●●● 31 MARS 1814 : CAMPAGNE DE FRANCE - NAPOLÉON À FONTAINEBLEAU

Le 30 mars 1814, à 10 heures 30 du soir, après une course éperdue à cheval, puis dans un cabriolet d’osier, depuis Troyes, Villeneuve l’Archevêque, Sens où il déjeune, Villeneuve-la-Guyard, Moret, Fontainebleau, Napoléon, accompagné de Caulaincourt, arrive à la Cour de France. Là, dans une maison de postes des Fontaines de Juvisy, vers 23 heures, il apprend de la bouche de Belliard que Paris a capitulé. Napoléon demande à voir aussitôt Berthier. Consterné, il lâche: "Si je fusse arrivé plus tôt, tout était sauvé !" Belliard raconte: "il était très fatigué, il s’assit, se prit la tête dans les mains et resta longtemps dans cette position".

Napoléon écrit à son épouse, dort un court instant, envoie Caulaincourt auprès des Alliés pour tenter de négocier une paix. Mais le Tsar refuse catégoriquement, et affirme respecter l'accord passé avec ses Alliés, bien qu'il ne dise éprouver aucune animosité à l'égard de Napoléon. De Paris, Caulaincourt enverra un courrier pour annoncer que la capitulation est définitive. Le général Flahaut apporte à l’Empereur un message de Marmont annonçant aussi la capitulation. Napoléon décide vers quatre heures de se rendre à Fontainebleau où il pense pouvoir rassembler son armée. Il arrive au château le 31 mars à 6 heures du matin.

Le baron Fain dira: "les roues brûlaient les pavés", et Bourrienne: "après avoir passé une partie de la nuit à Froidmanteau, l’Empereur se dirigea sur Fontainebleau où il arriva à six heures du matin. Il ne fit pas ouvrir les grands appartements, et se campa plutôt qu’il ne se logea dans le petit appartement qu’il affectionnait. Napoléon en arrivant s’enferma dans son cabinet et y resta seul la journée du 31 mars 1814".

L’Empereur s’est débarrassé de sa redingote des de son chapeau. Il s’assoit, semble accablé par les événements récents. Le voilà seul, trahi par tant des siens, effondré, Il prend conscience de la finitude de son règne, mais, malgré tous les obstacles accumulés, ne s’avoue toujours pas vaincu…

●●● Comment Napoléon a tenté de rallier l’islam à la Révolution française

En 1798, Bonaparte lance son expédition en Égypte. Si l’idée initiale est de couper aux Anglais la route de leur colonie indienne, le général espère aussi exporter les idéaux de la toute jeune Révolution française et, pour cela, il va tendre la main à l’islam et à ses représentants.

Le 20 août 1798, au Caire, Napoléon célèbre en grande pompe le mawlid al-nabawi, l’anniversaire de la naissance du prophète Mohammed. © PVDE/Bridgeman Images

À l’évidence, Bonaparte n’a pas découvert l’islam en se réveillant un beau matin sur le sol égyptien. C’est d’abord au travers de l’orientalisme – en vogue en Occident durant le siècle des Lumières – que le futur empereur des Français a eu vent de la religion de « Mahomet ». Des penseurs orientalistes comme Volney ou De Sacy n’ont pas de secret pour lui, sans parler de l’intérêt que porte Bonaparte à Rousseau et à la réflexion de celui-ci sur le prophète « Mahomet » dans son fameux essai Du contrat social.

Une traduction du Coran dans ses bagages

Le général français a aussi lu L’Histoire des Arabes sous le gouvernement des califes, de l’abbé Augier de Marigny, publié en 1750. Et parce que la compréhension du monde arabo-islamique ne va pas sans une bonne connaissance du Coran, Napoléon transporte avec lui en terre égyptienne une traduction du livre saint signée de l’orientaliste Claude-Étienne Savary, à l’époque le plus fin expert français de l’islam. Tout ceci façonne et forge la pensée du conquérant.

Le général, par ailleurs, est un homme de son temps. Difficile, dès lors, de se démarquer d’un siècle que les idées révolutionnaires ont marqué au fer rouge. Comment ne pas être tenté d’associer idéologie politique et religion ? Selon l’historien Henry Laurens, c’est ce que Napoléon va réaliser.

« Bonaparte et ses conseillers orientalistes jugent que l’on ne peut gouverner l’Orient qu’en utilisant l’islam comme arme politique […]. C’est ainsi que Bonaparte, pour pousser les populations égyptiennes à se rallier aux Français, mélange la rhétorique révolutionnaire française et la légitimation islamique des révoltes : il affirme que les Mamelouks ne respectent pas Dieu […] et que les Français sont les vrais musulmans puisqu’ils ont chassé le pape de Rome et détruit l’ordre de Malte », analyse l’historien arabisant.

Pas d’appel au jihad en échange de la préservation des waqf

Bonaparte joue ainsi de la fibre patriotique et du sentiment d’arabité afin de soulever les Égyptiens contre les Turcs, en associant arabité et islam. Mais les Égyptiens de cette fin du XVIIIe siècle ont-ils le sens de la nation arabe ? Rien n’est moins sûr. Le conquérant tente là une synthèse entre Occident et Orient à travers l’apport de la Révolution française, mais l’argument demeure en grande partie inaudible pour les oulémas, muftis, alim, cheikhs et autres dignitaires musulmans. Pourtant, Bonaparte veut à tout prix les convaincre de ses bonnes intentions à l’égard de l’islam. Il va donc aller plus loin.

Ainsi, dès le 2 juillet 1798, à la suite des combats, le général français fait placarder sur les murs des villes des affiches proclamant : « Égyptiens, on vous dira que je viens pour détruire votre religion : c’est un mensonge, ne le croyez pas. » Ensuite, il reçoit une délégation de notables auxquels il assure que son armée respectera intégralement les institutions religieuses. Il s’engage également à garder en l’état les waqf, c’est-à-dire les biens de mainmorte qui permettent de gérer les établissements religieux. En contrepartie, muftis et cheikhs promettent de ne proclamer en aucun cas le jihad ou toute autre action violente contre les Français.

Célébration du mawlid

Par la suite, Napoléon fait strictement respecter les mœurs musulmanes. Lettré égyptien et observateur de son époque, Abdel Rahman el-Gabarti relève que « d’habitude, les Français ne buvaient que pour être gais, et si quelqu’un d’entre eux buvait outre mesure, il ne quittait pas sa maison, car s’il en sortait et s’il commettait des désordres, il était puni ».

Par ailleurs, Bonaparte va s’afficher auprès de la population. Pour gagner le cœur des Égyptiens, c’est en grande pompe, au Caire, qu’il célèbre le mawlid al-nabawi, l’anniversaire de la naissance du Prophète. À cette occasion, les notables lui donnent le nom de « Ali Bonaparte ». Ce qui est un signe d’affection évident

Tous les Égyptiens, pourtant, n’acceptent pas si facilement la présence française. En octobre 1798, les Cairotes se soulèvent. La répression est féroce, et les symboles ne sont pas épargnés. La mosquée d’Al-Azhar – la plus haute référence de l’islam sunnite, là-même où Bonaparte avait célébré au milieu des oulémas psalmodiant les versets du Coran, la naissance du Prophète – est profanée. Elle devient par la suite un haut lieu de la résistance aux Français.

Correspondance avec Ghaleb Ibn Musaid, gardien des haramayn

De son côté, le général français comprend que son rêve d’une République islamique tombe à l’eau. Il change de tactique. « Quand il devint évident pour Bonaparte que sa force était insuffisante pour s’imposer d’elle-même aux Égyptiens, il essaya de faire interpréter le Coran en faveur de la Grande Armée par les imams, cadis, muftis et oulémas locaux. Dans ce but, les soixante oulémas qui enseignaient à Al-Azhar furent invités à son quartier général, tous les honneurs militaires leur furent rendus, puis il leur fut permis d’être flattés par l’admiration de Bonaparte pour l’islam et Mahomet, par son évidente vénération pour le Coran, qu’il paraissait connaître familièrement », explique le penseur palestino-américain Edward W. Said dans son célèbre ouvrage L’Orientalisme, l’Orient créé par l’Occident. En vain.

La politique musulmane de Bonaparte ne se limite d’ailleurs pas à l’Égypte, quand bien même celle-ci est dominante. Le général français implique également le Hedjaz dans sa stratégie politique, et ce dès l’entame de l’expédition. Une fois au Caire, il correspond avec le grand chérif Ghaleb Ibn Musaid, le gardien des haramayn, Médine et La Mecque, les deux lieux saints de l’islam. Il va par tous les moyens tenter « d’affirmer l’autorité religieuse indépendante du chérif de La Mecque et d’essayer de l’élever en contre-pouvoir du calife de Constantinople », note Henry Laurens.

Alliance avec les wahhabites contre la Sublime Porte

Le Français va même chercher l’alliance des wahhabites : en 1803, il charge l’orientaliste Louis Alexandre Olivier de Corancez d’entrer en contact avec le chef des Ibn Saoud, le chérif Saoud Ibn Abdelaziz. Une façon pour lui d’affaiblir la Sublime Porte en attisant l’islam arabe contre l’islam turque.

En cela, le général français est en avance sur son temps puisque cette scission entre les deux islams s’inscrira dans les luttes indépendantistes du XXe siècle. Et parce qu’il reste un homme d’action, il lance dès 1799 une campagne en direction du bilad al-sham (la Syrie historique et la Palestine), toujours dans le but de soulever les Arabes contre la présence ottomane qui dure depuis le XVIe siècle. Ce sera toutefois un échec.

Le rêve d’instaurer un islam républicain en Égypte ne sera pas non plus en vrai succès. À partir d’Al-Azhar va se structurer une résistance aux Français, et la contre-propagande turque va porter ses fruits auprès de la population, qui finira par ne voir dans les Français que des envahisseurs chrétiens, ennemis de l’islam.

« Un Mahomet d’Occident », dixit Victor Hugo

En août 1799, Bonaparte, que les nouvelles venues de France inquiète de plus en plus, quitte l’Égypte hâtivement et transmet le commandement à Kléber. Cela ne marque toutefois pas la fin de la relation du futur empereur avec l’islam. Goethe et Victor Hugo voient juste quand ils baptisent respectivement Bonaparte « der Mahomet der Welt » et « un Mahomet d’Occident », tellement l’émerveillement de l’officier français est grand pour le prophète d’Allah.

Conquérant lui-même, Bonaparte voit dans le Prophète un meneur d’hommes qui a su constituer un empire. Quant à son intérêt pour l’islam, il mêle une vraie sincérité et sans doute une dose d’opportunisme. Ne déclarait-il pas devant le Conseil d’État, le 1er août 1800 : « C’est en me faisant catholique que j’ai gagné la guerre en Vendée, en me faisant musulman que je me suis établi en Égypte, en me faisant ultramontain que j’ai gagné les esprits en Italie. Si je gouvernais un peuple juif, je rétablirais le Temple de Salomon. »

Farid Bahri

●●● Naissance de Charles Léon Bonaparte

13 décembre 1806

Fils illégitime de l'empereur Napoléon Ier et de sa maîtresse Eleonore Denuelle de la Plaigne, il naît à Paris et meurt en 1881 à Pontoise. Il aura une carrière de chef de bataillon dans la garde nationale de 1830 à1832 et sera fait comte d'Empire. Il est à noter que c'est l'empereur qui à choisi de l'appeler Léon, en effet, sa mère voulait l'appeler Napoléon mais l'empereur voulant fonder une dynastie légitime refusa que cet enfant bâtard porte le même prénom. Il sera d'ailleurs surnommé le " bâtard infernal " par rapport à ses revendications, notamment sur le droit de porter son nom, qu'il présentait à répétition. Napoléon III fera d'ailleurs en sorte de l'éloigner de Paris.

La mère de Charles est issue d'un couple assez aisé. Son père était maître des eaux et forêts et bénéficiait d'un privilège royal étant l'un des douze fournisseurs de vin du roi. Sa mère quand à elle est la fille d'un maître d'hôtel de l'ambassadeur du roi de Naples.

Napoléon et Eléonore auraient commencés leur aventure en février 1806 et se sont connus par l'intermédiaire de Caroline Murat, sœur de Napoléon et femme du maréchal d'Empire Joachim Murat. En effet, Elonore habitait le pavillon du parc du château de Neuilly, résidence des Murat. A cette époque, Eléonore est mariée à monsieur Revel et le divorce sera prononcé un mois plus tard après la rencontre avec l'empereur.

Napoléon ne légitimera pas son aventure mais dotera Eleonore et fera en sorte de la remarier ce qui sera chose faite en 1808 avec Pierre-Philippe Augier de la Sauzaye, lieutenant au 15° régiment d'infanterie de ligne, qui mourut lors de la campagne de Russie en 1812 après le passage de la Bérézina.

Le comte Léon eut une vie tumultueuse avec plusieurs fugues et des mises sous tutelles. Dépensier et adepte du jeu, il ira en prison en 1838 pour dettes. Grand habitué des duels, il causa de grands tourments à sa mère assignant celle-ci en justice pour récupérer une partie de sa fortune. Ces dettes furent épongées par son cousin Napoléon III lorsque celui-ci devint empereur.

Charles Léon se maria à une couturière de qui il eût 4 enfants qui ont une descendance encore présente aujourd'hui.

Article écrit grâce aux sources suivantes:

Livre :

" Napoléon en 1000 dates " aux éditions Atlas

Peut être une image de 1 personne

●●● 18 MARS 1805: ÉLISA REÇOIT LA PRINCIPAUTÉ DE PIOMBINO

Élisa, de son vrai prénom Maria-Anna, quatrième enfant vivant de Charles et Letizia Bonaparte, aînée des sœurs de Napoléon 1er, est née à Ajaccio en 1777. Marboeuf, gouverneur de la Corse, ami de la famille, lui fait obtenir une bourse pour intégrer la prestigieuse école de jeunes filles nobles, la maison royale de Saint-Cyr, fondée en 1686, par madame de Maintenon. Elle y séjourne de 1784 à 1792, et, l’établissement devant fermer par décret du 16 août 1792, le quitte, à l’âge de quinze ans.

Napoléon la ramène alors à Ajaccio. Mais la Corse est divisée, les Paolistes ont la dent dure contre Letizia Bonaparte, qui est veuve depuis sept ans. Elle est obligée, avec ses enfants, de se réfugier sur le continent, près de Toulon, et à Marseille, où la famille vit dans une pauvreté extrême, aidée seulement par la solde de Napoléon.

En 1797, Napoléon est général en chef de l’Armée d’Italie. Élisa, qui avait été un temps courtisée par l’amiral Truguet, a 20 ans. Un officier corse d’origine noble, Pascal-Felix Baciocchi, à la carrière militaire peu brillante: à 35 ans il est seulement capitaine d’infanterie légère, alors qu’il avait débuté vingt ans plus tôt comme sous-lieutenant au Royal-Corse, la demande en mariage. De plus, les Baciocchi ont entretenu de bonnes relations avec Paoli, l’ennemi de la famille.

Le mariage, favorisé par Joseph, est célébré à Marseille le 1er mai 1797. Napoléon, averti trop tard, ne peut s’y opposer. Les deux époux vivent un temps au château de Mombello, près de Milan, où Bonaparte tient sa cour. Le 11 juillet 1797, Baciocchi est nommé chef de bataillon et reçoit le commandement de la citadelle d’Ajaccio,.

En décembre 1797, Élisa et Pascal-Félix sont à Paris, invités par par Lucien. Élisa se lie d’amitié avec Mme Récamier. Alors que son époux, commandant d’une demi-brigade, est à Sedan, puis à Saint-Omer, elle rencontre en 1800, dans les salons de Lucien, Louis de Fontanes, directeur du Mercure de France, qu’elle fera plus tard nommer président du Corps législatif, puis comte de l’Empire, sénateur, et grand-maitre de l’Université. Son ami Fontanes lui présente Chateaubriand. Elle fait lire Atala à Napoléon, et obtient la radiation du nom de l’écrivain de la liste des émigrés. Chateaubriand, d’elle, parlera de "la belle", de "l’excellente protectrice".

Par le décret du 18 mars 1805, Élisa, devenue altesse impériale, reçoit l’administration, en Italie, de la principauté de Piombino, comprenant l’île d’Elbe, puis la principauté de Lucques. Plus tard, le 2 mars 1809, un sénatus-consulte lui attribue le grand-duché de Toscane, qui en 1808, avait été enlevé à la reine d’Étrurie, et rattaché à l’Empire. De plus, Napoléon fait de son son mari un prince, et le nomme général de division. Élisa réside alors à Florence, au palais Pitti.

Élisa, dans son grand-duché, sait s’entourer de personnes sérieuses et compétentes. Elle crée des écoles, des hôpitaux, et une Académie Napoléon qui protège les arts. Elle fait entreprendre de grands travaux, met en valeur les mines de fer de l’île d’Elbe, relance les manufactures de soierie et de velours. Toutes ses décisions sont systématiquement imprimées dans les deux langues, français et italien.

Le 31 janvier 1814, alors que les Napolitains entrent dans Florence, Élisa, enceinte de trois mois, se réfugie à Lucques, puis retrouve à Gênes son mari, part pour la France, et devant l’avance des Alliés, peut l’espoir de gagner Paris et se retrouve à Montpellier, où elle apprend la chute de Paris. Elle part ensuite pour Bologne, puis tente de gagner Vienne pour plaider sa cause devant l’Empereur d’Autriche. Elle retrouve Jérôme à Graz. repart vers Bologne, et sur la route, à Paseriano, donne naissance à un fils.

Après le débarquement de Golfe-Juan, Élisa est arrêtée par l’armée autrichienne, et internée quelque temps à Brünn en Moravie, elle sera ensuite autorisée par le chancelier Metternich à s’installer près de Trieste, où, sous le nom de comtesse de Compignano, elle retrouve Jérôme et Fouché. C’est là qu’elle décèdera en 1820 des suites d’une mauvaise fièvre. Felix Baciocchi lui survécut jusqu’en 1841. Élisa sera inhumée à Bologne, en la basilique San-Petronio.

• Pierre-Louis Roederer, qui a fréquenté Élisa, fait d’elle dans ses “Mémoires sur la Révolution, le Consulat et l’Empire" (1856) le portrait suivant:

"Voici la personne de la famille que j’aime le plus. Elle est d’une taille ordinaire; mince, maigre, point de gorge, les bras menus, la jambe et le pied jolis; une figure bien faite, profil antique, des cheveux noirs, des yeux noirs, la peau assez blanche, la bouche assez grande, de belles dents, une extrême mobilité dans la physionomie son état le plus habituel est un air vif et un peu dur. La décence, la bonté, quelque fois l’air de l’ennui et de la contrainte, quand elle est avec des personnes qu’elle connaît peu. L’air gai, ouvert, spirituel avec des amis, quand elle s’amuse. Elle passe brusquement d’une physionomie à une autre, comme une idée, d’une affection, à l’idée à l’affection contraire.

La mobilité de sa figure n’est pas son seul charme, c’est aussi la force de son expression; c’est le mélange de diverses expressions. Souvent les rires et les larmes se mélangent. Elle aime passionnément la tragédie, elle sait par cœur des fragments des plus beaux rôles de Racine et Voltaire, elle affectionne les rôles des situations héroïques, elle les débite assez bien, quoiqu’avec un peu d’accent méridional. Elle a ce goût de commun avec le Premier Consul et Lucien qu’elle aime beaucoup. Cela pourrait faire douter s’il est naturel et caractéristique ou communiqué.

Dans la même seconde, elle souffre, elle crie, elle pleure, elle rit et console ceux qui l’entourent. Je n’ai vu personne qui se livrât plus franchement à ses premiers mouvements et qui gagnât moins à les réprimer. Je n’ai vu personne qui réunît tant de mouvement, de prudence et à tant d’abandon, tant de réserve; c’est qu’elle a réfléchi, c’est qu’elle a des principes; les principes dispensent des petits calculs qu’exigerait chaque circonstance. Les principes sont pour la vie morale ce que les comptes faits sont pour le ménage."

• Et l’Empereur, à Sainte-Hélène, en disait :

"C’était une maîtresse-femme. Elle avait de l’esprit, une activité prodigieuse et connaissait les affaires de son cabinet aussi bien qu’eût pu le faire le plus habile diplomate. Elle correspondait directement avec ses ministres, leur résistait souvent et parfois me forçait à me mêler aux discussions."

●●●18 MARS 1815 : NEY RETROUVE NAPOLÉON

Le 1er mars 1815, l’Empereur débarque à Golfe Juan. Peu de temps après, à Paris, Ney, qui n’en avait pas été informé, apprend la nouvelle du débarquement. Il est aussitôt reçu par Louis XVIII qui lui demande d’ "arrêter les progrès de Bonaparte et le mettre à la raison". Ney promet lors au roi de ramener Napoléon à Paris "dans une cage de fer".

Le 10 mars, Ney est à Besançon, il y retrouve les généraux de Bourmont, royaliste, et Lecourbe, antibonapartiste et républicain. Le 11, il apprend tour à tour le ralliement à l’Empereur de La Bédoyère, la capitulation de Grenoble, et celle de Lyon. Dans la nuit du 11 au 12 mars, Ney est à Lons-le-Saunier, et y concentre ses troupes. Il constate son sous-équipement: manque de cartouches, de canons et même de soldats, mais se dit en mesure de marcher sur Lyon aussitôt qu’il saura d'une manière précise la direction que prendra Bonaparte.

Le 13 mars, Ney se retrouve, toujours sans ordres précis, et sans nouveau matériel, ni renforts humains. Les canons qu’il attendait ? À Chalon-sur-Saône, les habitants les ont jeté à la rivière. Il apprend aussi que Autun, puis Dijon sont avec Napoléon.

