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J’ai été gardien au Louvre pendant 30 ans …

Musée du Louvre

Paraît-il qu’un braquage de bas étage vient d’avoir lieu au Louvre ? Que dire, si ce n’est qu’en ces lieux on devait se penser à l’abri de ce genre de larcins, que personne ne songerait, n’oserait même employer des méthodes à la Arsène Lupin, en plein jour, se pointer avec du matos de chantier, démolir une fenêtre de l’extérieur, pénétrer, braquer les vitrines à coups de marteau, juste au moment de l’ouverture au public, c’est-à-dire au moment où peut-être certaines alarmes sont neutralisées suivant des procédures que l’on n’évoquera pas ici, que le personnel de nuit finit précisément sa nuit, le personnel de surveillance de jour étant censé prendre le relais dans les salles, des rumeurs courant dans la presse à propos d’alarmes n’ayant pas ou mal fonctionné… Moment charnière délicat ayant dû être potassé par ces crapules. Dans un premier temps je n’ai pu m’empêcher de penser à des complicités internes… Mais il se pourrait également que de nombreux repérages eussent été faits en amont, au moment de l’ouverture du musée par des individus se faisant passer pour un innocent public et se rendant directement de l’entrée sur le lieu de leur futur larcin ?

J’ai pensé également aux pays dits de l’Est, susceptibles d’adopter ces méthodes de Pieds Nickelés (des gangs sont en effet réputés parcourir les campagnes en hordes et rafler à qui mieux mieux du gros matériel agricole, les bienfaits de l’Europe sans frontières faisant le reste. Mais je dois être honnête ; c’est précisément grâce à cette Europe que j’ai pu travailler 3 décennies dans cette administration française en tant que non Français – Le Louvre – et devenir titulaire, c’est-à-dire fonctionnaire, tout en gardant ma nationalité néerlandaise. Ce que, certes, l’on pourrait concevoir sans rendre possible les balades de ce type de gangs dans des territoires jambes grandes ouvertes… Je vois mal également des tartuffes de banlieue se servant comme dans une vulgaire bijouterie… À moins que précisément, un tartuffe ne soit capable de ce genre d’énormités ? Furent évoquées également des histoires de commanditaires, etc.  À part évoquer tout ça, je n’en sais rien à vrai dire.

Je me souviens également de l’épisode pickpocket. Les petits gangs, que l’administration ne pouvait officiellement empêcher de pénétrer en ses locaux, s’étaient aperçus que le musée était un terrain de chasse fort rentable. Devant la relative indifférence et mollesse de certains collègues, je décidai d’élever la voix et de hurler pickpockets ! pickpockets ! dès qu’il me semblait en croiser. Croyez moi ou pas, parfois au pied de l’escalier mécanique j’avais beau hurler, personne ne mouftait parmi les visiteurs, le brouhaha ambiant aidant, et ces petites crapules opéraient au su et au vu de tout le monde ! Un jour, un de ces petits puants me fit, du haut de le l’escalier mécanique, ce signe coupe-gorge avec l’index. Il ne me fit pas peur, en plein jour au beau milieu du Louvre. Par contre, je ne m’avisais jamais d’emprunter une ruelle sombre la nuit… Mais en étudiant certaines vidéos sur YouTube, j’avais pas mal appris et les décelais désormais grâce à certains comportements inévitables, hormis l’aspect physique qui peut se révéler piège à cons ; lorsqu’un regard est très concentré sur les sacs à dos par exemple, plus que sur les œuvres… Je crois me souvenir qu’à un moment la législation avait dû évoluer et du jour au lendemain les rats quittèrent le navire. (musée)

Le Louvre, c’est une structure lourde, des centaines d’employés, très hiérarchisée (catégories A, B, C, moi même faisant partie de cette dernière, dans la surveillance.  La surveillance, c’est un truc relativement ingrat, consistant à passer sa journée à débiter ; la Joconde c’est par là, les toilettes c’est par là, la sortie c’est par là, s’il vous plaît, ne touchez pas ! En fait le personnel est souvent une simple borne de renseignements. La routine, c’est un truc difficilement évitable. Et ce larcin est à mon sens également le fruit des méfaits d’une certaine routine. Comment ? J’ai pas dit Poutine ! (gag, suivez mon regard ; peut-être un coup des Russes, et/ou de l’extrême droite anti-vax ?) Et attention, dans ce petit théâtre quotidien, à ne pas trop mélanger les catégories ! Ainsi vous ne verrez que rarement – sauf de rares exceptions miraculeuses – se mélanger à la cantine les catégorie A – lorsque ces derniers daignent se risquer auprès de la lie – avec les B et encore moins, vous pensez bien, avec les C. Dans la vie courante, l’on voit en effet rarement des cadres aller au resto avec des ramasseurs de poubelles. Mais même entre collègues de même catégorie existe ce type de hiérarchisation. Selon la fonction (encadrement, intervention, surveillance, etc.), les gens peuvent assez rapidement se la péter, au royaume des aveugles, les borgnes étant rois… Simplement, je suis toujours resté à ma place de catégorie C, surveillance, j’avais décidé et accepté d’y rester cantonné, en souffrant parfois, le marché entre moi et mon employer était réglo, malgré certains cons que j’ai pu y croiser, j’ai fait preuve de régularité, un prêté pour un rendu, rien à dire et au final je suis reconnaissant à mon ancien employeur de n’avoir jamais eu à goûter au chômage longue durée. 

