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Affaire PALMADE : les dessous sordides du dossier

Donc l’affaire, qui s’insère dans le drame et qui telle une pieuvre prend toute la place, au-delà de la tragique mort d’un enfant pas même né, ce que la loi qualifie de fœtus, de pas encore être vivant donc, ce qui selon la jurisprudence actuelle signifie que l’accusation de mise à mort involontaire d’autrui ne va pas de soit. Le drame, pourtant, est là : une famille à jamais endeuillée, une fillette qui ne viendra jamais à la vie, un petit garçon âgé de six ans avec des traumatismes crâniens, des parents gravement accidentés. Drame de la route, drame banal, drame quand même. Qui ne prend tout son sens en tant que drame national bousculant tout sur son passage que par l’affaire qui s’insère en son sein, et qui a trait à la ligne de vie du coupable.

PIERRE PALMADE



Un coupable que tout-un-chacun connaît, puisqu’il est sur la scène depuis plus de trente ans, lui bien sûr, mais pas seulement lui. Lui, ses addictions, aux drogues et à l’alcool, son passé judiciaire, sa nature auto destructrice, ce qu’il en disait lui même depuis fort longtemps. Et tant de choses encore, connues en certains cénacles, du côté de certaines rives au sein de la communauté homosexuelle parisienne où Palmade traînait plus que ses guêtres. Et au sein de laquelle il était, davantage que la personne publique connue de tous, un sujet de conversations récurrent.

A son réveil, Palmade déclara ne se souvenir de rien. Normal. Lorsqu’on s’injecte par intraveineuse des substances chimiques qui appartiennent à ce qu’on nomme le chemsex, on ne se souvient de rien, après.

Palmade avait donc pris le volant après une très longue orgie dans sa maison de la Seine-et-Marne, avait fait ce qu’il faisait depuis des décennies, payé de jeunes escorts pour vingt quatre heures durant lesquelles explorer toutes les facettes les plus taboues d’une sexualité tournant plus que probablement autour de ce qu’on nomme le SM. Une « partouze sous chemsex » (substances chimiques), en cette propriété privée, entre homosexuels jeunes et moins jeunes, c’est, le grand public l’ignore, banalisé, depuis fort longtemps. Non seulement à Paris mais à peu près partout où l’homosexualité est légale. Ce n’est en rien une caractéristique de l’homosexualité en tant que telle, en rien une généralité, mais bien une pratique ancrée et même extrêmement répandue. Que la communauté dite LGBT connaît, tolère, tait le plus souvent. Même si en son sein certains dénoncent, soignent, alertent, face à ce fléau ayant déjà entraîné jusqu’à la tombe bien des garçons à leur addiction aux drogues et au sexe sacrifiés.

Ces parties fines d’un genre particulier, qui ne se limitent pas aux communautés homosexuelles mais qui y ont trouvé leur racine, accueillent bien entendu non seulement des personnages importants de tous les milieux en vue, mais quelques têtes de pont de ce qu’on nomme à tort ou à raison le lobby gay. Les uns comme les autres pratiquent, étant de mèche, une sorte d’omerta, laquelle omerta se répand telle une poudre sur les avant postes de ladite communauté. Laquelle communauté, souffrant d’une montée des homophobies et se cachant habilement derrière une excuse toute trouvée, comprend bien son intérêt immédiat à ce coupable silence. Silence qui comme le criait Act Up autrefois vaut mort.

Contrairement à l’épidémie du SIDA, celle du chemsex implique la responsabilité de ceux qui s’y sont volontairement plongés. D’où l’omerta. Car ouvrir publiquement le dossier sale du chemsex sur la place publique aurait pour conséquence une détérioration immédiate de l’image de cette même communauté prise dans son ensemble aux yeux de l’opinion. L’image, pour cette communauté, cela compte, et cela se comprend. Se voir accusée de dépravations dans un rejet sans nuances signifierait symboliquement un retour au placard. Également se voir reprocher de n’avoir su en son sein nettoyer les écuries et pris ce problème de santé publique à bras le corps.

On le voit, le dilemme est délicat, entre le fait d’assumer comme le font en son sein des addictologues, des médecins, des psychiatres ou des travailleurs sociaux qui tiennent à bout de bras les addicts au chemsex, et la tentation de demeurer discret par intérêt avant tout. Quitte à laisser tomber les morts un à un dans un silence de plomb.

Palmade, nous disent les journalistes, était sous cocaïne. Pas seulement. Pas seulement bien sûr. La cocaine, on répète le mot à satiété parce que dans l’ensemble les gens savent ce que c’est. Les personnages publics sniffent de la coke, les artistes, les politiciens, c’est un secret de polichinelle. En soi ça choque mais en fait ça ne choque pas vraiment.

Les gendarmes ont retrouvé au domicile de Palmade des seringues dans de grands sacs poubelles ainsi que des produits illicites. Il s’agit donc, et combien dans la communauté gay ont sur l’instant percuté. de chemsex. Surtout et avant tout de chemsex. De produits hyper toxiques qui désèchent corps, sociabilisation, carrières et psyché. Au nom du sexe, du sexe débridé, du sexe sans limites, du sexe parfois le plus crade et le plus violent. Des scènes de crime existent, où l’on trouva attaché autrefois un homme en sang abandonné par les participants à ces orgies, mort. L’affaire Palmade s’insère là dedans. Cette fois le mort fut un mort pas encore né dans le cadre d’un tragique accident de voiture. Hier ce furent des crises cardiaques, ou des masochistes sous emprise hallucinatoire succombant aux coups après des heures de sévices. La prochaine fois quoi ?

Je fais ce triste pari. Le sujet du chemsex filera une fois encore sous le tapis. On maintiendra le narratif d’un Palmade victime de lui même et autodestructeur, se tapant gitons et rai de cocaïne. Tant et tant ont intérêt à limiter le dossier à ça : à lui et à lui seul, désormais prisonnier d’un karma destructeur, avec une carrière à jamais sciée à la racine.

On en fera un exemple, et on n’ira pas plus loin. Là haut, dans certaines allées d’un pouvoir dissimulant ses pratiques de débauches derrière la cause homosexuelle, on fera ce qu’il faut pour que le public reste à l’écart de ce qu’on ne veut pas qu’il sache. Car ces grands apôtres de la permissivité, à défaut d’une conscience, savent ce qu’ils ont à y perdre. Si d’aventure certains s’hasardent à soulever le couvercle, on hurlera au danger de la recrudescence de l’homophobie, on parlera de régressions, de réaction. On utilisera tous les arguments possibles pour faire taire les bavards. Et on tournera le regard vers Pierre Palmade, parfait coupable expiatoire.

Christophe Cros Houplon - écrivain

Date de dernière mise à jour : 17/02/2023

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