Dans la nuit du 13 au 14 mars, Ney reçoit une lettre du général Bertrand. Il y est écrit que, sur le parcours de l’Empereur, tous, soldats et citoyens, se rallient à lui. On lui rappelle son rôle dans la Campagne de Russie, et sa conduite exemplaire à la Moskowa,.Cette lettre précise bien que, si Ney s’oppose à Napoléon, il serait seul responsable du sang répandu et de la guerre civile. Ney sait bien qu’il est probablement le tout dernier rempart contre l’Empereur, mais que ses troupes ne feront pas le coup de feu contre celles de Napoléon.

Le 14 mars 1815, il convoque ses deux subordonnés, Bourmont et Lecourbe. Il leur annonce qu’il rassemblera les troupes pour leur lire cette proclamation: “Soldats ! La cause des Bourbons est à jamais perdue. La dynastie légitime, que la nation française a adoptée, va remonter sur le trône. C’est à l’Empereur Napoléon, notre souverain, qu’il appartient de régner sur notre beau pays…” Au soir de ce 14 mars, Lecourbe et Bourmont quittent la ville, et Bourmont, le 16 mars, est à Paris pour annoncer la défection de Ney.

Le 18 mars1815, à Auxerre, Ney rencontre, à huis clos, Napoléon. Sur cette rencontre, les témoignages divergent. Il semblerait que les deux hommes aient fortement haussé le ton. Certains prétendent aussi que Napoléon aurait fortement tancé son maréchal pour sa défection de 1814. Mais aussi que Napoléon aurait dit à Ney: "Vous n'avez pas besoin d'excuses. Votre excuse, comme la mienne, est dans les événements, qui ont été plus forts que les hommes".

●●● 11 MARS 1811 : CAMPAGNE D'ESPAGNE - MORT À BADAJOZ DU CHIEN MOUSTACHE

Le chien Moustache, un barbet, à la mine spirituelle, et au regard intelligent serait né dans une ferme en Normandie, vraisemblablement, en septembre 1799, est adopté en 1800 par des grenadiers de la 40e demi-brigade en garnison à Falaise. Ce sont eux qui lui donnent le nom de Moustache, l’entraînent à rapporter des objets éloignés, à se tenir debout, à monter la garde, et même à faire un semblant de salut militaire en portant la patte à son oreille.

• Lisons des extraits de “Histoire du brave Moustache”, par Jacques Collin de Plancy

### Moustache en Italie

Le régiment qu'il avait suivi était campé au-dessous d'Alexandrie. Un détachement d'Autrichiens, caché dans la vallée de Belbo, et que l'on croyait plus éloigné, s'avança de nuit pour surprendre les grenadiers qui avaient adopté Moustache; et peut-être, sans ce chien vigilant, eût-il réussi dans son projet. Mais le fidèle Moustache faisait alors sa ronde autour du camp, le nez au vent et l'oreille en l'air. Il crut entendre les pas des voleurs: il sentit l'odeur des corps autrichiens, à laquelle il n'était point accoutumé. Il courut alors, en poussant des cris d'alarme, avertir ses amis; les sentinelles avancées s'aperçurent qu'elles avaient l'ennemi sur les reins; le camp s'éveilla; tout le monde fut debout en un instant; et l'ennemi, se voyant sur-pris, se hâta de battre en retraite.

Quand le jour fut venu, on déclara que Moustache avait bien mérité de la patrie […]. Le colonel le fit inscrire sur le cadre du régiment. On ordonna que Moustache recevrait tous les jours la portion de grenadier; et Moustache fut le plus heureux des chiens. On le tondit; on lui mit au cou un collier qui portait le nom de son régiment; et le perruquier de la troupe fut chargé de le peigner et de le coiffer une fois par semaine […].

Il n'était pas encore guéri [d’un coup de baïonnette autrichienne dans l'épaule], lorsqu'on livra la grande bataille de Marengo. Quoiqu'un peu boiteux, il ne voulut pas perdre une si belle journée. Il marcha, toujours attaché à son drapeau qu'il savait reconnaître, et à ses camarades qu'il n'avait pas encore quittés; et comme ce fifre du grand Frédéric, qui souffla dans son instrument tant que dura la mêlée, Moustache ne cessa d'aboyer contre l'ennemi. La vue des baïonnettes l'empêchait seule d'avancer sur les Autrichiens; mais son bonheur lui amena enfin l'occasion de combattre.

Un Autrichien avait un dogue, qui osa paraitre devant les rangs français. L'apercevoir, s'élancer, le saisir à la gorge et combattre, tout cela ne fut pour Moustache qu'un mouvement à la française. L'acharnement était grand de part et d'autre. Le dogue, gras et vigoureux comme un Allemand, se battait avec ardeur. Le barbet, qui voulait soutenir le nom français, poussait le courage jusqu'à la témérité. Une balle vint terminer l'affaire. Le dogue fut tué, Moustache eut l'oreille droite emportée jusqu'à la racine. Il en fut un peu étourdi, mais il ne s'en effraya point; et voyant que l'armée française, victorieuse selon son usage, se reposait enfin sur la moisson de lauriers qu'elle venait de recueillir, il regagna le camp avec orgueil, semblant se dire en lui-même: " Quand la postérité parlera de Moustache, elle dira: Ce chien aussi combattit à la bataille de Marengo ?”

### Moustache à Austerlitz

Quelque temps avant la bataille d'Austerlitz, un espion autrichien pénétra parmi les Français, dont il parlait si bien la langue, que personne ne le soupçonna. Sans doute, il serait allé rendre compte à ses maitres de ses observations, s'il n'eût fait la rencontre de Moustache. Le fidèle animal, qui se montrait toujours ami de tout Français, n'eut pas plus tôt senti l'étranger qu'il lui sauta aux jambes, en poussant des cris formidables. Ce mouvement divertit d'abord; il fit réfléchir ensuite; on connaissait la sagacité de Moustachu; on arrêta l'étranger, que l'on reconnut pour un espion, et le brave chien eut ce jour-là double pitance.

On livra la bataille d'Austerlitz; Moustache suivit son drapeau et les cuirassiers qui l'avaient adopté. Dans le fort de la mêlée, il aperçut le porte-étendard de son régiment aux prises avec un détachement d'ennemis. Il vola à son secours, aboya, encouragea son maitre de tous ses moyens, fit tout ce qu'il put pour effrayer la bande autrichienne. Ses efforts furent inutiles. Le porte-étendard fut percé de mille blessures; et lorsqu'il se sentit tomber, il s'enveloppa dans son drapeau; en même temps, il entendit pousser des cris de victoire; il s'écria qu'il mourait content, et son âme généreuse s'envola au séjour des héros. Trois Autrichiens avaient mordu la poussière sous les coups du porte-étendard. Mais il en restait cinq ou six autres, qui voulurent s'emparer du drapeau. Moustache s'était jeté sur le corps de son camarade, il s'était mis en devoir de défendre sa bannière; et il allait être percé de coups de baïonnettes, quand la fortune des combats vint à son secours: une décharge de mitraille balaya l'ennemi.

Moustache y perdit une patte; il ne s'en occupa point. Comme il se voyait libre, il prit dans ses dents le drapeau français et s'efforça de l'arracher à son maitre. Mais en mourant, le porte-étendard avait si vivement embrassé le bâton, qu'il fut impossible de le lui enlever. Moustache cependant y employait toutes ses forces. Il finit par détacher les lambeaux sanglants de la bannière; il retourna au camp, boitant, épuisé, chargé de ce fardeau glorieux; et il excita de nouveau l'admiration générale.

Sa belle action méritait des honneurs: on lui en rendit. On lui ôta le collier qu'il portait; et le général Lannes ordonna qu'on lui mît au cou un ruban rouge avec une petite médaille de cuivre, chargée de cette inscription sur la première face: Il perdit une jambe à la bataille d'Austerlitz, et sauva le drapeau de son régiment. Ces mots se lisaient sur le revers: Moustache, chien français, qu'il soit partout respecté et chéri comme un brave. Cependant il fallut faire l'amputation de la jambe cassée. Moustache souffrit sans se plaindre, et boita avec fierté. Comme il était facile de le reconnaître partout, à son collier et à sa médaille, on ordonna que, dans quelque régiment qu'il se présentât, il recevrait tous les jours sa portion de soldat; et il continua de suivre l'armée. […]

### Moustache en Espagne

A la bataille de la Sierra-Morena, Moustache ramena au camp le cheval d'un dragon qui venait d'être tué. On assure qu'il fit plusieurs fois le même trait d'intelligence. Un colonel, ayant grande envie de posséder un chien aussi admirable, le prit secrètement, le mit à l'attache, et fit tout ce qu'il put pour s'en faire aimer. Moustache, qui, depuis plusieurs années, était devenu fier, que sa ration mettait à même de ne jamais mendier son diner, qui avait l'habitude de marcher libre, ne conçut que de l'horreur pour celui qui l'avait enchaîné. Après dix-sept jours d'esclavage, il trouva une fenêtre ouverte, s'échappa, et s'attacha aux canonniers.

Il fit avec eux ses dernières campagnes. Il fut tué d'un boulet de canon, à la prise de Badajos, le 11 mars 1811, à l'âge de douze ans. On l'enterra sur le champ de bataille, avec sa médaille et son ruban. Une pierre lui servit de mausolée: on y grava ces mots: Ici repose le brave Moustache.

Ce monument a été détruit depuis par les Espagnols; et les os du chien brûlés par l'inquisition.

Peut être une image de 3 personnes et texte qui dit ’11 mars 1811 Campagne d'Espagne le chien Moustache meurtà Badajoz Cercle Napoléon Président d'Honneur: Prince Joachim Murat’

●●● 11, 12 et 13 MARS 1815 : LES "CENT-JOURS" - NAPOLÉON À LYON

• Lisons des extraits de “Napoléon à Lyon”, par Honoré Vieu

Peu à peu la population s'était mise à regretter l'ancien ordre de choses et à désirer son retour, pendant que les vrais amis de la royauté tombaient dans le découragement; il ne fallait donc qu'une étincelle pour rallumer le feu mal éteint; et il n'était douteux pour personne que la ville ne se déclarât pour l'Empereur Napoléon, s'il venait réclamer son appui. Elle se rappelait qu'elle lui devait son rétablissement et l'agrandissement de son commerce, tandis qu'elle n'avait reçu que des promesses de la restauration, promesses qui ne s'étaient pas encore réalisées; et de contre elle en avait reçu un outrage, puis qu'on l'avait frappée dans ceux qu'elle aimait à voir à la tête de son administration municipale […].

La garnison de Lyon se composait du treizième régiment de dragons et du vingt-quatrième régiment de ligne; le vingtième de la même arme était arrivé la veille de Monlbrison: ces trois régiments furent réunis le 9 au matin sur la place Bellecour.

Peut être une image de 1 personne, affiche et texte

Les princes s'y rendirent et passèrent dans les rangs; un morne silence les accueillit et le cri de vive le Roi ! poussé par quelques officiers ne trouva pas d'écho. Le comte d'Artois ne pouvait comprendre une pareille défection, il voulut tenter une nouvelle épreuve le lendemain matin […].

Au point du jour, le vendredi 10, les Princes accompagnés du maréchal duc de Tarente [MacDonald], arrivé la veille, du comte de Damas et des généraux Albert, Digeon et Montmorency, se rendirent près des troupes, réunies de nouveau sur la place Bellecour. Le comte d'Artois les harangua les larmes aux yeux et les conjura de rester fidèles à leur devoir; on ne répondit rien; il espéra être plus heureux en leur parlant isolément.

S'adressant à un vieux grenadier, il lui demanda s'ils avaient quelque chose à reprocher, s'ils n’étaient pas bien vêtus, bien nourris, et si là solde n'était pas exactement payée; le grenadier hochait la tête en signe d'assentiment. Vous n'étiez pas de la sorte avec Bonaparte, ajouta le comte d'Artois par forme de conclusion, il y avait de l'arriéré, on vous devait.

Et qu'est-ce que cela fait, répondit le grenadier, rompant alors le silence qu'il avait gardé jusque là, s'il nous plaisait de lui faire crédit !

Se portant ensuite devant le treizième dragon, le Prince dit à un vieux brigadier, décoré de trois chevrons: « Allons, camarade, crie donc vive le Roi ! — Non Monsieur, lui répondit-il, aucun soldat ne combattra contre son père, je ne puis répondre qu'en criant vive l’Empereur ! Ce cri prononcé d'une voix forte fut entendu, et tout aussitôt mille voix le répétèrent. L'épreuve était décisive, il n'y avait plus rien à faire […].

On savait que l'Empereur approchait; le duc de Tarente espérait cependant encore contenir les troupes: à deux heures, il conduisit deux bataillons sur les ponts du Rhône et leur fit prendre position derrière les barricades; mais à quatre heures des hussards du quatrième régiment parurent sur le pont de la Guillotière; ils avaient le sabre au fourreau et portaient des proclamations qu'ils distribuaient à la foule; ils marchèrent droit aux barricades en criant; vive l’Empereur ! Tout aussitôt les troupes du maréchal répètent les mêmes cris, et bientôt les poutres, les arbres, les pieux qui barraient le passage, sont arrachés, jetés au Rhône, et les deux corps fraternisèrent.

Les hussards continuèrent leur marche jusqu'à la place de Bellecour, où les troupes étaient restées depuis le matin; accueillis en amis, ils avaient peine à répondre aux nombreuses questions qui leur étaient adressées. Pendant ce temps le maréchal et les généraux qui l'accompagnaient fuyaient par le faubourg de Vaise; les hussards voulaient les poursuivre; on les retint, et ils se bornèrent à arrêter trois voitures de suite.

A cinq heures, un roulement se fait entendre, et les troupes défilent par le pont de la Guillotière pour se porter au devant de l'Empereur et former la haie. Bientôt arrivèrent les premiers corps venant de Grenoble, qui défilèrent devant elles, et vinrent prendre leur logement dans la ville.

Enfin à sept heures, Napoléon parut à cheval à l'entrée de la Guillotière, escorté de quelques soldats d'élite et des généraux et officiers qui s'étaient portés au-devant de lui; mais la foule du peuple accourue pour le voir, l'eût bientôt séparé de sa suite, et c'est pour ainsi dire seul au milieu de cette population empressée qu'il parcourut le trajet qu'il avait à faire pour parvenir à l'Archevêché, où il logea et où il fut bientôt rejoint par ses généraux et ses officiers […].

L'Empereur s'était levé de très-bonne heure suivant sa coutume; il se livra d'abord au travail, et l'on comprend que dans un pareil moment, il y avait beaucoup à faire. Lyon n'avait plus de Préfet, Napoléon nomma pour remplacer M. de Chabrol qui était parti le comte Fourrier qu'il avait amené avec lui de Grenoble. Les troupes avaient été convoquées sur la place Bellecour, c'était déjà une armée, car on y comptait environ quinze mille hommes.

Napoléon s'y rendit pour les passer en revue; il parcourut plusieurs fois les rangs, adressa la parole à beaucoup de soldats et se fit présenter les officiers. Cette revue fut extrêmement brillante: on n'en avait jamais vu à Lyon d'aussi considérable et qui comprît tant de troupes de diverses armes; aussi le nombre des spectateurs, bien que le temps fut pluvieux, était immense et ils joignaient leurs vivais à ceux des soldats enthousiasmés. Aussitôt après la revue, une grande partie des troupes se mit en marche pour Paris, sous le commandement du lieutenant général Brayer […].

L'Empereur avait décidé qu'il resterait à Lyon jusqu'au lundi 13. Ce repos était nécessaire pour lui-même et il permettait aux troupes dirigées sur Paris de prendre un peu l'avance. La journée du dimanche 12 fut donc entièrement consacrée au travail et à quelques audiences particulières; l'Empereur ne sortit pas, mais plusieurs fois il fut obligé de paraître sur la terrasse de l'Archevêché pour se montrer au peuple, qui réclamait sa présence à grands cris.

Le 13, une députation de jeunes Lyonnais fut admise près de l'Empereur; elle venait lui offrir une aigle d'or pour la garde impériale; sur le socle était gravé: Les Lyonnais à la garde impériale. Mars 1815. Admis auprès de l'Empereur, l'un de ces jeunes gens portant la parole, dit: "Sire, d'un mouvement spontané, les Lyonnais viennent offrir aux braves qui composent votre garde, ce guidon de l'honneur et de la victoire; daignez l'agréer comme un tribut de notre admiration et de notre reconnaissance." —"Je le reçois avec plaisir, au nom de la garde, répondit l'Empereur; nous allons à Paris, ce sera celui que nous porterons et nous nous rappellerons toujours que nous le tenons de nos braves habitants de Lyon, la deuxième ville de l'Empire." […]

Ce jour-là 13, parurent, ou du moins furent rendus huit décrets: l'un rétablissait l'ordre judiciaire comme il était; un second réformait tous les officiers nommés; un autre abolissait la cocarde blanche, les ordres de St-Michel, du St-Esprit, de St-Louis et du Lys, et rétablissait la cocarde et le drapeau tricolores; d'autres décrets supprimaient les corps étrangers, la maison militaire du roi, abolissaient, sauf réserve, la noblesse, et mettaient le séquestre sur les biens des Bourbons; enfin un dernier décret portait dissolution de la Chambre des Pairs et de la Chambre des députés, et convoquait les collèges électoraux à Paris, en assemblée extraordinaire du Champ de mai, afin de prendre les mesures convenables pour corriger et modifier nos institutions, selon l'intérêt et la volonté de la nation, et en même temps pour assister au couronnement de l'Impératrice et de son fils.

L'heure fixée pour le départ venait de sonner, il était deux heures. L'Empereur monta en voiture et l'on se mit en marche; on savait qu'il voulait aller coucher à Mâcon, il devait donc suivre les quais pour aller traverser le faubourg de Vaise; le long du chemin la foule compacte se pressait, voulant saluer de ses souhaits l'Empereur et lui adresser des adieux qui celte fois devaient être éternels.

• Avant de partir, Napoléon avait fait imprimer et répandre une proclamation

C’est celle qui a servi de base à l’image d’aujourd’hui., et qui se termine par “Lyonnais, je vous aime !”

Jean-Jacques-Régis de Cambacérès (1753-1824)

Jean-Jacques-Régis de Cambacérès (1753-1824)

8 mars 2024, bicentenaire de son décès.

C'était un 8 mars... un 8 mars 1824, soit il y a deux cents ans, jour pour jour, que Jean-Jacques-Régis de Cambacérès, un des hommes les plus importants de la Révolution Française et de l'Empire, s'éteignait, rendant son dernier souffle dans son appartement parisien du 21, rue de l'Université à Paris.

Depuis 7 jours, après avoir reçu sa famille pour un de ses célèbres repas, et s'étant rappelé les nombreuses agapes, où, têtes couronnées, parlementaires, jurisconsultes et autres financiers se pressaient et lui avaient décerné le titre de "prince des amphitryons", il n'était plus que l'ombre de lui-même, inerte dans son lit, victime d'une crise d'apoplexie.

Celui qui avait été un des plus grands hommes d'Etat français, côtoyant tous ceux qui ont fait la Révolution et l'Empire, fermait les yeux sur un long et fructueux engagement pour la France, un long et fructueux engagement qui trouve ses racines dans notre ville de Montpellier et dont nous pouvons être fiers.

Ce montpelliérain, habile, issu d'un lignage qui avait su se ménager une place de premier choix dans la vie locale, tant à la souveraine Cour des Comptes Aides et Finances de Montpellier, qu'au consulat municipal, avait gravi avec une prudence exceptionnelle, tous les échelons du pouvoir.

L'exemple de son père, maire de la ville de Montpellier sous l'Ancien régime, l'avait certainement marqué. Dans sa jeunesse, il avait vu cette image paternelle, ruinée par des puissants, et en particulier par l'Intendant de la Province de Languedoc, auquel il s'était opposé.

Pourtant son père, qui finira sa vie comme simple juge de paix en Provence, peut apparaître comme un des plus grands édiles de Montpellier. Il s'était tout entier dévoué à notre ville, et notamment à lui donner des airs de capitale provinciale, rieuse et prospère, riche de son eau et d'une place royale du Peyrou célébrée comme une des plus belles places de France.

Ainsi, il connaissait, certainement mieux que tous ses confrères révolutionnaires la difficulté de survivre et d'être un homme d'Etat... Il aurait pu répondre comme l'avait fait Sieyès avant lui, "Pendant la Terreur, j'ai vécu", ce qui était déjà exceptionnel quand on connait combien les échafauds avaient su mettre un terme à la vie de la plupart de ses anciens collègues.

"Prudence", ce terme semble avoir été un des guides de sa vie.

Cambacérès s'éleva pourtant aux plus hautes fonctions dont il pouvait rêver pendant la Révolution Française. Député de l'Hérault, il fut même président du Conseil des Cinq Cents, membre du Comité de Salut Public, organe parlementaire mis en place par la Convention pour tenter de sauver la Nation face aux périls extérieurs.

Il n'eut alors de cesse, en tant que juriste de formation, de réformer l'Etat français, travaillant sans relâche, mais sans succès, il faut bien l'avouer, à la rédaction de trois projets de Code Civil.

La rédaction de ce Code Civil qui était bien plus favorable aux femmes que celui qui fut adopté par la suite, était devenue sa mission, mais aussi la démonstration de son utilité pour le nouveau régime.