Lors de ma dernière visite au Louvre il y a quelques semaines (j’y faisais en effet régulièrement un crochet à l’occasion de mes rares passages à Paris 2 ou 3 fois l’an, histoire de saluer d’anciens collègues), je remarquai un durcissement des procédures d’accès. J’y allai cette fois-ci un mardi (jour de fermeture au public), il est vrai également qu’il y avait exceptionnellement un mécénat sous pyramide ce jour-là. Je retrouvai à l’entrée du personnel un  type avec lequel j’avais bossé en salle lorsqu’il était encore vacataire. Il m’apostropha de manière à mon sens peu cordiale (qu’est-ce que tu viens faire ?) et le tout finira en eau de boudin, nous nous envoyâmes chier mutuellement et je ne saluai donc pas mes anciens collègues ce jour-là. C’est ainsi qu’un ex petit vacataire qui suçait encore son pouce lorsque j’y étais depuis 20 ans déjà se mit à vouloir me faire la leçon. Il finira par lancer : « On n’est plus copains ! ». Mon Dieu, que vais-je devenir ? 

À l’occasion de l’affaire Sackler (aux USA, procès des opioïdes dans laquelle était impliquée la famille Sackler, grands donateurs au Louvre, lequel avait baptisé une partie des Antiquités orientales à Sully l’aile Sackler et avait depuis le procès – courant mai 2019 – très discrètement débaptisée l’aile redevenue Les Archers de Darius. Tellement discrètement d’ailleurs – silence pesant et langue de bois – que le petit personnel était à peine au courant de ce qui se tramait outre-Atlantique ; 500.000 morts en 20 ans à cause de cet antidouleur fabriqué et vendu par une famille de petits gangsters en col blanc, néanmoins généreux donateurs au Louvre. Je ne pris moi-même connaissance de ce scandale qu’en 2020 lorsque, à cause de la crise covid, maître Di Vizio fit une petite piqûre de rappel à propos du cabinet conseil McKinsey, auquel Macron avait fait appel, cabinet qui avait été impliqué dans le scandale des opioïdes. Suite au procès d’ailleurs, il s’acquittera discrètement d’amendes pour un montant  d’environ un milliard 300 millions de dollars (respectivement 640 millions de dollars courant 2021 et 650 millions de dollars courant 2024). Bienvenue donc aux Archers de Darius… Par ailleurs, j’avais pu constater à l’occasion de certaines réunions organisées à l’intention du petit personnel et ce, dès les années 2018-2019, l’apparition progressive de sociétés d’audit ou autres cabinets-conseils dans la gestion de certaines affaires courantes du Louvre. Probablement lié à l’élection de Foutriquet.

Au Louvre se croisent également toutes sortes de nationalités, dont notamment l’Afrique subsaharienne et le Maghreb. Je n’oublierai jamais cette collègue africaine qui, il y a une trentaine d’années, organisait et planifiait à l’avance des congés arrêts maladie et s’en vantait à mesure que vous osiez le cas échéant critiquer ; une sanction ad-hitlerum vous guettait ! Une époque où les syndicats étaient tout-puissants ; pour un oui pour un non, ils pouvaient vous bloquer l’entrée du Musée. Je parle d’il y a une trentaine d’années. Je n’oublierai pas non plus ce racisme larvé, hypocrite, dont je fus à l’occasion la cible de la part d’Antillais, de Subsahariens ou de Maghrébins. Typique attitude revancharde de ceux estimant être en territoire redevable. Mais je dois rendre à César ce qui appartient à César : j’y fis également de magnifiques rencontres. 

En 2025, je n’en reviens toujours pas… Le Louvre braqué comme une vulgaire épicerie !

Silvio Molenaar

Date de dernière mise à jour : 21/10/2025

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