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Législatives : ces désistements patriotes qui passent sous les radars

On en fait beaucoup, dans l’entre-deux-tours, sur le front républicain, ce barrage de castors seniors complètement aux fraises, qui permet à « l’arc républicain » de continuer bien tranquillement ses petites affaires, à l’abri du choix du peuple. Edouard Philippe, qui était censé représenter l’aile droite de la Macronie (et en soi, c’est déjà un concept), a annoncé récemment qu’il allait voter pour un candidat communiste. Vous comprenez bien, la sauvegarde de la république, et peu importe si ça ne représente rien de précis, est à ce prix. A l’inverse, les candidats du Nouveau Front Populaire, suivant les consignes de leur leader non déclaré, Jean-Luc Mélenchon, se désistent massivement lorsqu’ils sont en troisième position au premier tour. Oubliée, la participation record, qui donne au RN, arrivé en tête, une très forte légitimité. Comme dirait Alain Delon à la fin de Mort d’un Pourri, « tout est calme, dormez tranquilles, bonnes gens ». Pas la peine de voter, la république telle que l’entendent les politiciens de métier, trouvera des moyens de survivre aux dépens de son hôte, comme tous les virus.

Dans le Val-d'Oise, Sébastien Meurant s'est désisté pour bloquer la route au NFP.

Dans le Val-d'Oise, Sébastien Meurant s'est désisté pour bloquer la route au NFP.

Pourtant, il n’y a pas que le camp du bien qui se désiste pour servir une forme d’idéal. Certains candidats du Rassemblement National, pour barrer la route à la France Insoumise, ont également fait le choix de se désister. C’est par exemple le cas de Sébastien Meurant, dans la 4ème circonscription du Val-d’Oise, qui fait le choix de se retirer de la course, pour faciliter l’élection de Naïma Moutchou (Horizons), députée sortante, talonnée par Karine Lacouture (LFI). « L’amour de la France commande de laisser nos préférences personnelles de côté pour nous opposer fermement à cette coalition dangereuse », commente sobrement le député. Même chose dans la 11ème circonscription des Yvelines, où Victoria Doucet se désiste pour permettre au centriste Laurent Mazaury, arrivé deuxième, de remonter face à l’Insoumis William Martinet, arrivé en tête. On pourrait également citer la 2ème circonscription de Haute-Corse, dans laquelle Sylvie Jouart a été « débranchée » par l’état-major du RN dans les mêmes circonstances.

L'ingratitude en retour !

Pour autant, croyez-vous que ce désistement, pour le coup réellement patriotique quand on regarde dans le détail le programme apocalyptique de la France Insoumise, ait fait l’objet d’un quelconque remerciement de la part des partis concernés ? Pas vraiment. Naïma Moutchou s’est par exemple empressée de rappeler qu’elle n’avait rien demandé et qu’il était hors de question pour elle de faire alliance avec le RN. On n’est pas plus ingrat. Dans la presse, ce n’est guère mieux, car à l’exception du Figaro, qui se montre plutôt factuel, bien peu de journaux ont relayé le barrage du RN contre les folies des Insoumis.

Ce deux poids, deux mesures, assez scandaleux en soi, relève précisément de ces comportements consanguins et hypocrites dont les Français, très clairement, ont montré dimanche dernier qu’ils ne voulaient plus. Les alliances de circonstance entre businessmen de la petite cuisine politique, la « poloche » comme dit Edouard Philippe lui-même, peinent à convaincre. Le pouvoir lui-même n’est pas certain que les Français, jusque-là dociles et hypnotisés par le narratif des « heures les plus sombres », vote dimanche prochain comme on lui dira de le faire. Attendons. Et en attendant, bravo aux candidats RN qui, au lieu de profiter d’une dynamique qui leur est indubitablement favorable, ont préféré sacrifier leurs ambitions pour un plus grand bien. Ce n’est pas tellement courant de nos jours –, en politique moins qu’ailleurs.

Arnaud Florac

Date de dernière mise à jour : 04/07/2024

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