DERMATOSE : 700 kilomètres pour incinérer les bovins euthanasiés

La vie du troupeau de vaches à la ferme de Saint-Thibault - la Ferme de  Saint Thibaut des vignes - le site officiel | la Ferme de Saint Thibaut des  vignes –

Les carcasses du troupeau abattu en Ariège ont traversé la France jusqu’en Normandie, ravivant la colère des éleveurs et soulevant des questions sanitaires.

L’affaire de l’abattage controversé d’un troupeau de 208 bovins à Bordes-sur-Arize continue de faire des vagues. Alors que l’émotion reste vive dans le monde agricole, une nouvelle révélation vient jeter de l’huile sur le feu : les carcasses des animaux euthanasiés ont parcouru plus de 700 kilomètres à travers la France pour être incinérées dans l’Orne, selon les informations révélées par nos confrères d’Ici Normandie.

Un périple qui interroge

Cette décision logistique soulève de nombreuses interrogations, tant sur le plan sanitaire qu’économique. Les dépouilles des bovins abattus dans le cadre de la lutte contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) ont été transportées depuis l’Ariège jusqu’à l’usine d’équarrissage Atemax, située à Saint-Langis-lès-Mortagne, dans le département de l’Orne. Un trajet qui représente près de 700 kilomètres à vol d’oiseau, et davantage encore par la route.
Cette distance considérable apparaît d’autant plus paradoxale que les autorités sanitaires imposent habituellement la mise en place de zones réglementées strictes dès l’identification d’un foyer de DNC, précisément pour limiter les déplacements et éviter toute propagation de la maladie.

L’incompréhension des agriculteurs normands

En Normandie, l’arrivée de ces carcasses contaminées n’est pas passée inaperçue. Les agriculteurs locaux ont rapidement exprimé leur vive inquiétude face à ce qu’ils perçoivent comme un risque sanitaire inutile pour leurs propres exploitations.
Dans un communiqué ferme, les organisations agricoles du département ont déclaré : « Dans un contexte sanitaire déjà extrêmement préoccupant pour les éleveurs, le principe de précaution doit être mis en avant et le traitement des cadavres d’animaux contaminés représente un risque pour notre département. » Leur revendication est sans ambiguïté : elles exigent que les autorités « renoncent à tout projet de prise en charge de cadavres infectés par la DNC sur le site de Saint-Langis-lès-Mortagne et privilégient des solutions qui ne mettent pas en danger les élevages de l’Orne. »

Les explications de l’usine d’équarrissage

Face à la polémique, le groupe Akiolis, propriétaire de l’usine Atemax, s’est voulu rassurant. Paul Dabezies, responsable de la communication du groupe, a tenu à rappeler les modalités de transmission de la maladie : « La DNC se transmet soit par contact physique des animaux, soit par des insectes piqueurs. Et eux ne sont attirés que par les animaux vivants. Il y a toujours des mouches autour des cadavres, ce qui est vrai, mais ce ne sont pas des insectes piqueurs. »
L’entreprise assure par ailleurs que « toutes les précautions ont été prises, en parfait accord avec les services de la préfecture de l’Orne », et précise que les camions utilisés pour le transport sont systématiquement désinfectés avant et après chaque opération.

Des barrages expliqueraient ce choix

Selon les informations recueillies par Ici Normandie, cette décision de transport sur une distance aussi importante s’expliquerait par des contraintes opérationnelles. Les barrages mis en place sur les routes auraient empêché l’accès à des centres d’incinération géographiquement plus proches de l’Ariège, ne laissant d’autre choix que de se tourner vers l’installation normande.

Un contexte déjà explosif

Cette nouvelle polémique intervient dans un climat agricole déjà extrêmement tendu. L’annonce de l’abattage systématique du troupeau de Bordes-sur-Arize avait provoqué un mouvement d’opposition virulent, certains agriculteurs allant jusqu’à menacer : « On ira en taule, tant pis ». La politique d’abattage total préventif, considérée par beaucoup d’éleveurs comme disproportionnée, continue de nourrir la colère du monde agricole.
La gestion de la crise de la dermatose nodulaire contagieuse par les pouvoirs publics fait l’objet de critiques croissantes, dans un contexte où circulent également de nombreuses fausses informations sur cette maladie animale. Cette nouvelle révélation sur le transport des carcasses risque de relancer les débats sur la cohérence et la proportionnalité des mesures sanitaires appliquées sur le terrain.

Emilien Lacombe

Date de dernière mise à jour : 25/12/2025

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