Les derniers secrets de Marie-Antoinette

Il y a des ouvrages qui marquent durablement les esprits dès leur publication.

Celui de Charles-Éloi Vial en fait partie, par son exemplarité, mais surtout par le phénoménal travail de recherche qu’a accompli l’historien afin d’extraire pour la postérité des aspects nouveaux et inédits concernant la plus iconique des souveraines de France. Marie-Antoinette, morte sous la guillotine le 16 octobre 1793, a fasciné le monde dès sa tragique disparition. On ne compte plus le nombre de livres, de films et de biographies qui lui sont consacrés, notamment la biographie de Stefan Zweig, devenue depuis une référence.

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L’auteur et conservateur au département des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France a donc accompli une véritable gageure en revenant d’une manière admirable sur le malheureux destin de l’épouse de Louis XVI, arrachée très jeune de son Autriche natale et catapultée sans expérience politique dans une monarchie moribonde en fin de parcours.

Pour révéler le vrai visage de Marie-Antoinette, au-delà des masques de l’imaginaire, Charles-Éloi Vial revient aux sources premières en balayant d’un revers de la main les filtres apocryphes, les stéréotypes et les demi-vérités entretenus durant plus de deux siècles par les historiographies et le mythe. L’auteur de 36 ans, à qui l’on doit un portrait de l’impératrice Marie-Louise, fait table rase et repart de zéro en fouillant jusque dans les documents bruts.

Son but : restaurer un portrait fidèle de la reine. Il s’intéresse, entre autres, aux manuscrits  passés presque inaperçus ou négligés par les historiens, tels le journal de son confesseur, l’abbé Maudoux, ou les papiers du maréchal de Castries, un proche de la souveraine. Leurs témoignages contemporains s’avèrent une mine d’informations qu’il corrobore avec d’autres sources : lettres, documents comptables et articles de presse d’époque.

À son arrivée à Versailles, la descendante des Habsbourg souffre d’une grande solitude intérieure, écartelée qu’elle est entre l’hostilité d’une cour qui considère l’Autrichienne comme une étrangère et un mari qui l’infantilise et la néglige.

Le lecteur découvre une jeune reine en total décalage avec son environnement, auquel elle a dû mal à s’acclimater. Elle trouve une porte de sortie à l’ennui qui la dévore dans les jeux d’argent et les divertissements organisés à l’intérieur de son fameux Petit Trianon, des échappatoires qui ternissent durablement son image auprès de la population. 4

L’historien, qui confirme sa liaison amoureuse avec Fersen, note un changement d’attitude dans le comportement de Marie-Antoinette à la naissance du dauphin, en 1778, mais ses actions politiques se heurtent à l’inexpérience. La dernière reine de l’Ancien Régime a souvent été dépeinte comme égoïste, dépensière, insouciante ou frivole.

Elle devient sous la plume lumineuse de Charles-Éloi Vial une femme au fort caractère, habitée par une profonde tristesse qui se métamorphosera en courage dans les derniers instants de sa vie.

Ismaël Houdassine

 

Marie-Antoinette

Charles-Éloi Vial, Éditions Perrin, Paris, 2024, 770 pages

Date de dernière mise à jour : 01/03/2024

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