L’armistice du 10 juillet 1940

22 juin 1940 : armistice entre le IIIe Reich et la France | RetroNews.fr -  Le site de presse de la BnF

« L’Armée d’Afrique a été significativement renforcée par le régime de Vichy… Bien que le gouvernement du maréchal Pétain ait été officiellement neutre, il a contribué au développement et au soutien de l’armée d’Afrique… Après l’armistice de 1940, les effectifs de l’armée d’Afrique ont continué à augmenter. Ses effectifs ont pu atteindre près de  200 000 hommes en 1942, juste avant l’opération « Torch » et le basculement de l’armée d’Afrique du côté des Alliés. Alors que le général Weygand était délégué général en Afrique française, le gouvernement de Vichy a fourni à l’armée d’Afrique des armes, des véhicules, des munitions et des matériels militaires. Ces approvisionnements ont aidé l’armée d’Afrique à maintenir sa capacité de combat et à se préparer à affronter les forces de l’Axe en Afrique du Nord… »                             

Tout juste rentré d’un long mois de tourisme itinérant en Italie, Slovénie, Croatie, Autriche, Suisse et Allemagne – sans télé, sans radio, sans journaux – je n’ai pas envie de commenter une actualité que je n’ai pas suivie. De plus, je constate, à peine revenu chez moi, qu’on ne nous parle que de canicule. La droite et les écolos-gauchos se battent autour de l’urgence à climatiser les Ehpad, les hôpitaux et les écoles. Je rappelle, au passage, que le financement des moyens de lutte contre les variations climatiques a été décidé après la canicule de… 2003,  il y a donc… 22 ans. Où est passé cet argent ? Qui l’a géré ? Qu’a-t-on fait depuis 2003 ? RIEN ! Nada ! Que dalle !

Comme je n’ai pas envie, disais-je, de vous parler du présent, je vais dire un mot d’une date historique que d’aucuns considèrent comme une tache de notre histoire alors qu’elle a contribué à notre libération, en août 1944, par notre armée d’Afrique, « l’Armée B » du général de Lattre de Tassigny. Je veux parler du 10 juillet 1940, signature de l’armistice entre la France et les forces du IIIe Reich qui venaient de nous infliger la plus mémorable raclée de notre histoire, pourtant riche en défaites plus ou moins glorieuses. L’armistice avait été demandé par le maréchal Pétain le 17 juillet 1940, dans un discours émouvant dans lequel le vainqueur de Verdun, ce digne vieillard, « faisait don de sa personne à la France pour atténuer ses malheurs… ». L’offensive de mai et juin 1940 nous avait coûté plus de 90 000 morts, 300 à 400 000 blessés ou disparus et 1,8 million de prisonniers.

Commençons préalablement par dénoncer les mensonges que l’on peut entendre au sujet de la non-légitimité du régime de Vichy : assez régulièrement, des journalistes, des historiens, des hommes politiques – de droite comme de gauche – viennent dénoncer « les heures les plus sombres de notre histoire » en affirmant péremptoirement que                                 « L’État français » n’a jamais existé puisqu’il n’avait, selon eux, « aucune existence légale ». Il est facile de tirer sur une ambulance  et davantage encore, sur un corbillard ! Tentons de nous en tenir au droit constitutionnel, et tentons surtout de rester factuel, sans passion partisane : on voudrait nous faire croire que l’« État français » était illégitime donc illégal. Cet énorme « bobard » permet de tirer un trait sur quatre années de notre histoire, de la demande d’armistice de juin 1940 à la Libération. Les gaullistes affirment que la France était à Londres. Pétain et Laval auraient, nous dit-on, effectué une sorte de coup d’État pour s’emparer du pouvoir. Or les parlementaires français ont accordé les pleins pouvoirs au maréchal Pétain par 569 voix pour et 80 contre, soit, en gros, 85 % des suffrages exprimés. Pour être précis, le vote se décompose comme suit :

Votants………………………………………………………..666

               Majorité absolue ………………………………333

               Pour ………………………………………………..569

               Contre ………………………………………………80

               Abstentions ……………………………………….17

             Rappelons aussi que ce vote a eu lieu le 10 juillet 1940. Comment ose-t-on écrire que la France et ses représentants légaux ne pardonnaient pas au maréchal Pétain d’avoir demandé les conditions d’un armistice le 17  juin ? On nous raconte,  et ce depuis la Libération, que « tous les parlementaires n’étaient pas présents », qu’une partie du gouvernement, des députés, des sénateurs, avaient embarqué sur le « Massilia » au départ de Bordeaux, vers l’Afrique du Nord.

Or le « Massilia » a appareillé de 21 juin 1940, soit quatre jours après la constitution du premier gouvernement du maréchal Pétain. À son bord, 27 parlementaires français, pas un de plus.

