Blanche Gardin, blacklistée après un sketch pro-Gaza, met ses anciens  spectacles en locationAFFAIRE BLGARDIN

Ceux qui ont l’âge d’avoir un certain âge se souviennent de ce slogan de mai 68 : « Nous sommes tous des juifs allemands ». Il faudrait évidemment rajouter maintenant : « et/ou juives allemandes et/ou trans jui.f.ve.s allemand.e.s ». Etre juif ou se sentir proche des juifs était à l’époque très tendance. Je vous parle d’un temps que les moins de soixante ans, etc. Le juif était le prototype de l’opprimé, de l’errant, du persécuté, sans cesse pogromisé pour un oui ou pour un non. Bref, quelqu’un de très malheureux. Et injustement. Quand on voulait manifester sa compassion pour le genre humain, le top du top était de se dire compagnon d’infortune des juifs. Et surtout des juifs allemands qui, de par leur histoire tragique, étaient perçus comme l’aristocratie du peuple élu.

Le slogan a moins traversé les décennies que « Il est interdit d’interdire », « Sous les pavés, la plage » ou encore « Jouissez sans entraves » qui font maintenant partie de la Bibliothèque rose.

A l’époque, quand on n’était pas de gauche, on était forcément antisémite

Cohn-Bendit était le gourou de toute la jeunesse de gauche, forcément de gauche. Tous ces fils de bourgeois qui peuplaient les facs, chantaient l’Internationale et assimilaient naturellement les juifs avec les « damnés de la terre ». Israël, terre des pionniers, terre des kibboutzim, avait la cote. On était à une vingtaine d’années de la fin de la guerre, et tout ce qui se revendiquait « de droite » fleurait bon le vichysme et donc l’antisémitisme.

De Gaulle lui-même ne s’est jamais dit de droite : « C’est pas la gauche, la France ! C’est pas la droite, la France ! » aimait-il à répéter. Et Giscard était « centriste », pas « de droite », attention. Et puis, dans les rues, les Arabes se comptaient sur les doigts d’une main. C’est Giscard, pour faire « gauche », qui a ouvert les vannes avec le regroupement familial en 1974. La « question palestinienne » passait largement au-dessous des radars de l’opinion publique. Deux peuples se sont étripés en 1948 lors de la création de l’Etat d’Israël ? Ah bon ? On n’est pas au courant.

Quant à la guerre d’Algérie, si la jeunesse de France ne voulait pas aller la faire, c’est moins par sympathie pour le gentil fellah dont de détestables Pieds-noirs faisaient suer le burnous que par les récits glaçants des soldats du contingent sur les exactions du FLN. On a beau dire, émasculations, éviscérations et autres énucléations, ça jette un froid. On rappellera – ce n’est qu’une incise – que c’est un homme de gauche, Guy Mollet, qui a envoyé le contingent en Algérie et un homme de droite, de Gaulle, qui a mis fin au conflit, dans des conditions qui auraient certes pu être plus glorieuses.

Il a fallu attendre les catastrophes du mitterrandisme pour réhabiliter la droite

La gauche devenant peu à peu porteuse de l’idéologie immigrationniste – avec la bénédiction d’un grand patronat aux intérêts bien compris, sans oublier à la manœuvre les Attali, BHL, Minc et autres « juifs de gauche » pour reprendre la formule de Pierre Cassen –, la classe ouvrière lui a dit bye bye et a viré Front Nat’.

Le think tank Terra Nova a tiré l’échelle au début des années 2000 : à partir de dorénavant, qu’on se le dise, le fonds de commerce de la gauche, ce sont les immigrés et les « minorités sociétales », les homos, les bis, les trans et tout le saint frusquin, sans oublier les femmes, naturellement pas en tant que femmes qui représentent mine de rien la moitié de l’espèce, mais en tant qu’ « opprimées du patriarcat blanc hétérosexuel ».

Et Mélenchon de ramasser la mise : « Non, le Grand Remplacement n’est pas un fantasme d’extrême droite, il existe bel et bien, je le nomme Créolisation, et c’est même lui qui va me porter au pouvoir ». La gauche devenait raciste – puisqu’antiblanc – sans s’en apercevoir. Elle avait la bonne conscience avec elle : on ne peut pas être raciste en étant antiblanc puisque le Blanc est par essence raciste, colonialiste, esclavagiste. L’argument est devenu un lieu commun. On ne peut pas non plus être raciste quand le nouveau peuple élu est le peuple palestinien, aux prises avec le juif, qui n’est tout compte fait qu’un super Blanc, doublement haïssable comme tel.

Le fait que les Arabes sont racistes – voir comment ils traitent « leur » immigration sub-sahélienne –, colonialistes – qu’on m’explique comment un peuple de la péninsule arabique peut se retrouver en Afrique du nord –, esclavagistes – demandez son avis à l’ethnologue Tidiane N’Diaye –, est encore largement méconnu et le restera : les gens ne voient que ce qu’ils veulent voir.

Et Blanche Gardin, dans tout ça ?

Bon, j’y viens. Vu son âge, la blanche oie est née antisémite, a grandi antisémite, s’est fait déflorer antisémite, a fait son premier sketch antisémite, etc., tout ça sans le savoir. Le 7 octobre 2023, contrairement à ce qu’elle dit, elle n’est pas « devenue antisémite », mais elle a simplement découvert qu’elle l’a toujours été, depuis l’utérus de sa maman inclusivement.

Pourquoi ? Parce que de gauche depuis la fécondation d’un ovule de ladite maman, de gauche, par un spermatozoïde de son papa, de gauche. Elle ne le savait pas puisque la gauche a toujours menti à tout le monde, en particulier à elle-même. A la maison, à l’école, à la fac, on lui avait toujours dit : « Tu es de gauche, DONC impossible que tu sois antisémite. Répète ». Et arrivent le 7-Octobre et la Révélation : « Je suis de gauche… donc… antisémite ?! Non … ».

Plus fort que ça : la Blanchette, dans les tréfonds de son for intérieur, a toujours su qu’elle était antisémite. Mais depuis le 7-Octobre, elle peut non seulement se l’avouer, mais en parler autour d’elle sans retenue aucune, constatant, en fait sans surprise, que tous ses interlocuteurs se sentent comme elle libérés d’un poids infini.

Son public lui fait un triomphe. A gauche, l’antisémitisme est incontestablement devenu tendance, mais toujours avec une petite pointe de transgression, sinon la gauche ne serait pas la gauche : « Nous sommes tous des antisémites juifs allemands »

Henri Dubost

Date de dernière mise à jour : 19/12/2025

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