Après le Coup d'Etat du 18 brumaire, il fut appelé à devenir, aux côtés de Bonaparte et de Lebrun, le Deuxième Consul de la République. Il apportait la caution de la Révolution et de la sagesse parlementaire. Bonaparte représentait la force, Lebrun quant à lui, n'était présent que pour rassurer la Vieille France, celle d'un Ancien régime dans lequel il avait évolué dans l'ombre de l'ancien ministre Maupéou.

C'est tout naturellement que l'Empereur par la suite souhaita s'adjoindre ses services. Il connaissait son engagement pour la France, pour la servir mais aussi son érudition juridique... Il en fit son archichancelier, fonction qui lui conférait l'administration de la France en son absence.

La confiance entre les deux hommes était extrême. Pourtant Cambacérès ne s'en servit jamais, n'en usa jamais. Alors qu'il aurait pu utiliser cette proximité pour prendre des décisions sans en conférer avec l'Empereur, il le consultait en permanence, envoya à travers l'Europe des porteurs de missives, afin d'obtenir l'assentiment impérial... Prudemment. Il savait qu'être un homme d'Etat, utile à son pays, nécessitait une grande prudence. C'est la seule clé pour durer.

En contrepartie de son engagement sans borne auprès de l'Empereur, il en retira de mirifiques revenus et de très luxueuses décorations. Il fut même érigé au titre de Duc de Parme.

Par la suite, pendant très longtemps, ce goût immodéré pour le luxe et le faste lui a été reproché. Cela a même terni son image, donnant à la postérité l'image d'un opportuniste, avide d'argent et démonstratif à l'excès de ses richesses.

Pour cela, et pour d'autres raisons, il n'eut pas bonne presse. Ses détracteurs se vengèrent de sa puissance et la Restauration à laquelle il tenta de se rattacher lui conféra cette image de girouette avant de lui imposer, en tant que régicide, l'exil en Belgique, où le flamboyant archichancelier qu'il avait été, menait une vie monacale, rythmée par les prières dans une église voisine de son domicile, dans laquelle il se rendait quotidiennement.

Ainsi Cambacérès a été oublié, récupéré souvent par quelques opportunistes, qui voulaient rattacher le souvenir de sa puissance à leur espoir de grandeur.

Aujourd'hui, en ce jour de commémoration du bicentenaire de son décès, il est temps de lui redonner sa place, celle d'un immense serviteur de l'Etat, celle d'un Grand Homme dont Montpellier peut s'enorgueillir d'avoir été le berceau.

C'est pour cela que vous êtes conviés au dévoilement d'une plaque commémorative de cet illustre enfant de Montpellier, aujourd'hui, à 10h30, sur la place Chabaneau, place sur laquelle il poussa son premier souffle, en 1753, un 18 octobre.

Alors à plus tard peut-être.

Peut être une image de 1 personne

 

9 MARS 1796: MARIAGE DE NAPOLÉON ET JOSÉPHINE

9 MARS 1796: MARIAGE DE NAPOLÉON ET JOSÉPHINE

C’est à 20h, le 9 mars 1796, au 3 rue d’Antin, dans l’annexe de la mairie du 2e arrondissement de Paris, l’Hôtel Mandragon, actuellement siège de BNP Paribas, qu’est programmé le mariage civil de Napolione Buonaparte et de Marie Josèphe Rose Tascher de La Pagerie, ex-vicomtesse de Beauharnais, veuve du Général Alexandre de Beauharnais et mère de deux enfants.

Marie Josèphe Rose, Napoléon est alors le seul à l’appeller Joséphine. Il vient d’être nommé général en chef de l’Armée d’Italie, et doit repartir quelques jours plus tard. Il ne connait sa future épouse que depuis moins de 6 mois.

À 20h, trois témoins, Paul Barras, Jean-Lambert Tallien et Étienne-Jacques-Jérôme Calmelet sont là à attendre avec Joséphine l’arrivée de ce jeune général et de son témoin, son aide de camp le capitaine Jean Lemarois, qui n’a pas encore 21 ans, et normalement ne pourrait rien signer. L’attente est bien longue, l’officier d’état-civil, Leclercq, fatigué, se retire et laisse place au commissaire du directoire Collin-Lacombe, qui, lui, n’est habilité pour célébrer un mariage.

Enfin, à 22h, dans le couloir, des bruits de bottes résonnent, c’est l’arrivée de Bonaparte, accompagné de son aide de camp. Bonaparte lance un "mariez-nous vite !” Napoléon et Joséphine se déclarent âgés de vingt-huit ans (en vérité vingt-six et trente-deux ans). Napoléon se donne comme titre “Général en chef de l’Armée de l’intérieur”, il vient (seulement) d’être nommé “Général en chef de l’Armée d’Italie”, ce qui n’est pas tout à fait pareil…

Et moins de 30 minutes après la lecture et la signature de l’acte de ce mariage civil, chacun s’en retourne chez soi. Pas de fête, ni même minime, pas de banquet, rien du tout. Napoléon raccompagne Joséphine dans l’hôtel qu’elle loue depuis 1795, rue Chantereine, qui sera, en 1797, rebaptisée en l’honneur de la victorieuse campagne d’Italie “rue de la Victoire”, et il y reste dormir pour la nuit.

On raconte que, lors de la nuit de noces, Fortuné, le chien carlin de Joséphine, n’appréciant pas de voir le nouveau marié dans le lit de sa maîtresse, aurait mordu Bonaparte au mollet...

Peut être une image de texte qui dit ’9 mars 1796 à 22h Mariage de Napoléon et Joséphine Cercle Napoléon Président d'Honneur: Prince Joachim Murat’

9 MARS 1814 : CAMPAGNE DE FRANCE - BATAILLE DE LAON, PREMIER JOUR

Après la bataille de Craone (7 mars), l'armée française, trente mille hommes, marche sur Laon. Marmont, avec le sixième corps d'infanterie, la division du duc de Padoue, et le premier corps de cavalerie, par Berry-au-Bac, et le reste de l'armée, avec Napoléon, par la route de Soissons, pendant que Blücher concentre ses troupes autour de Laon.

Le 8 mars, l’avant-garde de Napoléon, avec Ney, repousse au canon l'arrière-garde prussienne jusqu’à l’entrée du défilé d’Etouvelle, limité de part et d’autre par d’infranchissables marais, puis bivouaque près d’Urcel, alors que Napoléon et la vieille garde s’établissent à Chavignon.

Des paysans locaux viennent dans la soirée indiquer les chemins pour contourner le défilé d’Etouvelle. Napoléon charge dans la nuit le chef d’escadron Gourgaud d’emprunter ces voies avec deux bataillons de chasseurs à pied et deux escadrons de chasseurs à cheval de la vieille garde, et demande à Ney d’attaquer ce défilé de front. Onze heures du soir, Gourgaud se met en marche par ces mauvais chemins dans l’obscurité la plus totale. Il prend du retard. Mais Ney réussit à passer en force, et débouche dans Etouvelle où les russes, surpris dans leur sommeil, vont avoir de nombreux tués et prisonniers.

À Chivy, Gourgaud fait sa jonction avec Ney. Le jour n’est pas encore levé que Belliard les rejoint, et chasse les derniers fuyards. Les Français sont maintenant devant Laon. Cette ville se situe au sommet d'une butte de 200 mètres de haut, escarpée et solitaire, forteresse naturelle entourée de murailles. La cavalerie, aussitôt accueillie par un feu nourri est contrainte de se positionner hors de portée et attend le jour.

Les premiers rayons du soleil montrent une armée ennemie en ordre de bataille. Quatre-vingt-dix mille hommes et une nombreuse artillerie sur les collines avoisinantes à leur droite, la montagne de Laon au centre, et les hauteurs d’Athies. sur leur gauche. Quelques villages sont facilement pris, Leully, Semilly, Ardon. Marmont, par la route de Reims s’avance vers Athies et l'extrême gauche ennemie.

Aux alentours de 11h, Blücher décide de passer à l'offensive. Il reprend Semilly et Ardon. Les Français refluent en désordre, jusqu’à ce que Belliard bloque l’ennemi, reprend ces des deux villages. L’infanterie s’y installe à nouveau et résiste, jusqu’à 16h aux attaques. Napoléon comprend que ce n’est pas par une simple attaque de front qu’il prendra Laon. Marmont ne devait-il pas la favoriser par une attaque de diversion sur Athiès ? Ses messages sont-ils arrivés au duc de Raguse ? Sans aucune nouvelle du sixième corps, Napoléon, vers cinq heures, tente à nouveau une attaque frontale.

Clacy, très fortifié par l’ennemi, est pris par les divisions Charpentier, Boyer de Rebeval, Friant et Curial. La brigade Montmarie y fait deux cent cinquante prisonniers. Mais dans le même temps Bulow chasse la division Poret de Morvan, et reprend Ardon. La nuit tombe. Napoléon, sans nouvelles de Marmont, fait cesser le feu en attendant le lendemain, et retourne à Chavignon avec la vieille garde pour bivouaquer.

Dans la nuit profonde, Marmont chasse du défilé de Fécieux l’avant-garde du colonel Blücher, le fils du général, prend Athies, défendu par Yorck, mais, n’ayant aucune nouvelle de Napoléon, suspend son attaque et bivouaque. Il envoie le colonel Fabvier avec quatre cents cavaliers et deux pièces de canon, pour repérer les positions ennemies.

Blücher interprète l’attaque sur Athies comme étant l’offensive principale française, l’attaque de front sur Laon n’étant qu’une diversion. Il décide d’y envoyer les russes de Langeron et de Sacken, pour soutenir les prussiens d'Yorck, et leur ordonne de prendre l'offensive dès qu’ils sont rassemblés.

En fin de nuit, les Alliés approchent en silence les camps français qui n’opposent que peu de résistance. Ils reprennent Athies. L'ennemi perce jusqu'à la colline où campait le gros du sixième corps. Mais alors que ces soldats commencent à s’organiser, le corps du général Kleist les attaque sur leurs arrières.

C’est la panique dans les rangs français qui, infanterie, cavalerie, artillerie, fuient en débandade jusqu'à Fécieux. Le colonel Fabvier, entend le canon et accourt former l’arrière-garde. Sa résistance est telle que l’ennemi, pensant être au devant de très grandes forces, arrête son attaque. Fabvier rallie autour de lui les fuyards, alors que Marmont vient s'établir aux environs de Fismes, derrière la Vesle. Il a eu peu de tués et de blessés, mais perdu plus de deux mille cinq cents prisonniers, quarante canons et cent trente et un caissons.

Blücher, qui est persuadé qu’après ce revers, les Français ne chercheraient plus à attaquer frontalement Laon, ordonne au cinquante mille hommes de Langeron, Yorck, Kleist et Sacken, de marcher pour couper toute retraite sur Reims, par la route de Berry-au-Bac, et ne conserve à Laon que quarante mille hommes.

Il est trois heures du matin, Napoléon apprend la déroute de Marmont. Il comprend que pour cela, Blücher a dû nécessairement dégarnir ses troupes de Laon. L’Empereur dispose de dix-huit mille hommes, contre, avantageusement postés sur une montagne inexpugnable quarante mille ennemis…

Peut être une image de texte qui dit ’9 mars 1814 Campagne de France Bataille de Laon Cercle Napoléon Président d'Honneur Prince Joachim Murat’

8 MARS 1799 : CAMPAGNE D'ÉGYPTE - DESAIX ET BELLIARD AUX COMBATS DE COPTOS ET DE BENOUTH

8 MARS 1799 : CAMPAGNE D'ÉGYPTE - DESAIX ET BELLIARD AUX COMBATS DE COPTOS ET DE BENOUTH

• lisons un extrait des "Éphémérides militaires depuis 1792 jusqu'en 1815"

Le général Desaix, commandant les troupes françaises dans la Haute-Egypte, instruit que Mourad-Bey et tous les chefs Mamlouks, sortant encore une fois du désert, après avoir réuni des corps nombreux d'Arabes, de Nubiens et fellahs, se préparaient à marcher sur Syout, se hâta de les y prévenir et dirigea diverses colonnes pour empêcher la jonction des corps ennemis.

Dans cette nouvelle expédition, le général français s'était fait suivre par une flottille sur le Nil, portant des vivres et des munitions; mais contrariée par les vents elle fut obligée de s'arrêter à la hauteur de Benouth. Le scherif Hassan, que la marche de Desaix empêchait de joindre Mourad-Bey, ayant appris que la flottille française était livrée à ses propres forces, se hâta de se porter sur Benouth avec un corps de trois à quatre mille hommes.

Les Arabes se précipitent dans le Nil et s'emparent successivement de tous les bâtimens de transport; ils dirigent alors tous leurs efforts contre la djerme l'Italie, qui protégeait le convoi. Celle-ci, commandée par le capitaine Morandi, fait un feu terrible de mitraille qui longtems éloigne les assaillants; mais le vent l'ayant jetée sur un banc de sable, l'ennemi l'aborde de tous les côtés, et le brave Morandi, pour ne pas tomber vivant aux mains de ces barbares, met lui-même le feu à la sainte-barbe, et fait sauter l'Italie et tous les Arabes qui déjà couvraient le pont.

Le général Belliard, informé des dangers que courait la flottille, s'était dirigé en toute hâte sur Benouth avec la 2e légère, forte seulement de sept à huit cents hommes; mais il était trop tard. Le 8 mars, il trouve près de Coptos l'avant-garde d'Hassan, qui venait à sa rencontre. Il forme aussitôt sa petite troupe en carré, flanqué seulement d'une pièce de trois et de quinze cavaliers, et soutient le premier choc de l'ennemi. Assaillant à son tour, il attaque les Arabes, les met en fuite, et franchissant plusieurs fossés et canaux dont ils défendent le passage, il arrive devant Benouth, où était réuni le gros des troupes d'Hassan.

L'attaque et la résistance furent également opiniâtres. Les Arabes, qui avaient débarqué l'artillerie et les munitions de la flottille, faisaient un feu terrible de mitraille auquel répondait faiblement la pièce de trois du général Belliard. Cependant l'habileté des manœuvres et l'intrépidité des assaillants l'emportèrent sur le nombre. L'ennemi, déposté de ses positions, chercha un refuge dans le village, se barricada dans les maisons et la -mosquée, et renouvela un feu très- meurtrier sur les Français.

Désespérant de forcer dans cette retraite d'aussi furieux ennemis, le général Belliard fit successivement mettre le feu à tous les bâtiments dans lesquels ils se défendaient, et bientôt le village ne fut plus qu'un monceau de cendres et de cadavres. Une seule maison était encore debout, et quoique réduits à la dernière extrémité, les Arabes, le fusil à la main, le sabre ou le poignard dans les dents, et entièrement nus, disputaient avec acharnement chaque pièce de ce bâtiment, dont la cour était déjà au pouvoir du chef de brigade Eppler, à la tête des carabiniers de la 21e. On voyait au milieu d'eux le scheriff Hassan, les animant de la voix et de son exemple. Poussés enfin dans les derniers réduits, ils y furent tous massacrés, et le scheriff fut trouvé parmi les morts.

Douze cents Arabes périrent dans cette action; le nombre des blessés fut presque aussi considérable. Les vainqueurs n'eurent que trente-trois tués et une centaine de blessés. Toutefois cette perte fut bien compensée par la destruction de ce corps ennemi, la mort de son redoutable chef, et par le recouvrement de l'artillerie et de tous les bâtiments de la flottille, à l'exception de la djerme l'Italie. Cette journée, qui fit le plus grand honneur au général Belliard et à l'intrépide 21e légère, doit être placée au rang des plus glorieux événements de l'expédition d’Egypte.

Peut être une image de texte qui dit ’8 mars 1799 Haute- Égypte Combats de Coptos et et de Benouth Cercle Napoléon Président d'Honneur Prince Joachim Murat’

 

8 MARS 1814 : LES ANGLAIS ÉCRASÉS À BERG-OP-ZOOM

• lisons ce texte extrait des "Éphémérides militaires depuis 1792 jusqu'en 1815"

Dans le même temps que les troupes suédoises, russes et allemandes envahissent la Hollande et la Belgique par les frontières de l'est, une expédition anglaise, sous les ordres du général Graham, débarque sur les côtes de ce pays et s'unit aux alliés. Le général anglais ayant échoué dans ses tentatives sur Anvers, porte ses troupes devant Berg-opZoom, dont il fait le blocus.

Cette place, où commande le général français Bizanet, n'a au commencement de mars pour garnison que deux mille sept cents hommes, quoique le développement de ses défenses n'en exige pas moins de douze mille.

Le général Graham, qui s'était ménagé des intelligences parmi les habitants, veut voir si, par un coup de main, il ne pourrait pas se rendre maître de cette place. La faiblesse de la garnison, la facilité de traverser à sec les fossés que la gelée a rendus praticables, lui donnent l'espoir de ne point trop trouver d'obstacles dans son entreprise. Croyant faire une galanterie au prince d'Orange en lui envoyant les clefs d'une des premières forteresses de la Hollande le jour de sa fête, il fixe son attaque au 8 mars dans la nuit.

Entre neuf et dix heures du soir, six mille hommes divisés en quatre colonnes, dirigés par des habitants, se portent sur Berg-opZoom: tandis que deux d'entre elles attaquent par l'extérieur aux portes du port et de Steenbergen, deux autres escaladent les remparts et pénètrent dans l'intérieur de la ville. Les Français, surpris, se rallient pourtant, disputent le terrain de rue en rue, et conservent un tiers de la place, malgré tous les efforts de l'ennemi.

Prenant à leur tour l'offensive, ils repoussent les Anglais qui, perdant tout-à-coup leur première énergie, fuient en désordre et sont faits prisonniers ou précipités du haut des remparts. La colonne qui, à la faveur de la marée basse s'était introduite dans le port, n'étant pas soutenue par les troupes qui venaient d'être chassées de l'intérieur de la ville, est contrainte de mettre bas les armes, ne pouvant plus rétrograder, la marée remontant déjà. Enfin, la colonne qui avait attaqué la porte de Steenbergen et forcé les ouvrages avancés, livrée à elle-même, se trouve pressée contre la porte de la ville par le feu des Français, qui la prennent dans tous les sens. Ne pouvant ni reculer, ni avancer, sans espoir d'être secourue, et pour éviter une mort certaine; elle implore la clémence des assiégés, les priant instamment d'ouvrir la porte et de la recevoir comme prisonnière; ce qui est exécuté: de sorte qu'après, un combat qui dura jusqu'au lendemain neuf heures du matin, les assiégés font capituler les assiégeants !

De six mille Anglais qui avaient attaqué Berg-op-Zoom, quinze cents seulement parviennent à s'échapper. Deux généraux et deux mille quatre cents hommes sont tués; un général, deux mille soixante-dix-sept prisonniers et quatre drapeaux restent au pouvoir des vainqueurs, qui ont que cinq cent soixante hommes hors de combat.

La résistance de la garnison de Berg-op-Zoom est tellement héroïque, et son résultat si extraordinaire que nous croyons devoir faire connaître le nom des officiers qui ont secondé le plus, par leur habileté, les dispositions du général Bizanet et l'intrépidité des troupes. Ce sont le colonel du génie Legrand, le commandant d'artillerie Denis, officier d'un rare mérite, le chef de bataillon du génie Leclerc, le major Hugot de Neuville, les chefs de bataillon d'infanterie Baron, Lespez, Lombart, les adjudants de place Maupin, Dourin, les capitaines Béer, Codery, Jacquain, Delaume et Gageot du génie, le capitaine de marine Evrard, le lieutenant de gendarmerie Rouet et le garde du génie Moreau.

Peut être une image de 2 personnes et texte qui dit ’8 mars 1814 les Anglais écrasés à Berg-op-Zoom Berg Zoom Cercle Napoléon Président d'Honneur: Prince Joachim Murat’

5 MARS 1814 : CAMPAGNE DE FRANCE - LE COMBAT DE BERRY-AU-BAC

5 MARS 1814 : CAMPAGNE DE FRANCE - LE COMBAT DE BERRY-AU-BAC

Ce 5 mars 1814 à Berry-au-Bac, dans le département de l'Aisne, s’opposent la cavalerie française commandée par Napoléon et les cosaques du général Ferdinand von Wintzingerode. Au cours de l'affrontement, les Français s'emparent du pont sur l'Aisne et refoulent les cavaliers russes, ce qui permet au reste des troupes de Napoléon de franchir la rivière

Soissons s’est rendue sans grand combat le 3 mars, le général Moreau, qui commande la place, a capitulé sans une ferme résistance et trop tôt. Blücher, qui était sur le point d’être encerclé par les troupes françaises, parvient à échapper à l’anéantissement. L’espoir de battre rapidement et définitivement cette armée de Silésie s’évanouit, et elle se renforce même des hommes de Bülow, Winzingerode et Woronzov.

L’Empereur décide de le poursuivre et ordonne à Nansouty de s'emparer du pont de Berry-au-Bac, pour permettre de franchir l'Aisne. Ce dernier part avec sa cavalerie, comprenant les lanciers polonais de la Garde impériale du général Pac et la division du général Exelmans. Le 5 mars, ils arrivent vers deux heures de l’après-midi devant la ville défendue par 2 000 cosaques russes appartenant au corps d'armée du général Wintzingerode, positionnés en avant du pont.

Le chef d’escadron Skarzinski, qui commande l’avant-garde des lanciers polonais, se précipite sur le pont défendu par une division de cavalerie ennemie et deux pièces de canon et l’enlève. Les lanciers polonais, encouragés par la présence de Napoléon sur le champ de bataille, chargent les Russes qui sont rapidement enfoncés et doivent repasser le pont en désordre. L'impétuosité de l'attaque est telle que l'ennemi ne peut opposer qu'une faible résistance.

