Le château de Grignon (78), l’un des plus beaux châteaux de France, dépouillé, bradé, vidé, ruiné.

Ce magnifique monument historique a été transformé en camp de migrants.

Thiverval-Grignon se situe entre Plaisir et Poissy. C'est un de ces villages miraculeusement épargnés par la bétonnisation de la Grande Couronne, qui semblent dans un autre espace-temps que Mantes-la-Jolie ou Trappes, pourtant terriblement proches. On peut y songer sans difficulté à ce que devait être la vie du temps du jeune Louis XIV, lorsque les Yvelines n'étaient qu'une forêt, et Versailles, un marécage giboyeux surmonté par un relais de chasse. Dans ce petit village, comme dans beaucoup de villages des Yvelines, il y a un château du XVIIe, admirable mélange de rigueur et de raffinement : un plan classique, une cour en U, brique et ardoise. On dirait un peu le château d'Athos, en Touraine, au début de Vingt ans après.

CHÂTEAU DE GRIGNON

Le château de Grignon, puisque c'est son nom, a une histoire qui se confond avec celle de la France. Il a été construit par un noble de robe, président du Parlement de Paris, à la fin du XVIe siècle. Selon une patiente stratégie sociale, qui existait déjà à Rome, son fils, seigneur de Neauphle, fait la même chose en mieux : il obtient que Grignon soit érigé en marquisat. Le domaine passe ensuite de mains en mains, jusqu'à la Révolution, où un certain Auguie s'en rend acquéreur. Il marie sa fille au maréchal Ney, puis vend au maréchal Bessières. Enfin, en 1826, Charles X acquiert le domaine et y fonde une école d'agriculture, qui deviendra, de nos jours, Agro  Tech, plus vieille école d' de France.

Évidemment, tout ça est très vieille France : il avait donc été prévu de déménager l'école sur le plateau de Saclay en 2021. D'anciens élèves s'y sont opposés. L'État a voulu gagner du temps et a suspendu l'attribution à un promoteur, en promettant de lancer une nouvelle procédure avant fin 2022. Tu parles. Au mois de juin, le mobilier du château a été bradé par l'État dans des conditions abracadabrantes : pendant une vente aux enchères confidentielle, chaises, tables et canapés sont partis à des prix qui feraient presque rougir Ikea.

Et là, cerise sur le gâteau, ou dernier clou sur le cercueil : attribué au cours du mois de novembre à Emmaüs, le château va devenir un centre d'accueil de migrants. C'est qu'il fait froid en Île-de-France, beaucoup plus froid qu'en Afrique, mais maintenant que nos hôtes sont là, on ne va pas se contenter de leur donner une couverture, n'est-ce pas ? Le 17 décembre, le ministre Olivier Klein, un de ces anonymes dont la Macronie a le secret, s'est « rendu sur place » pour médiatiser l'accueil de 67 migrants, prélude à l'hébergement, à terme, probablement, de 200 de ces futurs Français. Les nouveaux châtelains de Grignon devraient repartir entre mars et mai 2023. Pas chez eux, bien sûr : ailleurs en France.

Le château de Grignon avait une histoire glorieuse, du mobilier de prix, était témoin du passé. Le voici vide, bradé, abandonné, et refilé en sous-main par le pouvoir politique, sans demander l'avis de personne, à une association qui va héberger des migrants. Cette histoire n'est pas une histoire comme toutes les autres : Grignon est une allégorie de la France.

Arnaud Florac (BV)

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Château de Grignon : le sorte en est jeté.

Le ministre du logement Olivier Klein réquisitionne le château de Grignon (78) pour “mettre à l’abri les plus en détresse” : autrement dit, y seront logés 200 migrants.

Présentés comme des “SDF”…

Les premiers SDF sont arrivés vendredi, principalement des Yvelines. L’association Emmaüs va les suivre au quotidien et travailler sur la scolarisation des enfants dans les écoles des communes voisines. Le domaine appartient à l’État qui, malgré les oppositions, souhaite toujours le vendre.

Château de Grignon : tout le patrimoine de l’État bradé à une vente aux enchères qui n’a eu aucune publicité ; l’État estimait à quelques dizaines d’euros des meubles valant des centaines de milliers d’euros (MàJ : le château hébergera 200 migrants)

À l’heure où Affaire conclue cartonne à la télé et où tout le monde veut faire expertiser les bibelots de sa grand-mère, l’État vient de faire la démonstration qu’il n’a jamais vu l’émission animée par Sophie Davant et, surtout, qu’il ne sait pas à quoi sert un expert en art et objets d’art — du moins tant que le cabinet McKinsey n’en propose pas. Nos confrères de La Tribune de l’art et du Canard enchaîné viennent de soulever un lièvre mettant la honte aux fonctionnaires pour des générations. Début novembre, des marchands d’art et commissaires-priseurs attirent leur attention sur des meubles d’époque Louis XVI et autres, d’excellente provenance, figurant dans les ventes de Drouot et d’ailleurs. Ceux-ci proviennent du château de Grignon, dans les Yvelines, domaine public dont le mobilier a été mis aux enchères par l’État sans aucune publicité.

Apparemment, tout a été bradé. Exemples de bonnes aubaines ? Une console prétendument expertisée « de style », c’est-à-dire pas « d’époque », estimée à 40 euros, vendue pour guère dix fois plus. Elle s’est révélée dater de 1780 et est partie à Drouot en novembre pour 13 000 euros. Vingt chaises estampillées d’un menuisier fournisseur de la cour de Louis XVI, estimées à 170 euros le lot par l’État, adjugées 6 240 euros. Elles sont en réalité estimées aujourd’hui par les experts — on aurait envie de dire par les vrais professionnels — entre 300 000 et 500 000 euros ! France Domaine, gestionnaire des cessions de l’État, reconnaît la bourde. Mais ni le ministère de l’Agriculture, gérant du lieu, ni celui de la Culture n’ont levé le petit doigt. La loi les obligeait pourtant à soumettre le contenu du château au Mobilier national, institution dont la mission est, justement, de protéger le patrimoine mobilier. Celui-ci n’était même pas au courant.

La Rédaction

CHÂTEAU DE GRIGNON

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