
La France a un talent rare : celui de transformer un problème bien réel en un slogan creux, une réforme en une gesticulation, une politique publique en un spectacle médiatique. Avec une élégance toute particulière, notre pays sait allumer des contre-feux pour éviter de traiter les vraies questions. La taxe dite « Zucman », votée en première lecture dans une ferveur quasi révolutionnaire, en est l’illustration parfaite.
Présentée comme l’arme absolue pour « faire payer les riches », elle prévoit un impôt annuel de 2 % sur les patrimoines supérieurs à cent millions d’euros. Derrière les applaudissements des tribunes et l’enthousiasme des plateaux télévisés, une réalité économique et juridique se profile : cette taxe ne verra jamais le jour sous la forme annoncée. Elle s’évaporera dans les méandres du droit et de la procédure parlementaire, laissant derrière elle une France encore moins attractive pour ceux qui entreprennent et investissent.
Une spoliation et une forme d’expropriation
Ce débat est marqué par une confusion des mots et des idées. On a entendu des responsables politiques, des journalistes et même des ministres confondre revenu, bénéfice, patrimoine et valeur ajoutée. Ces notions, pourtant simples, sont fondamentales pour comprendre ce que l’on taxe et pourquoi on le taxe. Le revenu, c’est ce qui est effectivement encaissé : salaires, dividendes, loyers. Le patrimoine, c’est l’ensemble des biens — terres, immeubles, entreprises, brevets… Taxer un revenu, pourquoi pas. Mais taxer une valeur supposée, c’est obliger un propriétaire à vendre pour payer un impôt sur de l’argent qu’il n’a jamais touché. C’est l’essence même de la spoliation et une forme d’expropriation qui ne dit pas son nom. L’extrême gauche s’émeut de voir certains « laisser l’argent dans leur entreprise » pour investir et crie à la tricherie. Mais s’il n’y a pas de revenu, il n’y a pas d’impôt sur le revenu. Ironie du sort : ces mêmes voix protestent bruyamment lorsqu’une entreprise distribue des dividendes, c’est-à-dire exactement l’inverse de ce qu’elles leur reprochent aujourd’hui ! Nous sommes là dans la contradiction permanente et l’incohérence politique.
Au-delà de son absurdité économique, cette taxe se heurte au mur du droit. Le Conseil constitutionnel a rappelé trois principes intangibles : l’égalité devant l’impôt, la non-confiscation et le lien entre impôt sur le patrimoine et revenus réellement perçus.
Or, la taxe Zucman ignore ces règles et s’expose à être censurée ou vidée de sa substance. Ce qui a été présenté comme une grande révolution fiscale finira sans doute en tempête dans un verre d’eau. L’Histoire, hélas, se répète. Souvenons-nous de l’ISF : un rendement modeste — 4,2 milliards d’euros de recettes — mais des dizaines de milliers d’entrepreneurs et d’investisseurs partis sous d’autres cieux. Aujourd’hui, la France forme toujours des talents, mais ces talents créent leurs entreprises ailleurs. Le pays des Lumières est devenu celui des exils fiscaux. Autrefois, on venait s’installer en France, comme les Rolling Stones qui, dans les années 70, avaient enregistré leur album sur la Côte d’Azur pour fuir la fiscalité britannique. Aujourd’hui, la tendance s’est inversée : ceux qui réussissent quittent la France.
Et ceux qui pourraient venir n’y pensent même plus. La part des prélèvements obligatoires dans notre PIB atteint 45,4 %, un des niveaux les plus élevés au monde. Mais ce n’est pas suffisant pour financer l’État-providence : il faut, en plus, emprunter ! En 2023, près d’un tiers du PIB a été consacré à la protection sociale.
La compétitivité étouffée et l’investissement refroidi
Ce poids étouffe la compétitivité et refroidit l’investissement. La conséquence se mesure en entreprises qui naissent, croissent et prospèrent ailleurs, avec des emplois et des recettes fiscales qui ne reviendront jamais en France. Comme l’a relevé récemment l'économiste Sylvain Catherine, la France compte 22 licornes installées sur son sol, alors que 46 licornes américaines ont été fondées par des entrepreneurs français ! Plutôt que de multiplier les symboles fiscaux, la France doit engager de vraies réformes : réduire la bureaucratie qui engloutit 8 % des effectifs publics, fusionner les aides sociales en une allocation unique, aligner les retraites du public et du privé avec un étage de capitalisation, supprimer les normes inutiles pour libérer les collectivités et les entreprises.
Objectif : dépenser moins pour rendre de l’argent à ceux qui travaillent et enfin commencer à rembourser notre dette. On ne remboursera jamais notre dette en se fixant, chaque année, un « objectif de déficit » comme le promettent tour à tour nos Premiers ministres sans être jamais contredits ! Si le Parlement s’y refuse, consultons le peuple. Le 13 mai 2025, David Lisnard a proposé quatre référendums sur l’immigration, le système social, les retraites et l’élargissement du champ référendaire. La pétition de Philippe de Villiers, lancée il y a quelques jours, demandant de consulter les français sur le sujet de l’immigration, connaît un succès fulgurant avec plus de 1,5 million de signatures. En mai, déjà, le président de la République a promis une consultation « après l’été ». L’été s’achève. N’attendons pas l’hiver pour demander aux Français leur avis !
La taxe Zucman n’est qu’un mirage. Derrière l’illusion médiatique, les vrais défis demeurent. Il est temps de quitter le théâtre des apparences pour se confronter, enfin, à la réalité. S'il n’y a pas de majorité au Parlement pour traiter des vrais sujets, il y a une majorité de Français pour le faire.
Yves d'Amécourt