Peut être une image de texte qui dit ’5 mars 1814- Campagne de France Les Polonais à Berry-au-Bac Cercle Napoléon Président 'Honneur: Prince Joachim Murat’

Le pont est libre. Derrière les lancers polonais, les escadrons de Nansouty et d'Exelmans, puis les cavaliers du général Pac le traversent au galop et se lancent à la poursuite des cosaques. Au cours de la mêlée, le chef d'escadron Ambroise Skarzynski, du 3e Éclaireur, arrache aux mains d’un cosaque une lance. Abandonnant son sabre, il se sert de cette lance pour mettre hors de combat plusieurs adversaires, assommant de coups de travers l’un, en perçant un autre, imité en cela par d'autres officiers et sous-officiers polonais. La perte de l’ennemi est si grande que la route et ses côtés sont couverts de lances abandonnées que le général Dautancourt fait ramasser pour armer ceux de ses lanciers qui ont eu les leurs cassées, brisées ou perdues.

Les fuyards russes tentent de se reformer au-delà de La Ville-aux-Bois, mais ils sont dispersés à nouveau par la cavalerie de la Garde et rejetés sur Corbeny. Au cours de l'engagement, la troupe de Nansouty capture 200 cosaques ainsi que deux pièces d'artillerie et les bagages ennemis. Parmi les prisonniers, le prince russe Gagarine, qui, à tue-tête, ne cesse de décliner son titre.

l’Empereur écrit de Berry-au-Bac, le 5 mars au soir, à son ministre de la Guerre, le général Clarke: Monsieur le duc de Feltre, je suis arrivé ici à 4 heures après midi. Le corps de Witzingerod [sic] voulait nous empêcher de passer; mais quand il a vu l’infanterie, il n’a plus laissé que des Cosaques et des Baskirs. Nous avons passé au pas de charge le beau pont que nous avons ici sur l’Aisne. Nous avons pris quelques hommes et 2 pièces de canon. Nous avons pris le Prince Gagarin [sic] qui commandait leur arrière garde. Voilà un petit remède au grand mal que m’a fait la trahison du commandant de Soissons. Sur ce, je prie Dieu qu’il vous ait en Sa Saint [sic] garde.

Pour son action lors du combat, le chef d'escadron Skarzynski est fait baron de l'Empire. L’écu des armes qui lui seront accordées portera un pont dans un de ses quartiers. La prise du pont et de la ville de Berry-au-Bac permet aux corps des maréchaux Ney, Mortier et Marmont de traverser l'Aisne pour continuer à suivre l'armée prussienne en retraite. Blücher, informé de ce mouvement, installe ses hommes sur le plateau de Craonne pour stopper les Français, qui le rejoignent le 7 mars et le contraignent une nouvelle fois au repli après une dure bataille.

Un témoin, Brunon, raconte:”L'impétuosité de l'attaque fut telle que l'ennemi ne put faire qu'une faible résistance… Chargé par le brave Skarzynski, du 3e Éclaireur, et voyant toute la division prête à fondre sur lui, il fut mis dans une déroute si complète que je ne crois pas qu'on n'ait jamais vu de cavalerie fuir avec un abandon aussi désespéré; pendant plus de deux lieues que dura la poursuite, aucun de ces cavaliers russes ne fit mine de regarder derrière lui…”

7 MARS 1815 : LES "CENT-JOURS" - LAFFREY - LA PRAIRIE DE LA RENCONTRE

7 MARS 1815 : LES "CENT-JOURS" - LAFFREY - LA PRAIRIE DE LA RENCONTRE

• Lisons tout d’abord ce qu’en écrit Stendhal:

Le 6, l’empereur coucha à Gap et le général Cambronne avec son avant-garde de quarante hommes à La Mure. Là, l’avant-garde de la garnison de Grenoble, forte de six cents hommes, refusa les pourparlers avec le général Cambronne. Le colonel Jermanowski, étant à l’extrême avant-garde, trouva un défilé près de Vizille, occupé par une troupe qui avait un drapeau blanc. Il voulut parler, mais un officier s’avançant vers lui, lui cria: "Retirez-vous, je ne puis avoir aucune communication avec vous. Gardez votre distance, ou mes hommes vont faire feu." Le colonel chercha à le gagner en lui disant qu’il aurait à parler à l’empereur Napoléon et non à lui; mais l’officier continua à se servir de paroles menaçantes et Jermanowski alla faire part à l’empereur de ce mauvais succès.

Napoléon lui dit en souriant: "S’il en est ainsi, il faut que j’essaye ce que je pourrai faire moi-même." Il mit pied à terre et ordonna à environ cinquante de ses grenadiers de le suivre avec leurs armes renversées; il marcha tranquillement jusqu’au défilé où il trouva un bataillon du 5e de ligne, une compagnie de sapeurs et une de mineurs, en tout 7 à 800 hommes. L’officier commandant [le capitaine Randon] continuait à vociférer, souvent contre l’empereur lui-même, disant: "C’est un imposteur, ce n’est pas lui." De temps en temps cet officier réprimandait ses troupes, leur ordonnant de faire feu. Les soldats étaient silencieux et immobiles. Il sembla un instant lorsqu’ils virent approcher la troupe de Napoléon, qu’ils voulaient coucher en joue leurs fusils.

Napoléon fit arrêter ses grenadiers, s’avança tranquillement et tout seul jusqu’au bataillon. Quand il fut très près de la ligne, il s’arrêta court, jeta sur eux un regard tranquille et, ouvrant sa redingote, s’écria: "C’est moi, reconnaissez-moi. S’il y a parmi vous un soldat qui veuille tuer son empereur, qu’il fasse feu, voilà le moment."

Ils furent vaincus en un instant et au milieu des cris redoublés de Vive l’empereur, se précipitèrent dans les bras des soldats de la garde. Un peu avant que les soldats du cinquième s’ébranlassent, Napoléon s’approcha d’un grenadier qui avait l’arme présentée et, le prenant par une de ses moustaches, lui dit: "Et toi, vieille moustache, n’as-tu pas été avec nous à Marengo ?"

Tel est le récit simple d’une de ces actions qui, dans tous les siècles et dans tous les pays, montrent aux nations les hommes pour lesquels elles doivent marcher et agir.

Les compagnons de Napoléon regardèrent le mouvement de cette troupe de sept cents hommes comme décisif. Ils virent dans cet événement que l’empereur ne s’était pas trompé et que l’armée était toujours à lui. Les nouvelles troupes prirent la cocarde tricolore, se rangèrent autour des aigles de l’armée de l’île d’Elbe et entrèrent avec elles à Vizille, au milieu des cris de joie des habitants. Ce bourg a toujours marqué par son patriotisme. On peut dire que c’est là qu’a commencé la Révolution française et la liberté du monde. C’est au château de Vizille qu’eut lieu la première assemblée des États du Dauphiné.

En avançant vers Grenoble, le colonel Jermanowski fut joint par un officier qui arrivait ventre à terre et qui lui dit: "Je vous salue de la part du colonel Charles Labédoyère."

Ce jeune colonel parut bientôt à la tête de la plus grande partie de son régiment, le 7e de ligne formé des débris du 112e régiment et de plusieurs autres. À quatre heures après-midi, le colonel s’était échappé de Grenoble; à une certaine distance il tira une aigle de sa poche, la plaça au bout d’une perche et l’embrassa devant son régiment qui cria aussitôt: Vive l’empereur ! Il donna alors un coup de couteau dans un tambour qui était plein de cocardes tricolores qu’il distribua à son régiment.

Mais le général Marchand qui resta fidèle au roi réussit à faire rentrer dans Grenoble une partie du régiment. La garnison de cette ville avait été augmentée du 11e régiment de ligne et d’une partie du 7e envoyés de Chambéry. Cette garnison était composée en outre de 2.000 hommes du 3e régiment de pionniers, deux bataillons du 5e de ligne et du 4e d’artillerie, précisément le même régiment dans lequel Napoléon avait obtenu une compagnie, vingt-cinq ans auparavant.

Grenoble est une mauvaise place que l’on ne conserve que pour approvisionner d’artillerie la chaîne des Alpes, au milieu desquelles elle se trouve placée. Elle n’a qu’un mur terrassé du côté de la plaine, haut d’une vingtaine de pieds avec un petit ruisseau qui coule au devant. C’est avec cette fortification ridicule que, quelques mois après, les habitants livrés à eux-mêmes ont tué douze cents hommes à l’armée piémontaise toute composée de soldats de Napoléon.

• Gabriel Faure, en 1915, raconte, dans la Revue des Deux Mondes, comment Stendhal a enquêté sur cette rencontre:

Stendhal, avec cette curiosité d’esprit qui le rend si moderne, agit comme un reporter d’aujourd’hui et reconstitue sur place la scène historique. Par l’intermédiaire d’un de ses amis, il convoque des gens du pays et va avec eux sur le terrain même où, vingt ans plus tôt, ils avaient été témoins de la rencontre. Il n’a rien oublié pour délier la langue des paysans et les mettre en opposition, quand il veut éclaircir ou préciser un détail. "J’avais fait apporter trois ou quatre bouteilles de vin, et nous nous sommes assis plusieurs fois; j’avais soin d’être altéré quand je voyais quelque point douteux."

Lorsqu’il arrive à l’endroit où se décida, suivant sa propre expression, le sort de l’entreprise la plus romanesque et la plus belle des temps modernes, il est vivement troublé. "J’avouerai mon enfantillage, mon cœur battait avec violence, j’étais fort ému; mais les trois paysans n’ont pu deviner mon émotion." Ces derniers marquent, avec des rameaux de saule fichés en terre, la position des troupes de Grenoble. Et comme il indique de même la place où Napoléon se tenait dans le pré, à une portée de fusil, l’un des paysans lui reproche de représenter aussi mesquinement l’empereur.

"Ses yeux brillaient; et il est allé couper sur un vieux saule une grande branche de plus de douze pieds de hauteur qu’il a plantée au lieu précis où Napoléon s’arrêta. Un jour, il y aura dans cet endroit une statue pédestre de quinze ou vingt pieds de proportion, précisément avec l’habillement que Napoléon portait ce jour-là."

• Napoléon rencontre La Bédoyère

"Le voilà! ...Feu! ..." crie en vain le capitaine Randon aux soldats qui, livides, tremblants comme paralysés, voient s'approcher Napoléon. Il s'arrête en face d'eux: "Soldats! Je suis votre Empereur, reconnaissez-moi!" Puis, faisant quelques pas encore, il entrouvre sa redingote: "S'il est parmi vous un soldat qui veuille tuer son Empereur, me voilà!”... Un immense cri: "Vive l'Empereur!" explose. Et rangs confondus, shakos au bout des fusils, cocardes blanches jetées sur la route, les soldats acclament leur idole. Pendant ce temps le capitaine Randon réussit à s'enfuir à cheval. Tandis que Delessart, qui avait rangé ses troupes en bataille au débouché du défilé de Laffrey, remet en pleurant son épée à l'Empereur qui la lui rend et l’embrasse.

A ce moment à Grenoble, le général Marchand ayant fait distribuer les cartouches aux 7e et 11e de ligne, leur a fait prendre position sur les remparts. La Bédoyère a placé le 7e entre la porte de Bonne et celle de Graille. Puis il déjeune chez le général Marchand qui l'a invité. On ignore ce que fut leur conversation au cours de ce repas. Il est très probable que La Bédoyère ne dissimula pas ses sentiments. Il est probable aussi que Marchand, tout en avouant avoir au fond les mêmes opinions, dit ne pouvoir se rallier à l'Empereur qu'après le départ du Roi, le déliant ainsi de son serment. C'est d'ailleurs ce que Mme Marchand, demeurée à Grenoble après le départ de son mari dira le lendemain à Napoléon à qui elle viendra se présenter.

Après le déjeuner, La Bédoyère est revenu à son régiment, près de la porte de Bonne, vers trois heures de l'après-midi. Tout le long de son chemin il n'a cessé de voir mille indices de l'état des esprits dans la population et il connaît celui de la troupe. En somme, l'opinion est pratiquement unanime, mais aucun des chefs n'a le courage de faire le premier pas - tout en aspirant à se rallier lorsque tout aura été décidé par d'autres.

Ce manque de courage moral est odieux à La Bédoyère. Il réunit ses officiers, leur redit que le 7e de ligne est appelé à marcher pour s'opposer au retour de l’Empereur... "Marchons-nous contre lui ou marchons-nous pour lui?" "Pour lui! ...Pour lui! ...Pour lui!..." répondent les officiers avec un enthousiasme difficile à décrire. Devant ses compagnies, le jeune colonel tire alors son épée et s'écrie: "A moi, soldats du 7e ! ...A moi, mes braves camarades ! ... Je vais vous montrer notre chemin !...En avant ! Qui m'aime me suive ! …"

Aux cris de: "Vive l'Empereur!" les unités se rassemblent, se mettent en route et, suivant leur colonel, franchissent la porte de Bonne, dépassent le faubourg de Graille. Au-delà de celui-ci, La Bédoyère fait faire halte, former le régiment en carré, présenter les armes. De son porte-manteau il retire la vieille aigle du 7e de ligne, que le régiment avait pieusement conservée, et la fait fixer au bout d'une branche de saule, pendant que retentit un cri vibrant: "Vive l'Empereur!", puis derrière le vieil emblème des victoires passées, le 7e reprend sa marche vers Napoléon.

Vite informé de la défection de La Bédoyère, le général Marchand accourt à la porte de Bonne. Le colonel Roussille, du 5e de ligne, s'y trouve et lui rend compte des évènements. Il ajoute en parlant de La Bédoyère: "Ce coquin-là avait séduit mes grenadiers; si je n'avais pas été ici, il les aurait emmenés !" Marchand demande où se trouve le général Devilliers: celui-ci s'est lancé à cheval, à la poursuite de La Bédoyère sur la route de Vizille. Il rejoint d'abord une arrière-garde d'une soixantaine d'hommes et réussit à leur faire faire demi-tour, en disant d'ailleurs qu'il va donner contre-ordre au régiment tout entier. Puis reprenant le galop, il rejoint La Bédoyère.

S'adressant à lui, tantôt en camarade, tantôt en chef, tantôt en sage conseiller, il essaie de toutes les manières de le faire revenir sur sa décision. Il va jusqu'à lui représenter tout le mal qu'il va causer aux siens, si dévoués à la Royauté. La Bédoyère lui réplique que les liens familiaux les plus chers passent après l'intérêt national. Inébranlable, il demeure sourd aux injonctions comme aux supplications de son général. Aux mots "Patrie et Roi" il répond "Patrie et Empereur". Devilliers lui demande à parler aux soldats. La Bédoyère acquiesce. Mais la harangue du général, ses prières, ses menaces, rien n'y fait. Bientôt même sa voix est couverte par un roulement continu de "Vive l’Empereur !"

Désespéré, Devilliers reprend la route de Grenoble. Dans la place l'exaltation est à son comble. Comme il l'écrira plus tard (dans une lettre à "MM. de la Commission d'Epuration des Officiers de l'Armée") "les cris de "Vive l'Empereur!" se faisaient entendre dans l'obscurité parmi les soldats et le bas peuple.”

Pendant ce temps, à la tête du 7e de ligne, La Bédoyère a repris sa marche vers l'Empereur, auquel il a envoyé l'adjudant major du régiment pour lui annoncer son arrivée. La rencontre a lieu avant Vizille, entre Travernolles et Brié. Après avoir arrêté et rangé son régiment sur le bord de la route, il s'avance vers Napoléon. Celui-ci voit s'approcher le jeune et ardent colonel. L'an passé, aux jours douloureux de Fontainebleau, La Bédoyère s'est mis spontanément à sa disposition, demeurant auprès de lui jusqu'au dernier moment, à l'heure de tous les reniements. Et maintenant c'est encore La Bédoyère, qui le premier, se rallie à lui avec son régiment, en un geste plein de foi, de patriotisme, de désintéressement.

L'Empereur l'embrasse. Puis, La Bédoyère n'ayant pas encore de cocarde tricolore, Napoléon d'un geste souverain, ôte celle qui orne son légendaire "petit chapeau" et la lui remet. Il s'avance ensuite vers le 7e de ligne qui présente les armes pendant que la musique joue la Marseillaise. Il se fait apporter l'aigle qui, au bout de son bâton de saule, brille aux derniers feux du soleil couchant, il la porte à ses lèvres. De quelques mots il remercie et félicite La Bédoyère et son régiment. Puis, les plaçant à l'avant-garde il fait reprendre la marche sur Grenoble. Le soir tombe. De chaque côté de la colonne, des masses de paysans armés de fourches et de vieux fusils, l'accompagnent avec enthousiasme. Ils ont allumé des torches lorsque l'on arrive aux portes de la ville, avant sept heures du soir. Cette foule, qui escorte les soldats, se masse sur les glacis en hurlant des "Vive l’Empereur !" auxquels répondent ceux des "défenseurs" de la place postés sur les remparts... et ceux du peuple dans les rues qui y aboutissent.

• Napoléon devant Grenoble

Cependant les portes ne s'ouvrent pas, malgré une sommation faite par l'officier d'ordonnance Ruhl et deux lanciers. Irrité de voir cette situation se prolonger, l'Empereur lui-même vient jusqu'au guichet de la porte de Bonne, accompagné de La Bédoyère. Là, s'adressant au colonel Roussille, du 5e de ligne, Napoléon lui ordonne d'ouvrir la porte. Le colonel répondant qu'il ne peut recevoir d'ordres que du général Marchand, "Je le destitue", dit l'Empereur. A quoi le colonel réplique: "Je connais mon devoir, je n'obéirai qu'au général". Enflammé de colère, La Bédoyère crie aux soldats de Roussille: "Arrachez-lui ses épaulettes ! ..." Dans le tumulte les soldats essaient en vain de défoncer la porte à coups de crosse, mais sans vouloir s'en prendre à leurs officiers. Pendant ce temps, le général Marchand réussit à s'enfuir de Grenoble avec quelques chefs de corps qui sont parvenus à rassembler, à grand'peine, deux ou trois cents soldats de toutes armes. Il est temps !

Roussille se décide enfin à faire ouvrir la porte, lorsque les charrons des faubourgs voisins ont déjà entamé sa démolition sous les coups cadencés d'un énorme madrier. C'est porté en triomphe par une foule délirante d'enthousiasme que Napoléon pénètre dans la ville. Devant l'hôtel des Trois Dauphins, tenu par Labarre, l'un de ses anciens guides de l'armée d'Italie, où il est descendu, un groupe d'ouvriers vient lui apporter, sous son balcon, la porte de Bonne: "A défaut des clés de la bonne ville de Grenoble, nous t'en amenons la porte ! …"

A Grenoble, où il demeure trente-six heures, recevant les édiles, la magistrature, le clergé, l'Académie, l'Empereur eut deux conversations prolongées avec La Bédoyère et le questionna longuement sur l'opinion de la France. Il savait trouver en lui un jugement pur de tout calcul et libre de toute attache avec des partis politiques. La Bédoyère s'exprima avec une franchise qui quelquefois étonnait Napoléon. -

"Sire, vous ne pouvez plus régner en France que par des idées libérales." -"Croyez-vous donc que je les redoute ?" avait répondu l'Empereur. "Après une Révolution comme celle qui avait eu lieu en France, où toutes les passions ont été en mouvement et tous les intérêts froissés, il fallait une main ferme pour gouverner les Français. Moi seul je puis, sans crainte, leur donner la liberté qu'ils sont en droit d'attendre. Les espérances qu'ils mettront en moi ne seront pas trompées." La Bédoyère lui ayant dit que les Français allaient tout faire pour lui, mais qu'ils désiraient la paix, Napoléon reprit: "Quant à la paix je ferai tout pour l'obtenir. Les traités humiliants n'ont pas été faits pour moi, mais je saurai m'en contenter, si cela convient à la France."

Combien les paroles de l'Empereur durent aller au coeur de La Bédoyère qui vient de se rallier à lui avec la conviction de servir la cause de la liberté, de la patrie et de la paix ! Il allait pouvoir se consacrer aux siens, le cas de guerre excepté. Mais qui donc se déciderait à faire la guerre si Napoléon s'y refusait ?

Napoléon était entré dans la ville, à la lueur des torches, au milieu d’un enthousiasme délirant. Il vint coucher rue Montorge, à l’hôtel des Trois-Dauphins, que tenait alors un nommé Labarre, ancien soldat de l’armée d’Egypte. Pour la première fois, depuis de longs mois, il dut s’endormir, sinon tranquille, du moins heureux. Cette journée du 7 mars 1815 était l’une des plus enivrantes qu’il eût jamais vécues.

Il le déclara souvent à Sainte-Hélène: "Jusqu’à Grenoble, j’étais aventurier; à Grenoble, j’étais prince."

Peut être une image de 9 personnes et texte qui dit ’7 mars 1815-Laffry la Prairie de la Rencontre Cercle Napoléon Président d'Honneur: Prince Joachim Murat’

 

7 MARS 1814 : CAMPAGNE DE FRANCE - VICTOIRE DE CRAONNE

7 MARS 1814 : CAMPAGNE DE FRANCE - VICTOIRE DE CRAONNE

Le 7 mars, vers 10 heures du matin, les artilleurs français, par malheur inexpérimentés et donc maladroits, se mettent en action. Malgré les efforts du général Antoine Drouot, qui leur montre lui-même la manœuvre, les résultats de la canonnade sont maigres. Ney trouve donc en face de lui, au moment de l'assaut, des troupes peu éprouvées, d'autant que son impétuosité le fait attaquer prématurément. Il ne peut prendre pied sur le plateau et se fixe à mi-pente, dans une position critique. Des renforts lui sont nécessaires.

