
Les hommes politiques de ce pays ne finiront jamais de nous surprendre. Pour éluder sa propre responsabilité et celle de ses prédécesseurs, voici que le Premier ministre s’est mis en quête de boucs émissaires. Il n’a rien trouvé de mieux que les boomers, dont il est un exemple presque caricatural.
Parlons-en donc. Les générations de l’après-guerre seraient responsables de la situation des finances publiques, notamment du fait du poids de leurs retraites, mais aussi du confort dans lequel ils se seraient complu.
Les boomers travaillaient 40 heures et non 35
Peut-être faut-il rappeler à M. Bayrou que ces boomers, artisans des Trente Glorieuses, ont beaucoup travaillé pour créer la prospérité de la France et leur bien-être. Ils travaillaient 40 heures et non 35, avaient trois puis quatre semaines de congés payés, pas cinq ; jusque dans les années soixante, leur week-end débutait le samedi à midi et pas le vendredi. Ils eurent des enfants, ce qui assurait l’équilibre des comptes sociaux, et notamment des retraites. Ils payaient des impôts et comme ils équipaient leurs foyers, ils consommaient ce qu’ils produisaient par leur vie de travail et remplissaient les caisses de l’État grâce à la TVA.
Il est donc assez malvenu de les mettre en accusation. Car, enfin, c’est bien la lâcheté et l’irresponsabilité des gouvernements qui se sont succédé depuis 1981, et peut-être depuis 1974, qui est à l’origine de la situation actuelle.
Oukase idéologique
La démographie est une science sûre. Quand il a été patent que l’espérance de vie s’allongeait et que la vigueur démographique fléchissait, il eût été responsable de s’interroger sur l’avenir de notre système de retraite par répartition qui, mécaniquement, allait se trouver en difficulté. Mais il existait un oukase idéologique : parler de retraite par capitalisation (même complémentaire) était interdit, sauf pour la fonction publique qui, elle, pouvait recourir à Préfon. Et si ces gouvernements avaient eu un tant soit peu le sens des responsabilités et de l’avenir, ils auraient mené des politiques familiales fortes plutôt que de détruire une des seules politiques publiques efficace et qui était un modèle pour l’Europe qui s’enfonçait dans « l’hiver démographique ».
Les vrais responsables de la situation de la France, et pas uniquement sur le plan budgétaire, ce sont les « soixante-huitards » et la gauche dite de gouvernement. À partir du 10 mai 1981, la gauche a accumulé les erreurs et les fautes tout en sapant consciencieusement les piliers d’une société ordonnée. La liste des fautes est impressionnante : nationalisations coûteuses et inutiles, retraite à soixante ans généralisée, trente-cinq heures, embauche massive de fonctionnaires (création de 150.000 postes de fonctionnaires prévue dans les 110 propositions de François Mitterrand : durant ses deux septennats c’est 500.000 fonctionnaires qui furent recrutés !), impôt sur les grandes fortunes (visant, en pratique, la classe moyenne supérieure propriétaire), choc fiscal de François Hollande (50 milliards d’impôts supplémentaires [OFCE, 2016]), mise sous condition de ressources des allocations familiales qui pénalisait les classes moyennes au profit des classes dites populaires, laxisme migratoire. Et l’abandon de la souveraineté française dans les mains de la technocratie européenne a été le grand œuvre de François Mitterrand.
De surcroît, toute l’engeance « intellectuelle » de gauche soutenait les régimes totalitaires les plus immondes. Après avoir adulé Lénine et Staline, ce fut Mao (en dépit des témoignages de Simon Leys, traîné dans la boue), Pol Pot et le célèbre « La ville est libérée », Ho Chi Minh, Castro (reçu en grande pompe à l’Élysée, en mars 1995, et embrassé par Danielle Mitterrand) et même l’ayatollah Khomeini (Sartre, Beauvoir et Foucault furent ses soutiens et vinrent le voir à Neauphle-le-Château). Ineptes sur le plan politique et économique, ils étaient indignes sur le plan idéologique.
Lâcheté de la droite
Mais la droite conventionnelle a été d’une lâcheté lamentable car, hors les nationalisations, elle n’est revenue sur aucune des erreurs de la gauche, ou, quand elle a tenté de le faire, comme pour les retraites, c’est sans pédagogie. Elle a également multiplié le nombre de fonctionnaires (+800.000 sous Jacques Chirac) et persisté dans le laxisme migratoire. Quant aux abandons de souveraineté, elle en a rajouté dans l’indignité (Nicolas Sarkozy et le traité de Lisbonne), sans omettre un suivisme sur le plan économique au nom d’un grand marché de 500 millions de consommateurs plutôt qu’une grande économie de producteurs, ce qui a abouti à une désindustrialisation sans précédent.
La France ne se relèvera que par un renversement total des objectifs de gouvernement qui doivent être ordonnés d’abord aux intérêts des Français. Ce ne sera possible que par une alliance de toutes les droites de conviction pour le service de la nation.
Stéphane Buffetaut