
Dans une forêt détruite, une brigade de soldats ukrainiens combattent l’armée russe pour reprendre un village en ruines, Andriivka.
« Et si cette guerre durait toute notre vie ? », s’interroge un soldat dans ce document terrible tourné par Mstyslav Chernov, et présenté au Festival de Deauville.
Journaliste, réalisateur, romancier ukrainien, Mstyslav Chernov a reçu l’Oscar du meilleur documentaire pour « 20 jours à Marioupol », tourné pendant l’invasion russe en 2022. Il est retourné sur le front lors de la contre-offensive ukrainienne en 2023, et a tourné alors « A 2000 mètres d’Andriivka » (sortie en salles le 24 septembre), présenté en avant-première au Festival du Cinéma américain de Deauville. Un documentaire terrible, éprouvant, qui enchaîne les séquences particulièrement puissantes, des images filmées par une équipe de l’Associated Press mais aussi par les caméras fixées sur les casques ou les uniformes de soldats ukrainiens.
C’est « un cauchemar dont personne ne peut se réveiller » que cette effroyable guerre en Ukraine, dont Mstyslav Chernov témoigne dans ce film, embarqué avec une brigade. « Les crayons sont arrivés », est-il annoncé par radio, pour avertir de la venue de journalistes ; ceux-ci accompagnent une poignée de volontaires qui ont pour mission de reprendre à l’armée russe le village d’Andriivka. Coincés dans des tranchées, les soldats combattent un ennemi presque invisible à travers une satanée forêt, piteuse, le sol déformé de trous d’obus, des arbres décharnés, calcinés, un enfer de deux petits kilomètres à traverser.
Un village qui n’existe plus
C’est « A 2000 mètres d’Andriivka » que commence le récit, 2000 mètres pour rejoindre le village, traverser ce qu’il reste de cette étroite forêt, puisque les champs sont minés tout autour. La progression est lente dans cette bataille meurtrière, téléguidée à distance par des drones filmant l’évolution en bas, sur terre, l’avancement de ces hommes filmés dans l’action, dont on apprend que plusieurs ont été tués quelques semaines ou quelques mois plus tard.
Les combattants s’approchent, 1000 mètres, puis 600, puis 300, jusqu’à atteindre Andriivka, hameau abandonné et complétement détruit, au sol jonché de cadavres, avant de hisser le drapeau ukrainien au milieu de ruines. Combien de morts pour un village qui n’existe plus, et sera repris plus tard par les Russes. « Et si cette guerre durait toute notre vie ? », s’interroge un soldat.
Patrick TARDIT
« A 2000 mètres d’Andriivka », un documentaire de Mstyslav Chernov (sortie en salles le 24 septembre).