Napoléon les lui envoie au fur et à mesure de leur arrivée de Berry-au-Bac. En fin de matinée, les Russes cèdent enfin du terrain devant la jeune garde, conduite par le maréchal Victor, qui surgit avec de l'artillerie du défilé qui mène de l'abbaye de Vauclerc à la ferme d'Hurtebise. Ils évacuent celle-ci après l'avoir incendiée et se retirent sur leur première ligne.

Les Français sont sur le plateau. Ils y subissent un violent bombardement, au cours duquel le duc de Bellune est blessé, mais tiennent le choc malgré leur inexpérience et des pertes considérables. Un millier de dragons, emmenés par le général Grouchy, vient bientôt les renforcer. De son côté, Nansouty parvient à s'établir sur le plateau et entame le flanc droit des Russes qu'il repousse jusqu'à Paissy.

Mais le centre des alliés est toujours intact et ils trouvent l'énergie de contre-attaquer. La cavalerie Française est refoulée, Grouchy blessé et une panique s'empare des Marie-Louise de Ney qui ont subi des pertes énormes. Ils dévalent les ravins dont ils sont si difficilement sortis quelques heures plus tôt. L'envoi de renforts, à nouveau nécessaire, a un effet salutaire. Les fantassins du maréchal Victor, commandés par le général Henri-François-Marie Charpentier, parviennent à Ailles en longeant la lisière du bois de Vauclerc, au pied du plateau, pour échapper au feu ennemi.

Le premier régiment des Éclaireurs de la Garde impériale, nouveau corps de cavalerie sous les ordres du général Louis Marie Levesque de La Ferrière puis du colonel Claude Testot-Ferry, est envoyé appuyer l'infanterie dans le ravin de Vauclerc. Sous leur impulsion conjointe, les troupes débandées se reprennent et entament (pour la sixième fois depuis la veille) l'escalade des pentes escarpées du plateau. Bientôt l'artillerie de la Garde, composée, elle, de soldats expérimentés, puis celle de la réserve, arrivent sur le champ de bataille par le défilé d'Hurtebise.

Leur feu est dirigé par Napoléon en personne, depuis la butte du Buisson-Coquin. Il est environ quatorze heures. Blücher constate au même moment que la manœuvre de cavalerie qu'il a confiée à Wintzingerode, et qui aurait pu, en cas de succès, porter un coup fatal à Napoléon, a échoué. Le corps allié n'a pu atteindre à temps le flanc de l'armée impériale du fait de l'état des chemins et de sa méconnaissance des lieux. Une partie de ses troupes s'est même totalement égarée.

Blücher ordonne donc à Woronzoff de se replier vers Laon. Bien qu'en très mauvaise posture (sa gauche pressée par Ney, sa droite débordée par les dragons, son centre cédant peu à peu sous les coups de l'infanterie et de l'artillerie françaises), le général russe oblige son chef à réitérer son ordre avant d'obtempérer. Il mène ensuite une retraite méthodique vers Cerny et, malgré le constant harcèlement et la poursuite longue de quinze kilomètres qu'il subit jusqu'à l'embranchement de l'Ange Gardien, parvient à éviter qu'elle ne se transforme en déroute, limitant ainsi ses pertes. Il prend ensuite la direction de Laon par le défilé d'Urcel et Chavignon.

De ce fait, la victoire n'est en rien indiscutable car elle a coûté si cher, huit-mille hommes, qu'elle constitue en réalité un succès stratégique pour Blücher, même s'il n'a pas atteint tous ses buts. L'armée française en sort plus affaiblie encore et incapable désormais d'obtenir un succès décisif qui devient pourtant de plus en plus indispensable. Pour les Alliés rassemblés autour de Laon, la route de Paris est en effet toujours ouverte. Une nouvelle bataille reste nécessaire pour la leur barrer.

• Le monument de Craonne

Craonne… Le chemin des Dames… ces noms résonnent dans toutes nos mémoires. Sur le site de la ferme d’Hurtebise, d’où Napoléon dirigeait le feu sur l’ennemi, un monument pour deux guerres, celle de 1814, la Campagne de France, et celle de 1914-1918.

Sur la plaque au pied de l’édifice, ces mots: “A la vaillance de la jeunesse française, Marie-Louise de 1814 et Bleus de 1914, unis dans une même gloire”.

A l’origine, avait été construit en mars 1914, pour son centenaire, un monument commémorant la bataille de Craonne de 1814. Ce monument, un obélisque surmonté d'une étoile, fut vite réduit à un tas de ruines, dès septembre 1914, par la violence des combats qui se déroulèrent sur ce site.

Le choix du site de la ferme d’Hurtebise pour un nouveau monument doit certainement davantage à l’existence de ce premier édifice qu’aux combats de 1917. Réalisée par Real del Sarte et inaugurée le 27 octobre 1927, elle associe un soldat de la Garde impériale coiffé d’un shako et un poilu de 14-18 dans un même élan vers le drapeau.

Un seul monument pour une double commémoration, celle de la bataille de Craonne en 1814 et celle des combats de la Grande Guerre. Les épisodes dramatiques de 1917 semblent intégrés dans une vision plus générale de la guerre marquée par le patriotisme des soldats français. À vocation nationale et consensuelle, ce monument reconstruit devient alors une référence, un symbole de la résolution et de la volonté des Français de défendre leur patrie contre les envahisseurs, quelle que soit l’époque…

Peut être une image de monument et texte qui dit ’mars Craonne 1OTA Cercle Napoléon Président d'Honneur Prince Joachim Murat’

 

1er MARS 1814 : CAMPAGNE DE FRANCE

MARMONT AU COMBAT DE LIZY

• Ce combat de la Campagne de France est décrit dans "Victoires, conquêtes, désastres, revers et guerres civiles des Français"

Le 28 février 1814, en attendant des secours demandés, les maréchaux Mortier et Marmont se portèrent sur la rive droite de l'Ourcq, point qu’ils croyaient menacé; le général Vincent, commandant l'avant-garde du duc de Trévise [Mortier], rencontra les coureurs du général Kleist, et les repoussa jusqu'à Estrepilly, où ils passèrent la Théronanne; derrière cette rivière, l'avant-garde prussienne occupait la position de Gué-à-Trême.

Le général Christiani fit aussitôt canonner ce village par son artillerie; pendant qu’il le faisait attaquer de front par sa première brigade et tourner sur la gauche par le régiment des flanqueurs-chasseurs, Gué-à-Trême fut aussitôt enlevé et les quatre bataillons qui l’occupaient vinrent se rallier derrière la cavalerie ennemie qui défendait le défilé de Neufchelles. Le général Kleist fit rompre le pont de Lizy et s'établit à Fulaines, gardant les routes de la Ferté-Milon et de Nanteuil.

Le duc de Raguse [Marmont] vint par la route de la Ferté-Milon prendre position à May-en-Muliem; ni la nuit ni une forte pluie de neige fondue n'arrêtèrent le combat; on se battit avec acharnement jusqu’au lendemain matin. Les Français n’eurent pas au-delà de quatre-vingts hommes hors de combat, et ils prirent ou tuèrent plus de quatre cents ennemis.

À la suite de cet engagement, le feld-maréchal Blücher voulut attaquer les maréchaux dans leur position, avant l'arrivée de l’Empereur. Il donna ordre, à cet effet, au général Korf et au corps de Kleist de passer la Marne, et de replier les ponts. Il prescrivit également à ce dernier corps et à celui de Kapzewitch d'attaquer le lendemain, 1er mars, la gauche des Français, et de tomber sur leurs arrières.

Mais ils devaient passer l'Ourcq à Crouy, et le pont se trouvant rompu, il leur fallait remonter jusqu'à Fulaines; le général Sacken put seul engager devant Lizy, une fusillade avec le duc de Trévise. Il était six heures du soir, Blücher voyant que son projet d’aborder les Maréchaux, et de les prendre à dos, avait échoué pendant cette attaque de front, prescrivit au général Kapzewitch de jeter un pont sur l'Ourcq et de le franchir à Gesvres; les Russes passèrent la rivière malgré la cavalerie Doumerc, mais ils furent bientôt culbutés sur l’autre rive par le duc de Raguse dont l’infanterie leur fit près de trois cents prisonniers.

Pendant la nuit, le général Poret de Morvan arriva avec les renforts partis de la capitale. Cette nouvelle, et l'arrivée de l'Empereur, décidèrent Blücher à la retraite; en deux jours la chance avait bien changé, Paris était - provisoirement - sauvé…

Peut être une image de 1 personne et texte qui dit ’ler mars 1814 Campagne de France Marmont au combat de Lizy Cercle Napoléon Président d'Honneur Prince Joachim Murat’

4 MARS 1815 : LES “CENT-JOURS” - NAPOLÉON À MALIJAY

4 MARS 1815 : LES “CENT-JOURS” - NAPOLÉON À MALIJAY

• Lisons ce qu’en écrit le docteur Revillet:

De retour de l'île d'Elbe, Napoléon arriva, le 4 mars 1815 au soir, à Malijay, petit village situé à mi-chemin entre Digne et Sisteron. Il descendit chez le maire, qui était allé à sa rencontre, et envoya un officier au château pour voir s'il pourrait y être logé, lui et sa suite. L'officier visita les appartements, et dit au domestique d'allumer du feu dans celui qu'il désigna, et d'éclairer l'escalier. Quelques minutes après, Napoléon arrivait, suivi de plusieurs officiers et de quelques valets de pied. Il monta précipitamment l'escalier et fit demander le maître de la maison.

Le propriétaire du château, le marquis de Malijay, était absent, à la chasse depuis le matin. Sa famille avait été fort éprouvée par la tourmente révolutionnaire. Son père, receveur général des finances de Provence, avait été incarcéré au Fort Saint-Jean de Marseille. Pour éviter le sort réservé aux fermiers généraux, c'est-à-dire le tribunal révolutionnaire et la guillotine, il fit durer autant que possible la reddition de ses comptes. Pendant qu'il était en prison à Marseille, il était inscrit sur la liste des émigrés dans le département des Basses-Alpes, où il possédait une terre, qui fut sur-le-champ séquestrée. Au 9 thermidor, il fut remis en liberté; mais ce ne fut qu'après l’avènement de Bonaparte au consulat, qu'il obtint sa radiation de la liste des émigrés et la restitution d'une partie de ses terres.

Depuis ces événements, douze ans s'étaient écoulés; le vieux marquis de Malijay, l’ancien receveur général des finances, était mort, Napoléon avait été renversé par la coalition des souverains de toute l'Europe, et les Bourbons, rois légitimes, semblaient réinstallés solidement et définitivement sur le trône de leurs aïeux. Aussi la surprise du marquis de Malijay fut extrême et n'eut d'égale que sa désagréable déconvenue, en apprenant, à son retour de la chasse, qu’il avait pour hôte l'usurpateur, l'Ogre de Corse, le général Buopaparte, pour l'appeler par son nom.

Mais c'était un galant homme, connaissant et pratiquant les devoirs de l’hospitalité; il n'avait pas oublié non plus que le premier Consul avait rouvert les portes des églises aux prêtres et celles de la France aux émigrés, parmi lesquels son père avait été inscrit. Il fit bonne figure à cette mauvaise fortune, sut dissimuler son déplaisir et se tirer d'affaire galamment, en parfait gentilhomme. Après avoir traversé un poste de grenadiers, installé à la porte du château, il fut conduit par un officier auprès de l'empereur.

Celui-ci, vêtu de la légendaire redingote grise, était debout près d'une table. Il toisa le nouvel arrivant, et lui posa, suivant son habitude, brusquement, toute une série de questions précipitées, à brûle-pourpoint.

- Vous êtes le propriétaire de ce château ?

- Parfaitement.

- Que faisait votre père ?

- Il était receveur général des finances de Provence.

- Comme tel, il a dû être poursuivi ?

- Il a été incarcéré, puis remis en liberté. Inscrit sur la liste des émigrés, il obtint sa radiation après votre avènement au consulat.

- Ah ! très bien ! dit l'Empereur; sa figure jusqu'alors sévère se détendit subitement.

Napoléon lui demanda encore depuis quand son père était mort, s'il avait des frères, etc., etc., puis il termina l'entretien en disant: “Excusez-moi, j'ai envahi votre château, mais il n'y avait pas d’autre local convenable pour me loger. Je vais vous donner bien de la besogne.”

En effet, le château était rempli d'officiers et de valets de pied; pour les coucher, les chambres et les corridors furent encombrés de couvertures et de matelas, et les bas offices de foin pour les valets. Les grenadiers de la garde bivouaquèrent dans la cour du château et sur la place du village. C'était une nuit de mars, froide et étoilée. Pour se réchauffer, ils allumèrent de grands feux, et tout ce qui restait de la provision de bois du marquis y passa.

Après le souper, qui fut très frugal, l'empereur se mit au travail avec le général Bertrand. Il allait et venait, conversait et dictait, en marchant. Vers 11 heures du soir, il se coucha, et le général Bertrand lui fit la lecture à haute voix. Au bout d'une demi-heure, tout bruit cessa, l'empereur dormait. Le général Bertrand passa le reste de la nuit, assis dans un fauteuil, accoudé à la table de nuit, sur laquelle était posée une paire de pistolets.

Le lendemain matin, avant l'aube, l'empereur descendait dans la cour, s'excusait encore du dérangement qu'il avait causé, et faisait remettre quatre-vingts francs d'étrennes aux serviteurs du château et une pièce de cinq francs à chacune des deux femmes du pays, qui.étaient venues prêter leur aide. “Ce n'est pas beaucoup, dit l’aide de camp de service, mais pour le moment nous ne sommes pas riches.”

Le soleil commençait adorer les sommets des Alpes lorsque l'empereur monta à cheval. Il se mit à la tête de sa petite troupe, et s'engagea dans cette voie mystérieuse et tragique, qui, après les réceptions triomphales de Grenoble, Lyon et Paris, devait le conduire à Waterloo.

Au moment de franchir la porte du château, l'officier, qui avait rempli le rôle de fourrier, fit faire demi-tour à son cheval, vint serrer la main au marquis et lui dit: “si, par hasard, vous veniez à Paris, et que, par hasard, nous y arrivions, venez me voir; j'aurai un véritable plaisir à pouvoir vous être utile; vous pouvez vous adresser au général Deschamps.” Cette phrase caractérise bien l'état d'esprit de ces braves gens, leur foi aveugle en leur empereur; ils le suivaient partout dans les entreprises les plus extraordinaires, et il faut convenir, qu'à ce moment, la conquête de la France par un bataillon de 400 hommes pouvait paraître une aventure assez risquée.

Après le départ de Napoléon, on trouva dans sa chambre un papier, chiffonné et roulé en boulette, et, sur la table de nuit, un livre encore entr'ouvert. Le papier chiffonné était le brouillon de la fameuse et éloquente proclamation adressée aux soldats et qui fut imprimée le lendemain à Gap: “Venez vous ranger sous le drapeau de votre chef... La victoire marchera au pas de charge; l'aigle avec les couleurs nationales volera de clocher en clocher jusqu'aux tours de Notre-Dame…" Le livre resté entrouvert était un volume des Contes de La Fontaine !

Ainsi, à une période des plus critiques et décisives de son existence, au moment où la résistance d'un seul régiment, envoyé à sa rencontre, l'exposait à être jugé sommairement par une cour martiale et à être fusillé comme un simple rebelle pris les armes à la main, l'empereur avait assez de volonté et de pouvoir sur lui-même pour éloigner les pensées angoissantes et les inquiétudes. Par la lecture de son poète favori, il donnait à son cerveau le calme réparateur nécessaire au travail du lendemain; il s'endormait en rêvant aux galantes et plaisantes aventures de la fiancée du roi de Garbe ou de la belle ingénue, qui trouvait plaisir à mettre “le diable en enfer”.

Les reliques napoléoniennes, abandonnées au château de Malijay, eurent le sort suivant: le très précieux brouillon de la proclamation “Aux soldats” fut donné par le marquis de Malijay à la comtesse de Castellane, sa cousine, dans la famille de laquelle il a été conservé. Quant au volume des Contes de La Fontaine, qui eut le privilège d'endormir l'empereur, il a très malheureusement disparu.

• Selon d’autres sources, le témoignage est un peu différent:

Dans la nuit du 4 au 5 mars 1815, ayant remonté de Golfe Juan par la route des Alpes, Napoléon débarque sur la grande place de Malajai, devant les habitants massés le long des rues. Accueilli chaleureusement par le maire de la commune, Jean-Baptiste Hugues, il est conduit au château de Malajai pour y passer la nuit. C’est là qu’il est reçu par le châtelain, Edouard Noguier de Malijay.

C’est dans ce château qu’il attend des nouvelles de son fidèle Cambronne, parti avec quarante lanciers polonais explorer la prochaine étape de l’Empereur, Sisteron, verrou de la Provence, avec sa citadelle imprenable aux 23 canons, qui peut l’arrêter, et briser l’épopée…

Napoléon, inquiet, ne se couche pas, mais reste assis dans un fauteuil. À 2h, arrive enfin, au château, Cambronne, qui l’informe qu'il est entré sans aucun problème dans Sisteron. Les canons n’ont pas été approvisionnés en poudre. Ses lancers tiennent le fort, et le maire royaliste de Gombert et ses adjoints, de peur d’affrontements ou de mesures de rétorsion, ont décidé, un peu contraints et forcés, de venir à la rencontre de l’Empereur. Napoléon peut enfin se détendre et trouver quelques moments de sommeil. À 5h il déjeune, et à 6h il quitte le village en direction de l’Escale …

Peut être une image de 1 personne et texte qui dit ’4 mars 1815 les "Cent-Jours" Napoléon attend à Malijay des nouvelles de Cambronne II 国画團I AAAe 自 00 Fn Cercle Napoléon Président 'Honneur: Prince Joachim Murat’

1er MARS 1770 : NAISSANCE DE LOUIS-PIERRE DE MONTBRUN

1er MARS 1770 : NAISSANCE DE LOUIS-PIERRE DE MONTBRUN

Louis-Pierre de Montbrun, général de division de la cavalerie, comte de l’Empire, grand officier de la Légion d’honneur, est né le 1er mars 1770 à Florensac (Hérault), et mort le 7 septembre 1812 en Russie, à la bataille de la Moskowa. Son jeune frère, Alexandre, sera lui aussi général, et baron d’Empire.

• Premières armes sous la Révolution

Le 5 mai 1789, à l’âge de 19 ans, Louis-Pierre de Montbrun s'engage dans le régiment de chasseurs d'Alsace (qui deviendra plus tard le 1er régiment de chasseurs à cheval). Il est brigadier le 20 novembre 1791, et fait les campagnes de 1792 avec l’armée du Nord, et de 1793 avec l’armée de la Moselle. Il est promu maréchal des logis, le 11 juillet 1793, puis adjudant le 1er octobre. Son régiment passe en 1794 à l'Armée de Sambre-et-Meuse. Le 12 septembre 1794, il est élu sous-lieutenant. En 1796, aide de camp de son ancien chef d'escadron le général Richepance, puis lieutenant la même année, après avoir, le 9 aout 1796, à la bataille d'Altendorff, couvert de son corps le général Antoine Richepanse, qui, blessé au bras, allait tomber au pouvoir de l’ennemi. Capitaine au choix en 1797.

Durant la campagne de 1799, le 5 octobre, il emporte la tête de pont de Nidda, près Francfort, défendu par 2 000 Autrichiens, ce qui lui vaut une citation à l'ordre de l'Armée et la nomination de chef d'escadron par le général en chef Moreau. A Groß-Gerau, le 12 octobre 1799, il est blessé de deux coups de sabre, l’un à la face, l'autre au bras gauche. A Erbach le 16 mai 1800, il se fait remarquer au cours d'une terrible charge pour empêcher l'ennemi de franchir un étroit défilé.

• Montbrun sous le Consulat

Montbrun est versé au 5e régiment de dragons, puis repasse, sur sa demande, au 1er régiment de chasseurs à cheval. Durant la poursuite de la campagne du Danube (1800) sous les ordres de Moreau, il est cité de nouveau à l'ordre de l’Armée.

Après les combats d'Erbach (16 mai 1800), de Delmesingen (23 mai 1800) et de Kirchberg (5 juin 1800), il est nommé le 15 juin chef de brigade à titre provisoire, nomination ratifiée le 26 octobre 1800. Sous les ordres de Richepance, il se signale au siège d'Ulm, dans la nuit du 7 au 8 juillet 1800, en détruisant presque entièrement une colonne de la garnison de cette ville.

Proposition présentée aux Consuls - 7 Thermidor An VIII ( 26 juillet 1800): "Le citoyen Montbrun n'a pas cessé de commander le 1er régiment de chasseurs, a déployé un caractère et des talents rares, une bravoure extrême. Il a obtenu à la tête de ce corps plusieurs succès importants contre un ennemi toujours plus nombreux; enfin il en a toute la confiance, et elle est justement acquise".

Confirmé dans le grade de chef de brigade, le 26 octobre 1800, Montbrun entre au 8e régiment de dragons, mais il reprend, dès le 28 novembre, le commandement du 1er régiment de chasseurs, à la tête duquel, toujours sous les ordres de Richepance, il se signale de nouveau à la bataille de Hohenlinden (3 décembre 1800).

Après la paix de Lunéville, Montbrun, promu colonel, est, de 1803 à 1805, en garnison à Verdun, puis au camp de Bruges. A la rupture du traité d’Amiens, il est toujours avec le 1er régiment de chasseurs à cheval, division de cavalerie légère du général Viallanes, du IIIe corps d'armée, commandé par Davout. Membre de la Légion d’honneur le 11 décembre 1803, il reçoit la croix d’officier le 14 juin 1804.

