Laïcité à l’école : Le point après la démission du proviseur de Maurice-Ravel, menacé de mort

Le proviseur de la cité scolaire parisienne a fait ses cartons après avoir été la cible de menaces de mort, à la suite d’une altercation autour du voile d’une élève.

Démission du proviseur du lycée Maurice Ravel : une capitulation française

L'essentiel

Le proviseur d’un lycée parisien a démissionné après avoir été menacé de mort sur Internet suite à une altercation avec une élève au sujet de son voile.

Alors que le ministère assure avoir mis en place les mesures de protection nécessaires, le Premier ministre Gabriel Attal doit recevoir le chef d’établissement, qui explique avoir quitté son poste « pour des raisons de sécurité ».

L’affaire intervient dans un contexte d’augmentation des atteintes à la laïcité à l’école ces dernières années.

Depuis lundi, la cité scolaire parisienne Maurice-Ravel a un nouveau proviseur, qui assurera l’intérim jusqu’au mois de juillet prochain. Une recrue arrivée après le départ précipité de l’ancien chef d’établissement, qui a démissionné en fin de semaine dernière « pour des raisons de sécurité » après avoir été la cible d’une vague de cyberharcèlement.

Que s’est-il passé ?

Resté sept ans à son poste, le proviseur du lycée et collège Maurice-Ravel, situé dans le XXe arrondissement de Paris, a fait ses cartons il y a quelques jours. Une décision prise après avoir été la cible de menaces de mort sur Internet pendant plusieurs semaines. Tout est parti d’une altercation avec une jeune fille au sujet de son voile : le 28 février, près de 20 ans après la loi sur la laïcité à l’école, le chef d’établissement avait rappelé cette consigne à trois élèves qui se trouvaient dans les couloirs de l’établissement.

« L’une d’elles, majeure et scolarisée en BTS », avait « ignoré le proviseur, ce qui a provoqué une altercation », détaillait le parquet. S’en était suivie une vague de cyberharcèlement du personnel de direction, certains messages virulents soutenant l’élève, qui avait affirmé que le proviseur l’avait « tapée violemment au bras ». La jeune femme avait déposé plainte, finalement classée sans suite, a-t-on appris ce mercredi.

Pourquoi a-t-il démissionné ?

Dans un mail à destination des enseignants, et publié par L’Humanité, le proviseur a indiqué avoir quitté ses fonctions « pour des raisons de sécurité » pour lui et pour le lycée. Le rectorat a, quant à lui, évoqué « des convenances personnelles » et un « départ anticipé » en retraite « au vu des événements qui ont marqué ces dernières semaines ».

Alors que certains observateurs pointent la solitude des chefs d’établissements dans la gestion de ce type d’incident, le ministère de l’Education assure avoir « fait bloc derrière lui et la communauté éducative » et mis en place une protection. « Plusieurs équipages de la police nationale ont été mobilisés autour de l’établissement, avec un suivi renforcé par les forces de l’ordre pour protéger le proviseur », affirme-t-il. Le rectorat a également « réalisé un signalement au procureur de la République » notamment au sujet des menaces en ligne. Deux individus identifiés comme à l’origine de ces écrits, pourtant sans lien avec l’établissement, ont d’ailleurs été interpellés.

Quelles sont les réactions ?

Après la venue sur place de la ministre de l’Education nationale Nicole Belloubet début mars, le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé qu’il recevra mercredi après-midi à Matignon le proviseur de la cité scolaire Maurice-Ravel. Il faut dire que son cas fait beaucoup parler dans les salles des profs et dans la sphère politique. Si les chefs d’établissements interrogés par 20 Minutes gardent globalement le silence depuis ce matin, évoquant un sujet sensible, des responsables politiques de tous bords ont commenté cette affaire.

« Voilà à quoi aboutit le pas de vague, voilà où nous mènent les petites lâchetés et les grands renoncements », a réagi le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau sur le réseau social X. « On ne peut pas l’accepter », a déclaré sur France 2 le chef des députés socialistes Boris Vallaud, estimant que « c’est un échec collectif ». « C’est surtout une défaite de l’Etat » face à « la gangrène islamiste qui prospère », a renchéri sur Sud Radio la tête de liste Reconquête aux élections européennes, Marion Maréchal.

Le contexte s’est-il durci pour les chefs d’établissement ?

Depuis la loi de 2004, le sujet de la laïcité à l’école fait régulièrement parler de lui. Selon une note des services de l’Etat, les atteintes à la laïcité, bien plus nombreuses depuis l’assassinat de Samuel Paty, avaient augmenté de 120 % entre l’année scolaire 2022-2023 et 2021-2022. Avant l’interdiction de l’abaya à la rentrée 2023, le port de signes et tenues, qui représente la majorité des atteintes, avait lui augmenté de plus de 150 % tout au long de la dernière année scolaire.

Il y a trois semaines, plus de 150 chefs d’établissement parisiens avaient manifesté en solidarité avec le proviseur de Ravel, évoquant les menaces, sur ce sujet parmi d’autres, dont ils pouvaient être victimes au quotidien. Le Premier ministre a très récemment promis la mise en place de « cellules d’appui pédagogique » pour les enseignants qui le souhaitent.

La Rédaction - section Éducation

 

 

Date de dernière mise à jour : 27/03/2024

  • 6 votes. Moyenne 4.7 sur 5.