la police de la Pensée, elle portait autour de la taille une fine ceinture rouge, emblème des Jeunesses anti-sexe.
Winston et Julia subiront la torture. Un châtiment réservé à tous ceux qui se sont rendus coupable du « crime de la Pensée » pour leur adhésion ou compassion à la pensée d’un autre personnage emblématique : le chef juif du Parti de la Fraternité : Emmanuel Goldstein. Nous en reparlerons.
Dans ce monde totalitaire d’Orwell, le crime de la Pensée est une hérésie qui mérite la mort, dès qu’il existe une double-pensée qui s’écarte de la ligne idéologique dominante, de l’orthodoxie du parti unique l’ANGSOC.
Orwell nous décrit un monde impitoyable, dans lequel la vie des humains n’a aucune valeur mais reste contrôlée en permanence par une Mentopolice héliportée, par une police de la Pensée, et par les télécrans (remplacés de nos jours par nos téléphones mobiles). Cette vie imaginée pour nous par Orwell était censée se produire en 1984, d’où le titre de son roman. Une vie, somme toute, faite de guerres, de souffrances, de violences, de privations d’amour, de restrictions de nourriture, de propagandes et de fortes contraintes humaines. À quelques décennies près, Orwell ne s’est pas beaucoup trompé. Cet univers totalitaire qu’il décrit avec une précision redoutable laisse craindre qu’il soit duplicable, à toutes les époques, par tous les régimes, par tous les dictateurs.
Vrai journaliste politique et écrivain, Orwell – de son vrai nom Éric-Arthur Blair – a écrit cette contre-utopie politique en contre-modèle de société. Cette œuvre majeure s’inspire des modèles de dictatures : stalino-communiste, nazie et franquiste du XXe siècle. On retrouve de nos jours ces modèles totalitaires pour l’Iran, mais aussi pour la Corée du Sud, la Chine, l’Algérie, la Tunisie, la Russie, l’Ukraine, le Pakistan, l’Afghanistan, la Syrie, les Pays du Golfe… S’ajoute aussi une liste de « proxys » non exhaustive.
Au point qu’à cause des diverses formes de rébellions en France, sur les réseaux sociaux, la tentation sécuritaire aidant, une dictature pourrait bien voir le jour et se mettre en place en France, à l’insu.
Orwell nous a gratifiés d’un roman fictionnel certes, mais visionnaire et prédictif. Il aura vécu et combattu le franquisme, durant la Guerre d’Espagne, dans les rangs du parti P.O.U.M, regrettant la prise de contrôle autoritaire des communistes, considérant que ces derniers ne cherchaient qu’à assurer leur domination, en prenant leurs ordres à Moscou, dans le régime stalinien, plutôt que de faire triompher les valeurs démocratiques. Ce vécu fera de lui un farouche opposant au communisme.
Cette résistance à la dictature communiste, à l’extrême gauche dirons-nous aujourd’hui, pourrait le qualifier de précurseur, de lanceur d’alertes. Par ce message pertinent qu’il laisse en héritage à l’humanité et au monde libre, Orwell aura cherché à : nous mettre en garde contre les dangers du retour d’un « Plus jamais ça » ; d’une dérive possible du monde à venir ; d’un saut vers un monde totalitaire.
N’a-t-il pas voulu nous dire : Attention tout cela pourrait revenir si vous baissez la garde ?
Comment cette fiction politique s’est-elle banalisée, malgré sa réalité tragique ?
Le monde totalitaire d’Orwell est certes fictionnel, mais tellement bien décrit qu’on le vit et le ressent en symbiose. Notamment au niveau des rouages idéologiques de cette dictature dénoncés dans le journal de Winston. Cette machine politique totalitaire d’anéantissement de la personnalité humaine, d’éradication de toutes formes de sentiments, d’acharnement contre la personne ou un pays, sous bien d’autres aspects est devenue une source d’inspiration quasi inépuisable pour des détracteurs perfides et pour certains dirigeants totalitaires de ce monde, dont celui des mollahs enturbannés d’Iran.
De tous temps, voire de nos jours, des esprits politiques, pervers, manipulateurs et complotistes semblent s’être notablement inspirés de ces méthodes de soumission totalitaire sur les individus, pour imposer leur doxa toxique au monde libre et démocratique.
L’actualité et l’histoire deviennent alors les témoins de faits réels, à travers les siècles qui ont accablé l’humanité.
Des faits réels, intentionnels et déclarés ouvertement. On les pensait utopiques ou délirants, sans vraiment y prendre garde. Annoncer vouloir rayer ou effacer Israël de la carte du monde, du Jourdain à la mer, sans susciter des réactions d’indignations, en masse, aurait dû éveiller les consciences occidentales ! Il n’en fut rien !
FIN Partie 1/3.
Patrick Granville.