• Première campagne d’Autriche

Murat signale sa bravoure à l'Empereur après le combat de Lambach (30 octobre 1805), où il culbute les Autrichiens.

Bulletin de la Grande Armée - 31 octobre 1805 : M. le colonel Montbrun mérite tous les éloges ! Cet officier, aussi instruit que brave, réunit toutes les conditions qui sont nécessaires à un commandant d’avant-garde. Apercevoir l’ennemi et le charger n’a été qu’une même chose pour la cavalerie... Le colonel Montbrun s’est couvert de gloire !

Un décret du 24 décembre 1805 lui confère le grade de général de brigade. Il a acquis des droits à cette faveur par sa conduite au combat de Ried, dont en grande partie il a assuré le succès, et par sa participation aux étonnants faits d'armes de la bataille d'Austerlitz: Montbrun, colonel du 1er chasseur couvrant la route de Brünn, s'empare de six pièces d'artillerie. Le 1er chasseur est cité aux 14e et 15e bulletins de la Grande Armée.

• Campagne de Prusse et de Pologne, 1806 - 1807

Employé dans le royaume de Naples en 1806, pour combattre les insurgés de Calabre, Montbrun fait d'abord partie de la division Reynier, puis de la division Espagne. Mais il n'y reste que six mois. Il est en effet rappelé, le 1er septembre, pour prendre part à la campagne de Prusse. Placé à la tête de la cavalerie du Wurtemberg du 5e Corps de Masséna, il participe à la poursuite des troupes prussiennes en pleine débandade après Iéna.

Il prend la tête de la cavalerie wurtembergeoise sous les ordres de Vandamme, en Silésie. Puis, le 3 novembre, il passe au IXe corps d'armée (Jérôme Bonaparte). Il bat, le 30 novembre, près d'Ohlau, le prince d'Anhalt-Pless, lui fait 1 800 prisonniers, et s'empare de sept pièces de canon. Il est au siège de Breslau (décembre 1806 - janvier 1807), au combat de Strehlen (23 décembre 1806).

Montbrun rejoint ensuite le Ve corps d'armée (Masséna), où il prend le commandement de la cavalerie légère. Le 11 juin 1807 il remporte, en Pologne, le combat du pont de Drewkenow, sur l'Omulew. Après la paix de Tilsit, il reste en Pologne, puis en Allemagne. Le 17 mars 1808, il reçoit une rente annuelle de 4 000 francs, le 19 mars, il est baron de l'Empire.

• Campagne d’Espagne

Le 27 septembre 1808, Montbrun est nommé commandant de la cavalerie légère du 1er corps d'armée en Espagne (Victor). Arrive un épisode qui aurait pu avoir des conséquences catastrophiques sur sa carrière: Montbrun se fiance à Mlle de Morand, fille du général baron de Morand, gouverneur de la Corse, qui sera tué à Lunebourg en 1813. Mais alors qu'il est à Bayonne, il reçoit le 17 octobre l'ordre de rejoindre au plus vite Joseph Bonaparte en Espagne.

Ne voulant pas abandonner sa fiancée seule à Bayonne, il attend pendant quatre jours l'arrivée de sa sœur, pour aider Mlle de Morand à préparer son mariage. Ainsi, il laisse le commandement à Beaumont qui part sans lui en Espagne.

Furieux d’apprendre cela, Napoléon le met aux arrêts de rigueur, arguant même "d’abandon de poste devant l’ennemi". Mais Montbrun obtient l’autorisation de se racheter.

Il commande l'avant-garde impériale lorsque, le 30 novembre 1808, les chevau-légers polonais accomplissent une charge légendaire dans le défilé de Somosierra, ouvrant à Napoléon la voie de Madrid. Selon certains, Montbrun n'aurait pas pris part à la fameuse charge. Le 13e bulletin de la Grande Armée du 2 décembre 1808 mentionne bien sa présence en tête des Polonais, comme en témoignent ses contemporains (mémoires de Lejeune, mémoires du baron de Marbot).

Mais dans son livre "Les Polonais à Somosierra", le colonel Niegolewski, qui a participé à la charge, écrit que "ce général droit et brave, dont tous les Français pleuraient la mort, aurait, sans doute aucun, lui-même rejeté les lauriers qui n'étaient pas les siens", mais il note aussi que lui était de la première charge, y perdit connaissance, et ne dut la vie sauve qu'à l'intervention d'un chasseur à cheval. Certains participants polonais font état de trois charges successives; Montbrun, aux arrêts de rigueur, ayant eu l'honneur de commander la troisième et ultime charge, ceci lui valut d'éviter le conseil de guerre.

Le 4 décembre de la même année, il se présente en parlementaire à l'une des portes de Madrid pour engager les habitants de cette ville à cesser une défense inutile. Il ne peut cacher son indignation en entendant un garçon boucher prétendre ne vouloir traiter qu'avec le maréchal Bessières. La populace l'entoure, et profère contre lui des menaces de mort; il ne doit son salut qu'à son sabre, qui lui permet de se frayer un passage au travers cette foule hostile.

• Deuxième campagne d'Autriche

Le 23 janvier 1809, Montbrun revient en France et peut se marier le 1er mars. Napoléon, oubliant l’incident de Bayonne, l’élève au grade de général de division le 9 mars, et le 29 avril commandeur de la Légion d’honneur. L’Empereur a besoin d’un cavalier de sa trempe pour participer à la nouvelle campagne qui s’annonce contre les Autrichiens.

Montbrun retrouve l’Allemagne au commandement de la 2e division de cavalerie légère du IIIe Corps, sous Bessière, puis à partir du 14 avril, sous Davout. Il a sous son commandement les brigades Jacquinot (1er et 2e chasseurs à cheval et 7e hussards) et Pajol - autre superbe cavalier - (11e et 12e chasseurs à cheval et 5e hussards).

Si l’on en croit Hippolyte d’Espinchal dans ses "Souvenirs militaires", les généraux, officiers et soldats du IIIe corps accueillent avec enthousiasme le retour du général Montbrun, au regard de la réputation dont il bénéficie: "Le lendemain, nous joignîmes, au village de Daswang, le 13e léger avec lequel nous devions opérer. Nous y trouvâmes le général de division Montbrun, arrivant d’Espagne pour prendre le commandement de la division de cavalerie légère d’avant-garde, avec, pour aides de camp, les capitaines Guinard et Calon, et pour officier d’ordonnance, le lieutenant Waldner, du 11e chasseurs, beau jeune homme d’une grande famille d’Alsace. Nous fûmes d’autant plus satisfaits d’être sous les ordres de ce brave général qu’il jouissait à juste titre dans toute l’armée de la plus brillante réputation".

Montbrun se distingue encore face aux Autrichiens à Thann (19 avril), Schierling (22 avril), Eckmühl (22 avril). Chargé de surveiller l’éventuelle arrivée de l’archiduc Jean, il est à Brück au moment des deux journées d’Essling (21 - 22 mai 1809), auxquelles, à son grand dam, il ne participe pas. Il est ensuite envoyé renforcer l’armée du vice-roi d’Italie, le prince Eugène, forte de 4 000 chevaux, avec laquelle, réunie au corps du général Lauriston, il passe, le 7 juin, la Raabnitz, non loin de Sovenhyaga, après avoir défait un corps de cavalerie hongroise.

Le 13 du même mois, veille de la bataille de Raab, marchant à l’avant-garde, il rencontre la cavalerie ennemie au village de Sazuak; entraîné par l’ardeur de ses troupes, il est un instant enveloppé, et il aurait été forcé de mettre bas les armes, s’il n’eût été secouru par le général Durutte, qui vient à son secours avec sa division. Le lendemain, chargé avec deux brigades de cavalerie légère d’appuyer le mouvement de la division Seras, il oblige la droite de l’armée autrichienne à démasquer le front de son infanterie, et par cette manœuvre, exécutée sous le feu d’une artillerie nombreuse, il arrête la cavalerie ennemie qui s’ébranlait pour paralyser l’attaque du général Seras.

Le 14 juin 1809, il est à la bataille de Raab, où il contribue largement au succès de la journée. Le 16, dans une reconnaissance sur Comorn, ses avant-postes sont brusquement attaqués par 600 cavaliers, soutenus par quelque infanterie; il se met à la tête d’un régiment rassemblé en toute hâte, fond sur les assaillants avec son impétuosité ordinaire, les culbute et les ramène, le sabre aux reins, jusque sous les murs de Comorn.

Durant les journées de Wagram (5 - 6 juillet 1809), la division de cavalerie légère de Montbrun (brigades Pajol et Jacquinot) sert à nouveau dans le IIIe corps d’armée de Davout, à la droite du dispositif français. Montbrun paie de sa personne en chargeant avec le 7e hussards (colonel Domon). Mais il perd tout de même quatre-vingts hommes tués, deux cents blessés et quatre cents chevaux, ce qui lui fait tout de même dire à Davout: "ce qui vous prouvera, Monseigneur, que cette division a servi dans cette journée".

D’Espinchal, dans ses souvenirs militaires, raconte: Peu d’instants après arriva le général Montbrun avec le 7e hussards; il venait reprendre le commandement de la division. En nous passant en revue, s’apercevant que les manteaux étaient en bandoulière: “Allons, braves hussards du 5e, dit-il, montrez à l’ennemi toute la blancheur de votre belle pelisse, et placez moi vos manteaux sur les fontes des pistolets"!

Au vu de son courage, Napoléon lui décerne le 9 juillet la Couronne de Fer. Et Montbrun termine la campagne d’Autriche à Znaim.

• Campagne d’Espagne

En 1810, Montbrun rentre à Paris pour repartir ensuite en Espagne à la tête de la division cavalerie légère de l’Armée du Portugal (3 000 hommes et chevaux) que commande André Masséna. Il commande aux brigades Lorcet, Vavrois et Ornano. Malgré une guérilla féroce et fanatique menée par les Espagnols, et les troupes anglaises, il se distingue particulièrement à Bussaco, le 27 septembre 1810, et à Fuentès-de-Onoro (5 mai 1810), où, au début de la bataille, il enfonce la première ligne anglaise et lance sa cavalerie sur le flanc de Wellington. Mais Masséna devra renoncer à la victoire.

Pour reprendre les mots de Jean-Claude Dammame, "c’est toute une masse de cavaliers qui vient s’écraser sur les carrés". A noter aussi les deux superbes charges de la brigade de François Fournier-Sarlovèze, dit "le plus mauvais sujet de l’Armée", qui sabre deux carrés britanniques.

Mais lorsque Montbrun ordonne au Général Louis Lepic de charger, celui-ci rétorque qu’il ne reçoit ses ordres que du Maréchal Bessières qui commande la Cavalerie de la Garde. Pour ses faits d’armes, Napoléon octroie à Montbrun la croix de grand officier de la Légion d’honneur.

Montbrun entreprend, en décembre 1810, malgré les observations de Suchet, de s’emparer d’Alicante. Mais à peine arrivé devant cette place, il reçoit l’ordre de rentrer en France.

Mémoires de Delagrave: "Le général Montbrun débuta par aborder avec une grande audace la ligne de cavalerie ennemie, qui s’était formée dans une petite plaine. en avant de Roso Bello; au premier choc, choc terrible, il la renversa complètement; celle-ci courut se rallier derrière une nombreuse infanterie qui occupait un bois auprès de ce village. Le général Montbrun commença alors à s'étendre par sa gauche afin de déborder et d'envelopper toute la droite ennemie. Ces mouvements s'exécutaient à la vue de l'armée avec une précision admirable et malgré les difficultés du terrain rocailleux. En moins d'une heure, la cavalerie avait déjà gagné plus d'une lieue sur la droite de l'ennemi, culbutant tout devant elle, cavalerie, infanterie et artillerie."

• Campagne de Russie

Montbrun est alors à la tête du 2e Corps de Cavalerie de "l’Armée des Vingt Nations" qui s’apprête à partir en Russie. Mais survient encore un incident qui le met aux prises avec l’Empereur au début de la campagne.

C’est Jean Tulard qui le raconte, dans sa biographie consacrée au Maréchal Murat: Ainsi, Joachim Murat avait ordonne à Montbrun de maintenir sa cavalerie sur place alors qu’il effectuait une reconnaissance des lignes russes. Mais passant ensuite en revue ses généraux, Napoléon réprimande vertement Montbrun. Or, celui-ci tente par deux fois d’expliquer à l’Empereur qu’il tenait ses ordres de Murat. Du regard, Montbrun cherche le soutien du beau-frère de Napoléon qui garde le silence. C’est alors que de rage, il empoigne son sabre et le jette en s’écriant "allez tous vous faire foutre !" Surpris par la réaction de Montbrun, Napoléon ne le condamne pas et le maintient dans son commandement.

La campagne reprend. Avec les divisions Sebastiani, Watier et Defrance, Montbrun bat d’abord les Russes à Sventsiany le 3 juillet, puis sur la Disna le 5 juillet. Il participe ensuite à la dure bataille de la Moskowa (Borodino).

C’est en effectuant une reconnaissance, le 7 septembre 1812, qu’un boulet russe tue son cheval, lui déchiquette un rein et lui cisaille une jambe. Heinrich von Roos, chirurgien allemand au sein de la Grande Armée, dans son hôpital de campagne, le voit arriver, le flanc affreusement ensanglanté et une jambe en moins. Montbrun n’émet aucune plainte et se livre aux soins des médecins. Larrey, appelé, décrit: "les reins traversés d’un côté à l’autre par ce projectile. Il y eut peu de choses à faire; la mort était certaine et peu éloignée".

Le général de division comte d’Empire Louis-Pierre de Montbrun, chevalier d’Empire, grand-croix de l'ordre du mérite militaire du Wurtemberg, chevalier de l'ordre de la Couronne de Fer, chevalier de l'ordre des Deux-Siciles, grand officier de la Légion d'honneur, commandant du 2e corps de cavalerie, meurt des suites de ses blessures dans l'après-midi en Russie, à Borodino. Il est tout juste âgé de 42 ans. Son nom est gravé sur l'arc de triomphe de l'Étoile, côté sud…

Peut être une image de 1 personne et texte qui dit ’ler mars 1770 naissance de Louis- Pierre de Montbrun Cercle Napoléon Président d'Honneur: Prince Joachim Murat’

5 MARS 1814 : CAMPAGNE DE FRANCE - LE COMBAT DE BERRY-AU-BAC

Ce 5 mars 1814 à Berry-au-Bac, dans le département de l'Aisne, s’opposent la cavalerie française commandée par Napoléon et les cosaques du général Ferdinand von Wintzingerode. Au cours de l'affrontement, les Français s'emparent du pont sur l'Aisne et refoulent les cavaliers russes, ce qui permet au reste des troupes de Napoléon de franchir la rivière

Soissons s’est rendue sans grand combat le 3 mars, le général Moreau, qui commande la place, a capitulé sans une ferme résistance et trop tôt. Blücher, qui était sur le point d’être encerclé par les troupes françaises, parvient à échapper à l’anéantissement. L’espoir de battre rapidement et définitivement cette armée de Silésie s’évanouit, et elle se renforce même des hommes de Bülow, Winzingerode et Woronzov.

L’Empereur décide de le poursuivre et ordonne à Nansouty de s'emparer du pont de Berry-au-Bac, pour permettre de franchir l'Aisne. Ce dernier part avec sa cavalerie, comprenant les lanciers polonais de la Garde impériale du général Pac et la division du général Exelmans. Le 5 mars, ils arrivent vers deux heures de l’après-midi devant la ville défendue par 2 000 cosaques russes appartenant au corps d'armée du général Wintzingerode, positionnés en avant du pont.

Le chef d’escadron Skarzinski, qui commande l’avant-garde des lanciers polonais, se précipite sur le pont défendu par une division de cavalerie ennemie et deux pièces de canon et l’enlève. Les lanciers polonais, encouragés par la présence de Napoléon sur le champ de bataille, chargent les Russes qui sont rapidement enfoncés et doivent repasser le pont en désordre. L'impétuosité de l'attaque est telle que l'ennemi ne peut opposer qu'une faible résistance.

Le pont est libre. Derrière les lancers polonais, les escadrons de Nansouty et d'Exelmans, puis les cavaliers du général Pac le traversent au galop et se lancent à la poursuite des cosaques. Au cours de la mêlée, le chef d'escadron Ambroise Skarzynski, du 3e Éclaireur, arrache aux mains d’un cosaque une lance. Abandonnant son sabre, il se sert de cette lance pour mettre hors de combat plusieurs adversaires, assommant de coups de travers l’un, en perçant un autre, imité en cela par d'autres officiers et sous-officiers polonais. La perte de l’ennemi est si grande que la route et ses côtés sont couverts de lances abandonnées que le général Dautancourt fait ramasser pour armer ceux de ses lanciers qui ont eu les leurs cassées, brisées ou perdues.

Les fuyards russes tentent de se reformer au-delà de La Ville-aux-Bois, mais ils sont dispersés à nouveau par la cavalerie de la Garde et rejetés sur Corbeny. Au cours de l'engagement, la troupe de Nansouty capture 200 cosaques ainsi que deux pièces d'artillerie et les bagages ennemis. Parmi les prisonniers, le prince russe Gagarine, qui, à tue-tête, ne cesse de décliner son titre.

l’Empereur écrit de Berry-au-Bac, le 5 mars au soir, à son ministre de la Guerre, le général Clarke: Monsieur le duc de Feltre, je suis arrivé ici à 4 heures après midi. Le corps de Witzingerod [sic] voulait nous empêcher de passer; mais quand il a vu l’infanterie, il n’a plus laissé que des Cosaques et des Baskirs. Nous avons passé au pas de charge le beau pont que nous avons ici sur l’Aisne. Nous avons pris quelques hommes et 2 pièces de canon. Nous avons pris le Prince Gagarin [sic] qui commandait leur arrière garde. Voilà un petit remède au grand mal que m’a fait la trahison du commandant de Soissons. Sur ce, je prie Dieu qu’il vous ait en Sa Saint [sic] garde.

Pour son action lors du combat, le chef d'escadron Skarzynski est fait baron de l'Empire. L’écu des armes qui lui seront accordées portera un pont dans un de ses quartiers. La prise du pont et de la ville de Berry-au-Bac permet aux corps des maréchaux Ney, Mortier et Marmont de traverser l'Aisne pour continuer à suivre l'armée prussienne en retraite. Blücher, informé de ce mouvement, installe ses hommes sur le plateau de Craonne pour stopper les Français, qui le rejoignent le 7 mars et le contraignent une nouvelle fois au repli après une dure bataille.

Un témoin, Brunon, raconte:”L'impétuosité de l'attaque fut telle que l'ennemi ne put faire qu'une faible résistance… Chargé par le brave Skarzynski, du 3e Éclaireur, et voyant toute la division prête à fondre sur lui, il fut mis dans une déroute si complète que je ne crois pas qu'on n'ait jamais vu de cavalerie fuir avec un abandon aussi désespéré; pendant plus de deux lieues que dura la poursuite, aucun de ces cavaliers russes ne fit mine de regarder derrière lui…”

Peut être une image de texte qui dit ’5 mars 1814- Campagne de France Les Polonais à Berry-au-Bac Cercle Napoléon Président 'Honneur: Prince Joachim Murat’

1er MARS 1815: NAPOLÉON DÉBARQUE À GOLFE-JUAN

1er MARS 1815: NAPOLÉON DÉBARQUE À GOLFE-JUAN

N’ajoutons rien à l’excellent texte de Jacques-Olivier Boudon, historien, professeur à l'université Paris IV Sorbonne, et président de l’Institut Napoléon

• À l'aube

Une petite flottille apparaît en vue des côtes françaises. Partie de l'île d'Elbe le 26 février, elle a longé la côte italienne avant de bifurquer vers la France. Napoléon s'apprête à amorcer le "vol de l'Aigle" et à "voler de clocher en clocher jusqu'aux tours de Notre-Dame". Il est à bord du brick l'Inconstant, navire "amiral" de la flotte elboise, armé de 26 canons, fort d'un équipage de 60 marins, et sur lequel sont montés ses proches ainsi que 400 soldats de sa garde.

Six autres navires l'encadrent: l'aviso l'Étoile, la spéronade - un bateau maltais à fond plat - la Caroline, quatre navires de transport, dont trois felouques, ainsi que le Saint-Esprit, opportunément arrivé à Porto-Ferrajo le 20 février, et dont Napoléon a fait décharger la cargaison pour pouvoir y transporter une centaine de lanciers polonais, montés à bord avec leur harnachement mais sans monture. Au total, un millier d'hommes ont suivi Napoléon.

Après trois jours de navigation, les hommes ont hâte de débarquer. L'entassement devient insupportable. "Il y avait à bord de l'Inconstant trois et quatre fois plus de monde qu'il n'en aurait fallu pour être bien", note Pons de l'Hérault, le directeur des mines de l’île. Les soldats de la Garde sont massés sur le pont, entre les canons, ou dans la cale.

L'entourage de Napoléon occupe les cabines. Se trouvent à ses côtés les hommes qui formaient en quelque sorte son gouvernement elbois: le général Bertrand, chargé des affaires intérieures sur l'île et l'un de ses principaux confidents, le général Drouot, qui remplit le rôle de ministre de la Guerre, Peyrusse, trésorier de la Couronne. Sont également de l'aventure le général Cambronne, qui commandait la place de Porto-Ferrajo, Pons de l'Hérault, le Dr Fourreau de Beauregard, son secrétaire Rathery, sa domesticité, comme Marchand, premier valet de chambre, ou Saint-Denis, dit "le mamelouk Ali".