Si ces 27 avaient voté contre les pleins pouvoirs, ça n’aurait RIEN changé au résultat final.

             Le « gouvernement de Vichy » a été institué par la loi constitutionnelle du 10 juillet 1940.

Cette loi invitait le gouvernement du Maréchal à promulguer « une nouvelle Constitution de l’État français ». Rappelons, au passage, ce qu’est une Constitution : « C’est la volonté d’un peuple de s’ériger en Nation. » Cette nouvelle Constitution devait garantir « les droits du Travail, de la Famille et de la Patrie ». On notera que la formule « État français », comme la devise « Travail, Famille, Patrie » furent utilisés – donc légalisés – par l’Assemblée nationale dont plus de la moitié des membres étaient de gauche (SFIO, radicaux socialistes…). Certes, le régime qui s’installait rompait avec la tradition républicaine, mais cela est dû au refus du président Albert Lebrun de démissionner, malgré les supplications de Pierre-Étienne Flandin qui souhaitait que le  Président de la République se retire au profit du maréchal Pétain. Ce dernier aurait alors dû appliquer à la lettre les textes constitutionnels de 1875 : la Constitution de 1875 donnait au chef de l’État la plénitude totale du pouvoir exécutif (puisqu’elle ignorait le président du Conseil). De surcroît, l’article 1er de la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875 précise que les sessions parlementaires doivent durer au moins cinq mois par an. Dès lors le gouvernement aurait pu se dispenser de réunir le Parlement jusqu’en janvier 1941, puis clore la session jusqu’au 1er août. Dans l’esprit de  Flandin, ça ouvrait toutes les possibilités. L’obstination d’Albert Lebrun conduisait forcément (et légalement) à la mise en place d’un nouveau régime. De plus, la doctrine sociopolitique que véhiculait le nouveau gouvernement était la résultante de réflexions de milieux intellectuels très divers. On a surestimé, après-guerre, le rôle et l’influence des maurrassiens. Mais, dans une large mesure, la « Révolution nationale » divergeait  et parfois même s’opposait aux conceptions maurrassiennes.

Bien plus important est l’impact de ceux qu’on a appelés les « non-conformistes des années 30 », les gens de la revue « Esprit » (Emmanuel Mounier, Georges Izard, Daniel Rops) ou d’« Ordre nouveau » (Robert Aron) ou encore les disciples de Tardieu : les uns et les autres, très critiques à l’égard du parlementarisme, voulaient une réforme rendant sa primauté à l’exécutif, souhaitant la création d’un État corporatif.  C’était également le point de vue d’économistes éminents : Gaëtan Pirou ou François Perroux. Et l’avis des milieux catholiques depuis Albert de Mun et La Tour du Pin.

Le maréchal Pétain est donc arrivé au pouvoir le plus légalement du monde ! Et le pays tout entier, ébranlé par la débâcle de juin 1940 – des civils sur les routes de l’exode, notre armée en miettes, presque 2 millions de prisonniers –  fut bien heureux que le vainqueur de Verdun, vieux maréchal de 83 ans, fasse « don de sa personne à la France » pour atténuer ses malheurs. Personne ou presque n’a entendu l’appel du 18 juin ; en revanche, tout un peuple, sonné, battu, inquiet, a écouté l’appel pathétique du Maréchal le 17 juin. Ensuite, dans un pays qui comptait alors 42 millions d’habitants, il y eut, selon l’historien Henri Amouroux, « 40 millions de pétainistes ». Les mêmes se réveillèrent gaullistes après les deux débarquements de juin et d’août 1944.  Le vieux maréchal devint alors le bouc émissaire, responsable du malheur des Français. On a voulu oublier que l’armistice signé le 10 juillet 1940 avait sauvé notre Empire et avait permis aux généraux Weygand et Giraud de faire de notre armée d’Afrique une force magnifique qui allait s’illustrer pendant la campagne d’Italie, puis durant la reconquête de la métropole après le 15 août 1944.

De nos jours, il est de bon ton d’aduler de Gaulle qui fut, j’en conviens, un remarquable illusionniste, or le Français, naïf ou crédule, a besoin d’illusions: c’est sous de Gaulle que la France connut la Libération et mai 1968. Deux psychodrames épisodiques grâce auxquels les Français retrouvent une conscience et la France, un pucelage.  La pantalonnade de mai 68 a permis de passer de « la Carmagnole » à « la Marseillaise »  sans passer par la révolution. Quant à juin 1944, ce fut, pour une majorité de nos concitoyens, ce qui a permis de sauter du passé à l’avenir sans avoir besoin du présent, et pour beaucoup d’entre eux, de passer de la défaite à la victoire sans passer par la guerre. Finalement, de Gaulle aura été – à trois reprises si l’on rajoute le drame algérien – la bonne conscience des lâches.

Eric de Verdelhan                                                                

Date de dernière mise à jour : 03/07/2025

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