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FRANCE - L’âme d’une nation ne se compte pas, Hervé Le Bras !

Hervé Le Bras | Entreprises & Progrès

Il est des esprits pour qui la France se résume à des colonnes de chiffres, des courbes ascendantes ou déclinantes, des flux migratoires que l’on comptabilise comme on mesurerait le débit d’un fleuve. Ces esprits croient que le destin d’un peuple s’éclaire par la seule lumière des statistiques.

Ils observent la nation du haut d’un tableau Excel et concluent, froidement, que tout s’équilibre, que tout se régule, que rien ne se perd.
Mais la France n’est pas une donnée. Elle est une fidélité.

Le Bras — car c’est bien de lui qu’il s’agit — raisonne en démographe, et l’on ne saurait lui en faire grief : il voit des naissances, des décès, des arrivées, des départs. Il additionne, il soustrait. Ses chiffres sont exacts, mais son regard est incomplet. Car l’essence d’un peuple ne se loge point dans les registres d’état civil : elle respire dans ses mythes, dans ses coutumes, dans les mots mêmes qui tissent sa langue. Les statistiques révèlent la peau des choses, non leur âme. Un expatrié français n’est en rien un migrant musulman. Ces deux-là sont séparés par une culture identitaire et sont les tenants de deux civilisation distinctes qui s’opposent depuis le début.

L’historien véritable sait que la France n’est pas née d’un hasard géographique ou d’un concours démographique. Elle est le fruit d’un long consentement des siècles, d’une alliance tacite entre les morts et les vivants, entre la terre et l’esprit. Elle ne se compose pas seulement de ceux qui habitent aujourd’hui son territoire, mais de tous ceux qui, depuis mille ans, y ont prié, combattu, écrit, bâti, aimé. Voilà pourquoi le calcul des migrations ne saurait en épuiser le mystère.

On nous dit : « L’immigration renouvelle, régénère, rajeunit ». Certes, lorsqu’elle s’accorde à la symphonie nationale, lorsqu’elle accepte le ton et le rythme d’un peuple ancien, elle peut devenir une richesse. Mais encore faut-il que la nation soit reconnue comme un tout, et non comme un assemblage d’individus interchangeables. L’assimilation suppose une maison, et cette maison, c’est la culture. Ce n’est point l’arithmétique qui l’édifie, mais la mémoire.

Il est donc vain de croire que la survie d’un pays se mesure à son taux de fécondité ou à son nombre d’entrées annuelles. La France ne mourra pas faute de bras, mais faute de cœur. Ce n’est pas la diminution des naissances qui la menace, c’est l’oubli de sa filiation spirituelle. Or cet oubli prospère chaque fois qu’on réduit l’homme à une case, la nation à un diagramme.

La vraie science politique, la seule qui vaille, consiste à comprendre ce que les chiffres ne disent pas : la part invisible du lien social, la ferveur collective, la continuité du génie national. La démographie, comme la comptabilité, peut servir l’État ; elle ne peut fonder une civilisation.

Qu’on laisse donc les statisticiens calculer, mais qu’on se garde de leur confier l’âme du pays. Car il n’est de nation durable que celle qui se souvient de ce qu’elle est, et de ce qu’elle doit être encore.

La France ne se sauvera que par elle-même.

Jean-Jacques Fifre

Date de dernière mise à jour : 30/10/2025

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