Napoléon s'est retiré dans sa cabine. Il met à profit les dernières heures de mer pour relire et corriger les deux proclamations qui doivent être distribuées dès son arrivée. Elles ont été rédigées à l'avance, mais seront datées du 1er mars, jour du débarquement, donc jour du renouveau. L'une est destinée à l'armée, l'autre aux Français.

Dans son adresse au peuple, il justifie son retour, après avoir attribué son échec de 1814 à la trahison des maréchaux Augereau et Marmont.

Aux soldats, il montre de nouveau les chemins de la gloire et lance la formule qui résumera son aventure: "La victoire marchera au pas de charge. L'Aigle, avec les couleurs nationales, volera de clocher en clocher jusqu'aux tours de Notre-Dame." Pons de l'Hérault lit à haute voix la première aux grenadiers de la Garde réunis sur le pont de l'Inconstant. Les soldats sont invités à la recopier pour qu'elle puisse être diffusée dès la descente du bateau.

• En milieu de matinée

Les hommes d'équipage s'occupent aux travaux d'approche. Le temps est beau, la mer calme, le vent léger. Napoléon s'émerveille à la vue des côtes françaises et ne se lasse pas de contempler ce littoral qu'il a sillonné à partir de 1793, quand il était attaché à l'armée d'Italie. Il demande que l'on descende le drapeau de l'île d'Elbe et que l'on hisse l'étendard tricolore.

Les soldats arborent aussi leur ancienne cocarde aux couleurs nationales, qu'ils ont tous conservée et qui va devenir le symbole du ralliement. Les explosions de joie couvrent la voix de leur chef, qui cherche à leur parler. Napoléon multiplie les gestes visant à réduire la distance entre ses soldats et lui. Déjà se profile l'idée d'un retour au peuple.

"Messieurs les grognards, s'exclame-t-il alors selon le souvenir de Pons de l'Hérault, le soleil luit également pour tout le monde. Il faut que chacun mange et que chacun boive". De fait, l'on chante et l'on boit abondamment en ces dernières heures de traversée. Au moment du débarquement, Napoléon procède à plusieurs distributions de croix de la Légion d'honneur.

• Entre 13 heures et 14 heures

La petite flottille est au mouillage dans l'anse du golfe Juan. Après quatre jours de voyage, Napoléon touche au but. Il est parvenu à mystifier les navires croisés lors de la traversée, notamment une corvette anglaise et le Zéphyr, un bâtiment français, auquel il a dissimulé sa présence ainsi que celle des grenadiers à bord de l'Inconstant.

Le débarquement commence. Napoléon fait descendre en premier une escouade de 25 grenadiers, commandée par le capitaine Lamouret, le plus ancien capitaine de la Garde. Elle est chargée d'aller en reconnaissance pour s'assurer qu'aucune batterie côtière ne s'apprête à tirer sur l'Empereur. En fait, la côte n'est pas protégée à cet endroit, de même qu'aucune croisière française ne sillonne le littoral, signe que les autorités n'ont à aucun moment envisagé que Napoléon tenterait un débarquement dans le sud de la France.

Poursuivant sa route, la troupe du capitaine Lamouret se dirige vers Antibes, où elle espère gagner la garnison à sa cause. Mais le commandant de la place, le colonel Cunéo d'Ornano - naguère disgracié par Napoléon et donc peu prompt à le soutenir - les capture. Le premier contact avec le continent n'est donc guère encourageant. Pourtant, "en mettant pied sur le rivage, raconte Pons de l'Hérault, l'Empereur lève son chapeau et dit avec majesté: Puisse mon retour assurer la paix, le bonheur et la gloire de ma patrie."

• 17 heures

La nuit tombe vite en ce début de mois de mars. Il est trop tard pour que les hommes poursuivent l'avancée. Un campement est installé sous des oliviers, au bord de la mer, le long de la route qui relie Cannes et Antibes. Napoléon fait monter sa table de campagne, sur laquelle il déplie une carte, incertain encore de l'itinéraire qu'il empruntera.

Décision est finalement prise de suivre la route des Alpes, en direction de Grenoble, plutôt que de traverser la vallée du Rhône, où il a été conspué l'année précédente en se rendant à l'île d'Elbe.

Puis il s'attable pour un dîner rapide, avant d'aller faire la tournée des bivouacs, afin de se rapprocher d'une troupe qu'il entraîne dans une aventure bien incertaine. Il croise aussi quelques passants avec lesquels il discute, s'informant de l'état d'esprit du pays. De leur côté, ses soldats prennent également du repos, en attendant la levée de la lune. Ils touchent aussi quinze jours de solde d'avance, que leur verse le caissier général Peyrusse.

Pendant que le gros de la troupe se repose, des hommes sont placés sous le commandement du général Cambronne. "Je vous confie l'avant-garde de ma plus belle campagne. Vous ne tirerez pas un seul coup de fusil. Vous ne devez trouver partout que des amis", lui déclare Napoléon. Ce propos rapporté après coup a pu être reformulé, mais il n'en témoigne pas moins du souci de l'Empereur d'éviter un engagement qui risquerait de lui être fatal et surtout précipiterait le pays dans une guerre civile. Par ailleurs, à peine débarqué, il voue une confiance absolue non pas à l'ensemble de la population, mais aux soldats, dont la plupart ont combattu sous ses ordres. Quant au peuple, il est davantage réservé, d'où le choix de prendre la direction des Alpes.

Cambronne, à la tête d'une soixantaine d'hommes, ouvre la voie en direction de Cannes. En route, il croise Honoré Gabriel Grimaldi, duc de Valentinois, qui s'en va prendre possession de la principauté de Monaco, dont il a hérité. Cambronne le fait escorter jusqu'à l'Hôtel de la Poste puis va prendre position au-delà de Cannes, sur la route de Grasse. Revenu en ville en milieu de soirée, il rencontre le maire, réputé fidèle aux Bourbons, qui refuse de se rendre au-devant de Napoléon, mais accepte de livrer les rations demandées. Cambronne a en effet exigé du ravitaillement pour 3 000 hommes. Le maire n'a pas les moyens de s'opposer à Napoléon. De son côté, Pons de l'Hérault a été envoyé à Cannes pour y acheter des chevaux, dont la troupe manque cruellement.

• 23 heures

Napoléon donne l'ordre de marcher. Sa petite armée transfère son campement de Golfe-Juan à Cannes. Les hommes, à pied, sont encombrés de leurs armes; les cavaliers, de leurs selles. Seuls Napoléon et son état-major, dont le général Bertrand, sont montés. Aux trois ou quatre chevaux emmenés de l'île d'Elbe se sont ajoutés quelques autres, achetés sur la route, ainsi que quelques mulets, utilisés notamment pour le transport du trésor. Marchand en obtient un également pour convoyer le lit de l'Empereur, sa cassette et quelques bagages. Il faut aussi traîner les deux canons emportés de l'île d'Elbe. Ils sont destinés à intimider d'éventuels opposants.

La troupe s'installe en bord de mer. Les soldats reçoivent les rations promises. Le maire a en effet mobilisé les boulangers de la ville pour l'occasion et fait tuer trois boeufs. Au cours de ce bref séjour cannois, Napoléon s'entretient assez longuement avec le prince de Monaco, ancien officier de ses armées, et qui fut aussi premier écuyer de l'impératrice Joséphine. Il espère le rallier à sa cause, mais se heurte à un refus prudent. Le prince s'empresse le lendemain de rendre compte de cette entrevue au maréchal Soult, ministre de la Guerre. À Cannes, des habitants ont illuminé leurs maisons, quelques « Vive l'Empereur » ont retenti, mais, globalement, la population voit passer Napoléon et son cortège avec une surprise mêlée d'indifférence.

Il faudra attendre trois jours pour que son passage, au coeur des Alpes, déchaîne les passions. Pour l'heure, après avoir stationné quelques heures à Cannes, il repart à l'aube en direction de Grasse. Ainsi s'achève, sur la côte française, la première étape du "vol de l'Aigle", qui devait conduire l'Empereur à Paris en vingt jours.

Peut être une image de 8 personnes et texte qui dit ’ler mars 1815 Napoléon débarque à Golfe- Juan Cercle Napoléon Président d'Honneur: Prince Joachim Murat’

6 MARS 1815 : LES "CENT-JOURS" - LE DILEMME DU COLONEL LA BÉDOYÈRE

Alors que l'Empereur a déjà dépassé Digne, le soir du 4 mars 1815, le général Marchand, qui commande la place de Grenoble et Fourrier, préfet de l'Isère, apprennent, par une lettre du préfet du Var, son débarquement. Ils se concertent et décident de tenir le plus longtemps possible l’information secrète.

À l'heure où Fourrier - grand mathématicien et ancien de l'Institut d'Egypte - manifeste son loyalisme bourbonien de fraîche date, un émissaire de Napoléon entre secrètement dans la ville. C'est Emery, grenoblois lui-même, chirurgien du Bataillon de l'île d'Elbe, qu'il précède de deux journées. Emery, recherché par la police, trouve asile chez un ami, le gantier Jean Dumoulin.

Le 5 mars, Fourrier, rédige et fait afficher une proclamation royaliste à l'Hôtel de Ville. Le silence ne sert plus à rien, car depuis le matin, la nouvelle du débarquement de l'Empereur s'est répandue dans tout Grenoble. Déjà on colporte partout les proclamations de l'Empereur. La plus vive agitation règne en ville, où les nouvelles les plus extraordinaires, toutes favorables à Napoléon, trouvent créance... Une sourde joie, prête à exploser, se manifeste dans la population. Quant aux soldats de la garnison, ils évitent tout acte d'insubordination, mais ils manifestent leurs sentiments dès que leurs officiers s'éloignent. La nuit précédente les sapeurs du 3e régiment du génie ont illuminé leur caserne !

Ce même jour, Marchand réunit tous les généraux, colonels et majors de la garnison. Ceux-ci affirment être sûrs de la discipline de leurs troupes. Devilliers, qui commande la brigade de Chambéry, reçoit une dépêche de Marchand l'appelant à Grenoble pour s'opposer à la marche de Bonaparte.

Devilliers communique cette information et cet ordre à La Bédoyère, qui croit tout d'abord à une mystification. Mais, lorsqu’il devient certain de la réalité des faits, il se retrouve en grand désarroi et en grand trouble intérieur. Il suggère tout d’abord à son supérieur de ne pas marcher tout de suite sur Grenoble, et d’attendre un jour ou deux.

Le 6, à Paris, Louis XVIII, qui préside un conseil des ministres pour traiter du retour de “l’usurpateur”, demande la convocation des Chambres. Une ordonnance royale déclare Napoléon Bonaparte traître et rebelle; tous les commandants de la force armée devront lui “courir sus”, le traduire devant un conseil de guerre et le fusiller sur simple constatation de son identité.

À Grenoble, réunis de nouveau par Marchand, les chefs de Corps lui rendent compte que nombre de soldats paraissent "hésitants", notamment ceux du 4e d'artillerie où servit autrefois "le petit lieutenant qui de Corse venait"... Marchand renonce alors à son projet initial de se porter contre "les brigands de Bonaparte" et décide de se défendre à Grenoble. Pour gagner du temps, il envoie à La Mure une compagnie du 3e génie, avec le bataillon Delessart du 5e de ligne, afin de faire sauter le pont de Ponthaut. À Chambéry, Devilliers décide le départ des 7e et 11e de ligne qu’il considère pourtant comme des troupes peu sûres. Il ne dit d’ailleurs mot à ses unités sur la cause réelle de leur déplacement.

Voilà ces deux régiments sur la route de Grenoble. La Bédoyère, en tête du 7e de ligne, s'arrête déjeuner à la grand'halte chez Mme de Bellegarde. La comtesse de Boigne racontera par la suite que La Bédoyère lui aurait fait part de sa foi absolue dans le succès du retour de l'Empereur, qu'il désirait passionnément. Et, qu’au moment où il remontait à cheval, il lui aurait crié, mi-sérieux, mi-plaisantant: "Adieu, Madame, dans huit jours je serai fusillé ou Maréchal d’Empire !"

Joie et trouble s’entremêlent dans l’esprit de La Bédoyère. Obéir à ses supérieurs, fidèles au roi ? Transmettre cette obéissance à ses officiers, à ses soldats, dont il sait qu’ils chérissent l’Empereur ? Suivre le Roi, dont la Nation quasi unanime ne veut plus ? Joindre l’Empereur, objet de tous les regards et de toutes les espérances ? Cocarde blanche ou tricolore ? Fleur de lys ou aigle impériale ? Et qu’en dirait son épouse, fervente royaliste ? Et les siens, fidèles aux bourbons ? Sera-t-il considéré par sa famille comme un traitre ? Un renégat ?

La Bédoyère arrive à Grenoble le 7 mars vers midi, avec toute la brigade de Chambéry. Il y retrouve un escadron du 4e hussards venu de Vienne, en Isère, ces mêmes hussards qui, l'an dernier, ont crié: "Vive l'Empereur!" à une revue passée par le comte d'Artois... Mais il y a aussi deux régiments de ligne, en particulier le 7e, qui est fidèle aux Bourbons. Marchand les passe tous en revue, leur révèle la marche et l’approche de "Bonaparte", et les exhorte à faire leur devoir...

La Bédoyère, qui a déjeuné avec le Général Marchand, rassemble son régiment aux cris de "Vive l'Empereur !" et après un bref conciliabule avec ses officiers et ses soldats, sort de Grenoble, pour aller à la rencontre de l’Empereur…

Marcel Doher écrit: " Celui-ci voit s'approcher le jeune et ardent colonel. L'an passé, aux jours douloureux de Fontainebleau, La Bédoyère s'est mis spontanément à sa disposition, demeurant auprès de lui jusqu'au dernier moment, à l'heure de tous les reniements ".

L'Empereur embrasse La Bédoyère et voyant que ce dernier n'a pas de cocarde tricolore, décroche celle qui orne son chapeau et la lui donne. Plus tard c'est la prise de Grenoble, après bien des aléas. La Bédoyère suit l'Empereur vers Paris. Ce dernier y arrive le 20 mars vers 21 heures ...

Peut être une image de 1 personne et texte qui dit ’6 mars 1815 Les Cent-Jours le dilemme de La Bédoyère "dans huit jours je serai fusillé ou Maréchal d 'Empire!" Cercle Napoléon Président d'Honneur Prince Joachim Murat’

18 FÉVRIER 1814 : NAPOLEON À LA BATAILLE DE MONTEREAU

18 FÉVRIER 1814 : NAPOLEON À LA BATAILLE DE MONTEREAU

le 18 février 1814, à 3 heures du matin, Napoléon, au château de Nangis apprend que Victor a commis l’erreur de ne pas lui obéir, et s’est arrêté pour faire reposer ses hommes à Montigny-Lencoup, à deux lieues de Montereau, qu’il devait absolument occuper. Très irrité, il demande à Berthier de lui ordonner de partir aussitôt vers Montereau, pour y rétablir au plus vite les ponts.

Les Autrichiens, présents dans cette ville depuis le 14, après l’avoir pillée et détruite, avertis de l’approche des Français, sont en train de fuir. Victor conscient de sa faute, demande à l’Empereur l'autorisation de se retirer chez lui. Autorisation sèchement refusée. Pajol, lui aussi, a reçu ordre de se diriger sur Montereau pour en chasser les Wurtembergeois retranchés et rétablir les ponts de Seine et d’Yonne.

À 4 heures du matin, Pajol part vers Montereau par le nord-ouest, avec 1400 cavaliers, 4550 fantassins et 16 canons. Mais il pense que, ainsi que les ordres le prévoyaient, Victor occupe déjà Montereau. A la sortie du bois de Valence vers 8 heures, ses troupes, surprises, sont reçues par les canon wurtembourgeois. Le combat s’installe entre le hameau des Courreaux, et la ferme de La Mare, qui ne seront pris qu’en fin de matinée.

Vers les 11 heures, Victor attaque par le nord-est tandis que le général Gérard, assisté du général Châteaux, gendre du Maréchal Victor doit déboucher sur le village de Forges, au nord de Montereau. Les combats y sont acharnés, à deux reprises les Français sont chassés et reprennent le village. A Montereau, Châteaux parvient à se glisser dans le faubourg Saint-Nicolas, mais une balle lui fracasse le bras droit à l'entrée du pont sur la Seine. Il est évacué immédiatement dans la boutique d'un épicier de la rue de Provins.

A Villeneuve-les-Bordes, l'Empereur reproche à Victor sa halte prématurée de la veille, sa lenteur coupable dans l’attaque, le destitue et le remplace à la tête du 2ème Corps par le général Gérard. Napoléon, furieux de ne pas entendre le canon de son armée, part en direction de Montereau.

A midi, Gérard, qui a remplacé Victor, dirige ses 60 pièces d'artillerie contre les Wurtembergeois, tandis que l'ennemi fait avancer ses réserves. Le gros de l'infanterie française couronne les sommets des Ormeaux à Surville, une vigoureuse action de Gérard assure aux Français une position avantageuse à 2 heures de l'après-midi.

Les cavaliers de Delort, suivis par les Gardes Nationaux Bretons et les Gendarmes à pied d’Espagne, progressent par un mouvement tournant au sud des Ormeaux, pour couper toute retraite aux Autrichiens. Vers 14 heures, devant une haie-vive bien défendue, Pajol veut se précipiter en tête de la colonne pour l’enlever. C’est alors que M. Moreau, maire de Montereau, lui enseigne deux sentiers latéraux permettant de tourner cette position. Les Ormeaux sont au pouvoir des troupes de Pajol et les Wurtembergeois sont coupés de leur retraite.

A ce moment, le Prince Royal de Wurtemberg abandonne le champ de bataille et fuit par la route de Bray. Pajol, dans Montereau, mitraille les masses ennemies dans le faubourg Saint-Nicolas. L'encombrement est extrême au pont de Seine.

Vers 15 heures, Napoléon précédé de cavalerie de la Garde, arrive aux abords de Montereau, salué par les cris de “Vive l'Empereur !” Sa présence seule met déjà en épouvante les Autrichiens. L’Empereur envoie quatre colonnes pour finir de prendre le plateau de Surville et Montereau, la Garde étant tenue en réserve.

Beaucoup de fuyards cherchant à passer les ponts sont sabrés par les hussards de la brigade Subervic. Les pontonniers autrichiens tentent sans succès de détruite les bordages du pont d'Yonne. A Surville, le Général Gérard coupe et culbute les Autrichiens de Zach et Colloredo, tandis que les chasseurs de la Garde descendent en trombe, taillent en pièces, ou font prisonniers de nombreux Autrichiens.

A 4 heures de l’après-midi, Pajol prend les ponts avant que les Wurtembergeois, les ayant repassés, ne puissent les détruire. Dans ses cavaliers, beaucoup, jeunes conscrits ayant eu quinze jours de formation à Versailles, sont inexpérimentés, ce qui fait dire au général Delort: “je crois, en vérité, qu'on perd la tête de me faire charger avec de la cavalerie pareille”. Mais, pleins d’audace, Delort en tête, ils font des prodiges. Pajol, en tête des deux autres brigades, le bras gauche en écharpe, car il souffre encore de la blessure qu'il a reçue à Wachau le 16 octobre 1813, arrive sur le pont de Seine au moment où une mine éclate. Les Wurtembergeois ouvrent le feu sur lui, son cheval est tué, il est fortement contusionné.

Sur les hauteurs de Surville, Napoléon domine la scène et applaudit à cette brillante et victorieuse charge qui lui conserve intacts les ponts de Montereau. Il s'écrie: "Il n'y a plus que Pajol dans mes généraux pour savoir mener de la cavalerie“.

A Surville, une pièce de fort calibre tire six coups seulement sur le gros des ennemis avant qu'il ne se trouve hors de portée. Napoléon pointe lui-même une des pièces de batterie d'artillerie légère de la Garde qui prend en enfilade la route de Fossard. On lui demande de se mettre à l’abri. Pour toute réponse: “Allez mes amis, ne craignez rien, le boulet qui me tuera n'est pas encore fondu !”

Après la bataille , Napoléon a un tête-à-tête orageux d'une heure avec Victor, qui arrive à l'attendrir en évoquant les souvenirs d'Italie et le nom de son gendre, le général Châteaux, grièvement blessé au cours de cette bataille (il en mourra le 8 mai 1814). Touché, Napoléon tend la main au maréchal qui lui dit: "je ne quitterai pas l'armée, je vais prendre un fusil, je n'ai pas oublié mon ancien métier". Victor obtient son pardon et reçoit le commandement de deux divisions de Jeunes Gardes stationnées à Fontainebleau.

La bataille aura coûté 2000 hommes aux Français et 6000 aux Autrichiens et Wurtembergeois, qui perdent aussi 15 canons.

Peut être une image de 5 personnes et texte qui dit ’18 février 1814 Napoléon à la bataille Montereau Allez mes amis, ne craignez rien, le boulet qui me tuera η 'est pas encore fondu! Cercle Napoléon Président d'Honneur Prince Joachim Murat’

17 FÉVRIER 1814 : NAPOLÉON À LA BATAILLE DE MORMANT

17 FÉVRIER 1814 : NAPOLÉON À LA BATAILLE DE MORMANT

• Lisons, de Émile Marco de Saint-Hilaire, histoire de la garde impériale

Arrivé à Guignes, Napoléon, après avoir rallié la division de dragons du général Trelliard, venant de Bayonne, et environ onze cents vieux grenadiers et chasseurs de la Garde, tirés de l’Armée des Pyrénées et des dépôts de la Garde, commence à s’ébranler.

