SCANDALE NATIONAL- À la veille de la rentrée, plus de 2 000 enfants dorment dans la rue

Que fait l''État ?

700 enfants sont contraints de dormir chaque soir dans les rues de Paris

L’image est glaçante : alors que les cartables se préparent et que les familles s’affairent pour la rentrée scolaire, 2 159 enfants ont passé la nuit à la rue en France. Parmi eux, 503 ont moins de trois ans.

Ces chiffres, publiés par l’UNICEF France et la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) dans leur traditionnel baromètre annuel, révèlent une situation qui ne cesse de s’aggraver. En un an, le nombre d’enfants sans solution a bondi de 6%, et de 30% depuis 2022, malgré l’engagement gouvernemental répété du « zéro enfant à la rue ».

Une crise nationale, des drames locaux

La majorité des familles interrogées (79%) déclarent avoir dormi dehors avant même leur appel au 115. Et encore, ce baromètre ne capture qu’une partie de la réalité : il ne prend pas en compte les mineurs non accompagnés, ni les familles réfugiées dans des squats, des bidonvilles ou chez des proches.
Certaines régions sont particulièrement touchées, comme l’Île-de-France, l’Auvergne-Rhône-Alpes, l’Occitanie et les Hauts-de-France. Dans ces territoires, associations et collectifs citoyens constatent chaque jour l’impuissance des dispositifs saturés. Faute de mieux, certaines familles trouvent refuge dans des hôtels insalubres, des gymnases ou sous des tentes de fortune.
La situation est tout aussi dramatique dans les Outre-mer. À La Réunion, plus de 1 000 enfants étaient sans solution en 2024, dont 330 de moins de trois ans, selon la Fondation pour le Logement des Défavorisés. À Mayotte, où un tiers de la population vit déjà dans un habitat précaire, le passage de plusieurs cyclones a encore aggravé la détresse des plus fragiles.

Quand l’insupportable devient quotidien

Le drame ne se limite pas à l’absence de toit. En 2024, 855 personnes sont mortes dans la rue, dont 31 enfants. Le nombre de nourrissons et de tout-petits laissés sans solution ne cesse d’augmenter : +8% en un an, +37% depuis 2022.
Pour les associations, il s’agit d’un blocage structurel des droits à l’hébergement et au logement. Cette année, le Collectif des Associations pour le Logement a d’ailleurs engagé deux recours juridiques pour « Non-assistance à personnes mal-logées », visant directement la responsabilité de l’État.

Un test politique majeur avec le budget 2026

À l’approche de l’examen du Projet de loi de finances 2026, les organisations appellent à une hausse immédiate des capacités d’hébergement adaptées aux familles et à une programmation pluriannuelle “de la rue au logement”. Celle-ci devrait inclure un plan massif de production de logements sociaux et très sociaux, seule manière de desserrer l’étau de la crise.
Adeline Hazan, présidente de l’UNICEF France, dénonce une « volonté politique défaillante » : « Chaque année, nous constatons avec indignation qu’un nombre croissant d’enfants dorment dans la rue, exposés à des conditions de vie indignes et à des dangers quotidiens. Les solutions existent, ce qui manque, c’est une volonté ferme d’y mettre fin. »
Même constat pour Pascal Brice, président de la FAS, qui rappelle : « Ce baromètre est celui des renoncements. Nous ne pouvons pas admettre que, dans notre pays, des enfants retrouvent la rue le soir après l’école. »

Une question d’humanité

Derrière les chiffres, ce sont des vies abîmées, des enfances brisées par l’insécurité et l’instabilité. Le baromètre de l’UNICEF et de la FAS agit comme un miroir : il renvoie à la société française une image qu’elle peine à accepter, celle d’un pays où l’on peut naître, grandir… et mourir dans la rue.

Émilien Lacombe

Date de dernière mise à jour : 28/08/2025

1 vote. Moyenne 4 sur 5.