Notre armée, électrisée par ses derniers succès, brûlait d’en venir aux mains. Elle n’attendit pas longtemps. Le 17, au point du jour et comme l'avait annonce l’Empereur, nos troupes se mirent en marche sur Mormant, et découvrirent l'ennemi à la hauteur de l’Étang: c’était le comte de Palhen qui se retirait sur la grande route, ses flancs couverts, à droite, par deux régiments de Cosaques, à gauche, par quatre escadrons de lanciers, avec deux escadrons en réserve.

Le maréchal Victor se déploya en avant du village de Pequeux, la réserve de Paris au centre du 2e corps d'infanterie; le général Kellermann, avec la division de dragons Lhéritier et Trellard, prit la droite de cette ligne; le général Milhaud, la gauche, avec les divisions Pire et Briche; les 11e et 7e corps d’infanterie, qui arrivèrent, ensuite, formèrent la seconde ligne: la Garde était restée en réserve a Guignes.

Napoléon, jugeant bien la faiblesse du corps russe, qui se repliait, doubla de vitesse pour le joindre. Le maréchal Victor se mit en mouvement sur Mormant, tandis que les généraux Milhaud et Kellermann tournaient ce village. La brigade Subervie sabre la première les tirailleurs russes, tandis que le général Piré, avec sa seconde brigade, se porte au trot sur les escadrons russes, que de son côté le général Kellermann est sur le point d’atteindre.

Cette attaque fut un plein succès et Mormant fut à peine disputé. L'armée française poursuivit celle des alliés jusqu’à Valjouan, où se livra un combat qui fut encore à son avantage. Dans ce combat, on vit un escadron de cuirassiers, commandé par le général Bordesoulle, culbuter trois cents hommes en un instant.

Cet escadron était formé de jeunes conscrits qui, depuis huit jours seulement, montaient à cheval et voyaient l’ennemi pour la première fois: ces jeunes gens que le courage seul guidait, novices dans l’art de la guerre, ne firent aucuns prisonniers; ce ne fut même qu’avec peine que leur général parvint à leur arracher des mains un officier autrichien, déjà blessé.

Peut être une image de 1 personne et texte qui dit ’17 février 1814 Victor à la bataille de Mormant Cercle Napoléon Président d'Honneur: Prince Joachim Murat’

 

12 FEVRIER 1814 : NAPOLÉON À LA BATAILLE DE CHÂTEAU-THIERRY

12 FEVRIER 1814 : NAPOLÉON À LA BATAILLE DE CHÂTEAU-THIERRY

Les français sont épuisés après la bataille de Montmirail. Ils ne poursuivent pas les alliés, mais bivouaquent autour de l’Empereur, à même le champ de bataille, avec les jeunes gardes des divisions Meunier et Michel. Mais le général Michel, blessé, transmet son commandement à Charles-Joseph Christiani, baron d’Empire et général de brigade depuis1813.

Ce 12 février 1814 au matin, Marmont informe l’Empereur qu’il est toujours à Étoges, et qu’il cherche à reconnaître la position de Blücher. Oudinot, sur la Seine indique que l’ennemi a pris Sens et que Allix s’est retiré à Pont-sur-Yonne. Victor, lui, semble toujours tenir Nogent. Macdonald est bloqué par la destruction sur la Marne du pont de Trilport. Malade, il a transmis le commandement à Sébastiani.

Alors que les divisions Curial et Ricard ne quittent pas Montmirail, sous les ordres de de Ney et de Mortier, une première colonne composée des divisions Christiani et Meunier et des divisions de cavalerie Laferrière-Lévesque et Defrance, se dirige en direction de Château-Thierry.

L’Empereur part avec une deuxième colonne vers Viels-Maison. Il y laisse une partie de la division Friant, qui doit attendre l’arrivée de la cavalerie de Saint-Germain. A la tête des divisions Colbert, Guyot et des grenadiers de la division Friant, il bifurque vers le nord, direction Montfaucon.

Chez les Alliés, le général Yorck, avec la cavalerie prussienne, a passé la nuit entre Fontenelle et Viffort. Les débris du corps russe de Sacken, après avoir marché toute la nuit, passent au petit matin du 12 à travers la ligne prussienne afin de traverser la Marne à Château-Thierry.

Yorck et Sacken décident, au lieu de se mettre à l’abri derrière la Marne, de positionner, pour défendre le plateau de Nesles, l’infanterie autour et dans la ferme de la Trinité, et une partie de la cavalerie devant Nesles tandis que le reste protège l'aile gauche près de la ferme de Petit-Ballois.

Mortier, le premier à y reconnaître la résistance ennemie, attaque par l’est vers les Petites-Noues, pendant que l’Empereur, qui a atteint Montfaucon, tente d’envelopper l’ennemi par l’ouest. Devant cette attaque, les Prussiens fuient. Les Français les poursuivent, et s'emparent des Petites-Noues.

Puis leur cavalerie, commandée par Nansouty, s'en prend à l'aile gauche ennemie et tente un mouvement tournant, cette fois par l’est. Charges et contre-charges se succèdent. La ligne de retraite des alliés est menacée. Des ordres contradictoires fusent de leur double commandement. Les cavaliers russes fuient le champ de bataille et se replient vers l’unique pont, pour se mettre à l’abri derrière la Marne. Abandonnés par les russes, les cavaliers prussiens sont chargés par les cavaliers français. Eux aussi fuient vers le pont sur la Marne.

A la suite de ces replis, l’infanterie alliée n’est plus protégée sur sa gauche. L'infanterie de la Garde, les grenadiers de Friant ainsi que toutes les réserves de cavalerie encore disponibles se ruent sur elle. Les Alliés se forment en carrés, et tentent de reculer vers Château-Thierry. Mais ils sont bientôt submergés et plusieurs carrés sont totalement détruits par la furia française. Quelques régiments se rendent. Le plateau de Nesles est totalement entre les mains des Français.

Ce qui reste des Alliés fait retraite en désordre, s’accumule devant le seul pont qui mêne à Château-Thierry. La cavalerie française charge cette foule désorganisée, entassée devant ce pont. L'infanterie française doit toutefois se contenter de prendre le Faubourg de Marne, mais ne peut poursuivre l’ennemi, car l'artillerie prussienne, installée sur la rive droite, la bombarde intensément, laissant Yorck et Sacken, se replier sur la route de Soissons.

Dans cette bataille, les Français capturent 9 canons ainsi que des vivres et bagages, les Prussiens perdent 1 250 hommes, les Russes 1 500, et les Français, 600.

Peut être une image de texte qui dit ’12 février 1814 Napoléon à la bataille de Château-Thierry Cercle Napoléon Président d'Honneur Prince Joachim Murat’

…La plus belle ruse de Napoléon !

La veille de la bataille d’Austerlitz, le 1er décembre 1805, l’empereur reçoit le prince Dolgoroukov, un émissaire envoyé par l’état-major de l’armée austro-russe, qu’il se prépare à affronter. Le prince est impressionné par l’apparence de Napoléon : ce dernier n’est pas rasé, il a l’air hagard et tient des propos incohérents. De toute évidence, il est à bout de forces. Cela confirme les informations que Dolgoroukov a reçues sur le terrain. Partout, depuis plusieurs jours, les troupes françaises fuient lorsque des escarmouches les opposent aux Austro-russes. La bataille du lendemain ne devrait donc être qu’une formalité, tant Napoléon et ses hommes semblent épuisés…

Une comédie !

Or, en réalité, il s’agit d’une comédie jouée par l’empereur et ses soldats pour berner l’ennemi. Le lendemain, à Austerlitz, l’effet de surprise jouera à plein et les soldats austro-russes, qui s’attendaient à ne faire qu’une bouchée de l’armée française, tomberont de haut devant des adversaires aux ressources inattendues…

Baguette, conserve... Ces inventions étonnantes que l'on doit à Napoléon

De sa vie militaire, l’Empereur a gardé l’habitude de manger vite, parfois debout, voire à cheval ! Et quand il daigne se poser – trente minutes maximum – il se contente le plus souvent d’un plat de pâtes et de vin coupé à l’eau. Pas franchement gastronome Napoléon! Et pourtant, il est à l’origine d’innovations autour de la table. La preuve par quatre.

La diplomatie par la table

Son archichancelier Jean-Jacques de Cambacérès, un grand gourmet, lui a affirmé que « c’est en grande partie par la table que l’on gouverne ». Bon élève, Napoléon organise des « dîners people »: deux fois par semaine, il reçoit à sa table « toutes les personnalités françaises et étrangères de passage à Paris ».

La boîte de conserve

Napoléon cherche un moyen permettant de conserver la nourriture pour ses troupes. En 1809, Nicolas Appert, confiseur de son état, lui présente un procédé de stérilisation de bocaux par la chaleur. Bingo! Il devient fournisseur des armées impériales. Son invention est à l’origine de la boîte de conserve.

Le sucre de betterave

En riposte au blocus continental, décidé par Napoléon pour ruiner leur économie, les Anglais bloquent le transport de la canne à sucre en provenance des Antilles. Les Français sont en hypoglycémie. L’Empereur demande aux meilleurs chimistes du pays de trouver une alternative. Eurêka: le 2 janvier 1811, l’industriel Benjamin Delessert lui présente des pains de sucre fabriqués à partir de betterave… Ils sont parfaits! Napoléon en décroche sa propre croix de la Légion d’honneur pour l’épingler sur la poitrine du héros du jour! A la fin de l’Empire, 213 usines produisent du sucre raffiné et la France est aujourd’hui le premier producteur mondial de sucre de betterave.

Joseph Fouché, l'inquiétant ministre de la police de Napoléon

L’inquiétant ministre de la Police ne recule devant rien pour plaire à son maître Napoléon.

Le 24 décembre 1800. Il est 20 heures, le Premier consul Napoléon Bonaparte se rend à l’Opéra. Son carrosse sort du palais des Tuileries. Soudain, au niveau de la rue Saint-Nicaise, une épouvantable explosion retentit. Elle est due à des barils remplis de poudre et de ferraille, cachés sous la paille d’une charrette. L’attentat fait 22 morts et une centaine de blessés. Bonaparte, qui était visé, est sain et sauf.

Fouché retourne la situation à son avantage

Le ministre de la police, Fouché, n’a pas su prévenir l’attaque. Mais il va retourner la situation à son avantage. Bonaparte étant persuadé qu’il s’agit d’un complot des anciens révolutionnaires jacobins, Fouché fait aussitôt déporter 122 suspects. Il contente ainsi son patron. Finement joué, car il est convaincu que le coup vient des royalistes, ce que son enquête démontre très vite. Fouché arrête des centaines d’entre eux, dont les responsables de l’attentat qui seront condamnés à mort. Les deux clans ennemis du Premier consul sont ainsi éliminés d’un coup !

A 41 ans, Joseph Fouché a déjà un long parcours politique. Élu à la Convention, girondin puis montagnard, cet ex-professeur de sciences a voté la mort de Louis XVI et a réduit l’insurrection lyonnaise en 1793 en faisant tirer au canon sur les condamnés à mort… car la guillotine était trop lente !

Fouché, un personnage glaçant

Osseux, le visage long et pâle, le regard fixe, l’homme a tout de l’animal à sang froid. « Il ment trois fois par jour », dit de lui Bourrienne, le secrétaire de Napoléon. Nommé ministre de la Police en 1799, il facilite le coup d’État du 18 Brumaire qui porte Bonaparte au pouvoir. Il se montre bien utile à son maître : chaque jour, il lui fournit un bulletin des conspirations, grèves, manifestations…

Sa méthode ? Il réorganise la police avec la nomination de préfets, chargés d’établir des listes des infractions et des crimes, des mendiants, des déserteurs, etc. C’est Fouché qui rend le passeport obligatoire, pour suivre les déplacements des individus mais aussi pour avoir leur signalement.

Fouché taxe les maisons de jeu et les prostituées

Et il transforme la presse en service de com’, en rémunérant au besoin directement les responsables des journaux ! Ce formidable outil de surveillance coûte cher, trop pour que les fonds publics suffisent à le payer. Mais Fouché a de la ressource… et aucun scrupule ! Il fait taxer les maisons de jeu. La prostitution est elle aussi soumise à une taxe – officiellement allouée à la santé des prostituées.

« J’eus bientôt de l’argent dans ma caisse, en rendant le vice […] tributaire de la sûreté de l’État », assume-t-il dans ses Mémoires. « Le génie de Fouché, car il a du génie, c’est de savoir manier les peurs », assure l’historien Emmanuel de Waresquiel dans son ouvrage Fouché, dossiers secrets. Souvent excédé par son ministre, Napoléon le chasse toutefois en 1802… avant de le rappeler deux ans plus tard !

Christophe Veyrin-Forrer

Il y a 200 ans, le 5 mai 1821 à 17h49, Napoléon meurt sur l'île de Ste Hélène où il vit en exil. Quelques mois plus tôt, certains admirateurs avaient pourtant préparé un plan pour le faire évader de son île...

La fin de l’année 1820, à l’angle de la rue Saint-Louis et de la rue de Chartres, en plein cœur de La Nouvelle-Orléans, un étrange manège intrigue les habitants. Nicolas Girod, le propriétaire de cette belle maison créole, la transforme en un véritable palais. Après avoir doté sa bâtisse d’un escalier en colimaçon et d’une coupole, il y installe du mobilier de luxe et toute une panoplie de portraits et bustes de Napoléon Ier. Nicolas Girod ne compte pas profiter lui-même de tout ce faste. Sa maison est destinée à accueillir un hôte de marque : Bonaparte en personne ! Du moins, c’est ce qu’imagine ce Français installé à La Nouvelle-Orléans depuis les années 1770 et qui voue un culte à l’Empereur. Nicolas Girod n’est pas un plaisantin. Riche commerçant, il a été élu maire de la ville en 1812. Mais en septembre 1815, « la nouvelle de l’exil de Napoléon affligea douloureusement M’sieur Girod », raconte un article du New York Tribune en 1920. Un mois plus tard, Girod démissionne, officiellement pour se consacrer à ses affaires personnelles…

Les tentatives pour libérer le précieux prisonnier se multiplient

Sur l’île de Sainte-Hélène, Sir Hudson Lowe est chargé de surveiller Napoléon, installé dans une ferme à Longwood. Le Britannique est sur les nerfs. Le site a beau être perdu dans l’Atlantique, les tentatives imaginaires ou réelles pour libérer le précieux prisonnier se multiplient. Lowe garde un œil sur les Etats-Unis où l’Aigle est très populaire, surtout depuis leur entrée en guerre contre l’Angleterre en juin 1812. C’est d’ailleurs Bonaparte qui a vendu la Louisiane aux Américains quelques années plus tôt. De plus, depuis la défaite napoléonienne, de nombreux officiers français se sont installés au Nouveau Monde. Et c’est depuis l’embouchure du Mississippi qu’un flibustier français, Jean Lafitte, aurait tenté une expédition à Sainte-Hélène, finalement emportée par un cyclone. Au-delà des conditions climatiques rendant l’accès à l’île difficile, délivrer Napoléon relève du défi : 4 000 soldats sont positionnés près de Longwood et quatre navires de guerre croisent autour de l’île.

Recrutement de l’équipage, aménagement de la maison… Tout est prêt pour sauver l’Empereur

Même pas peur ! Nicolas Girod est persuadé de pouvoir libérer l’empereur des Français et balaie toutes ces embûches d’un revers de main. A la fin de l’année 1820, il trouve des alliés prêts à le suivre. Jean Lafitte, encore lui, et son frère Pierre, installés aux environs de La Nouvelle-Orléans, lui recommandent un autre pirate, Dominique You. Le plan est limpide : « Il s’agissait simplement de faire un petit saut sur Sainte-Hélène, de maîtriser les gardes, d’éloigner l’Empereur et de repartir en Amérique », poursuit le New York Tribune. Au début de 1821, Nicolas Girod achève les derniers préparatifs : recrutement de l’équipage, aménagement de la maison… Il aurait même fait construire un bateau à voile très rapide, le clipper la Séraphine. Au début du mois de mai, tout est enfin prêt ! Mais au même moment, un navire jette l’ancre à La Nouvelle-Orléans, porteur d’une terrible nouvelle. Napoléon vient de mourir à Sainte-Hélène le 5 mai ! Pour Nicolas Girod et ses comparses, il est trop tard. A La Nouvelle-Orléans, la maison Napoléon attend toujours son hôte de marque.

Le reclus de Sainte-Hélène - Napoléon

 

 

 

Le père d'Alexandre Dumas, général de Napoléon, évincé pour sa couleur de peau !

Le 2 juillet 1798, les troupes de Bonaparte débarquent au large d’Alexandrie. À l’avant-garde, un général subjugue les Égyptiens : c’est un métis d’1,85 mètre au teint sombre et aux cheveux crépus. Sur son cheval, l’homme a des allures de centaure. À côté, Napoléon détonne par sa petite taille et sa maigreur. Au point que les Bédouins sont persuadés que c’est le géant noir qui mène l’expédition. Ce colosse n’est autre qu’Alexandre Dumas. Pas l’auteur des Trois Mousquetaires, ni son fils – nommé Alexandre Dumas également – à qui l’on doit La Dame aux camélias… mais son grand-père. Un personnage incroyable, qui inspirera Le Comte de Monte-Cristo.

Un enfant vendu puis racheté

Thomas Alexandre Davy de la Pailleterie, de son nom d’origine, naît en 1762 à Saint-Domingue – alors colonie française – d’un père aristocrate normand exilé, à la tête d’une plantation de café, et d’une esclave nommée Marie Cessette Dumas. Enfant, il gambade pieds nus dans la mangrove en taquinant les caïmans. Mais en décembre 1775 son père, décidé à rentrer en France pour récupérer son héritage, vend ses quatre enfants, tous mulâtres, pour se payer le voyage. L’un d’eux, Thomas Alexandre, son préféré, est cédé à réméré, c’est-à-dire avec possibilité de rachat. Huit mois plus tard, le père, renfloué, le rachète et lui fait traverser l’Atlantique. Pour le garçon, c’est le choc : son petit planteur de père est devenu marquis. Soieries, satins, brocarts, rien n’est alors trop beau pour son fils. Le jeune homme est confié à un précepteur, puis intègre une académie parisienne où il apprend les arts, l’équitation, le maniement du fleuret et du sabre, qui deviendra son arme de prédilection.

Un Noir dans la haute société

Les philosophes des Lumières sont passés par là et l’idée d’abolir l’esclavage est dans l’air du temps. Dans les salons parisiens, la beauté exotique et les manières raffinées de Thomas Alexandre séduisent. En 1786, après une brouille avec son père, il décide de devenir militaire. À 24 ans à peine, il s’enrôle comme simple soldat. Mélange d’orgueil et de ressentiment envers la lignée paternelle, il adopte le patronyme de sa mère et signe son engagement sous le nom d’Alexandre Dumas. En août 1792, alors simple brigadier, il est envoyé en Belgique pour repousser les Autrichiens. Il y signe son premier fait d’armes. À un contre douze, Dumas donne la charge. Les Autrichiens se rendent sans même avoir eu le temps de tirer. Il entre dans la légende et sa carrière dans l’armée va connaître une ascension fulgurante. À l’automne 1792, il est promu lieutenant-colonel, puis devient, en juillet 1793, le premier général d’origine afro-antillaise de l’armée française, à la tête de 10 000 hommes. Entre-temps, il a épousé Marie Labouret, fille d’aubergiste rencontrée à Villers-Cotterêts, avec qui il a eu deux filles et un fils, le futur écrivain.

Au même moment, le destin d’un autre homme est en marche : un certain Bonaparte devient général. En 1796, Dumas rejoint son commandement dans l’armée d’Italie. Le métis ne goûte guère ce petit homme qui, sous couvert de servir la Révolution, en profite pour asseoir son pouvoir personnel. Républicain convaincu, Dumas refuse de lui témoigner la moindre révérence. Bonaparte pour autant ne peut que reconnaître les talents de Dumas. Tandis que les Autrichiens le surnomment le « Diable noir», le général corse salue les exploits de «l’Horatius Coclès du Tyrol», en référence à un héros légendaire romain.

La rivalité avec Napoléon Bonaparte

Quelque mois plus tard, quand Bonaparte lance sa campagne d’Égypte, Dumas est évidemment du voyage. Mais le colosse lui fait de l’ombre. Non seulement le petit Corse ne lui arrive pas aux épaules, mais Dumas est aussi le général le plus respecté, craint pour sa virulence et ses emportements légendaires. Pire, un soir, il invite d’autres généraux sous sa tente et se laisse aller à critiquer le futur empereur. Convoqué par Bonaparte qui l’accuse de complot, le métis, fidèle aux idéaux de 1789, rétorque : « Les intérêts de la France doivent passer avant ceux d’un homme, si grand que soit cet homme. » A demi-mot, Bonaparte menace de le faire fusiller. Plein d’amertume, Dumas continue pourtant à le servir, étouffant brillamment une révolte au Caire. Mais cela ne suffit pas à reconquérir son estime : onze ans plus tard, lorsque Bonaparte commande un tableau sur cette victoire, le général noir y est remplacé par un hussard blond aux yeux bleus… Dumas ne se remettra jamais de cette disgrâce. Il est fait prisonnier en 1799, à Naples, où on le laisse croupir pendant deux ans dans un cachot. A son retour, paralysé de la joue gauche, à moitié sourd et aveugle, il ne recevra pas les honneurs escomptés. Pendant son absence, Bonaparte a remis au goût du jour les lois racistes : il refuse l’inscription du métis sur la liste des officiers et la pension qui lui est due. Dumas meurt en 1806, sans le sou… La postérité, ce fils d’esclave ne l’obtiendra que bien plus tard, grâce à ses descendants, qui comptent parmi les auteurs les plus célèbres de la littérature française.

 

Date de dernière mise à jour : 02/04/2024

  • Aucune note. Soyez le premier à attribuer une note !