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La galette des rois : de la Rome antique à aujourd’hui

À l’occasion de l’Épiphanie, nous prenons plaisir, en France, à nous retrouver, en famille ou avec des amis, autour d’un plat, témoin de nos traditions religieuses et culturelles. Mais quelle est la longue histoire de cette mystérieuse et pourtant simple galette ?

Recette de galette des rois sans alcool (frangipane rhum 0 alcool)

Avant même l’avènement du christianisme, les Romains, à l’occasion des fêtes des Saturnales célébrées à la fin du mois de décembre, pratiquaient déjà cette coutume. À l’aide d’une fève caché au sein d’un gâteau, ils désignaient au hasard l’habitant d’une maisonnée pour être « le roi d’une journée », comme l’explique Michel Meslin dans son ouvrage L’Homme romain : des origines au Ier siècle de notre ère. Pour plus d’impartialité, le plus jeune de la maison devait se mettre sous la table afin de choisir celui qui devait recevoir la part de gâteau. S’ensuivaient fêtes et réjouissances tout le reste de la journée jusqu’au coucher du soleil.

Réjouissance et charité

Les chrétiens reprirent cette tradition païenne afin d’y associer le sens du partage du gâteau avec l’histoire biblique des mages venus d’Orient. Permettant la célébration de l’Épiphanie, la christianisation de ce rite facilitait aussi la conversion des païens. Ces derniers n’étaient pas ainsi déboussolés par rapport à leurs anciens rites religieux. Cette pratique de l’adaptation des fêtes païennes aux solennités chrétiennes eut aussi lieu avec la fête de Sol Invictus (« Soleil Invaincu »). Cette célébration était dédiée à un dieu solaire le 25 décembre et commémorait l’allongement des jours par rapport à la nuit. Ce concept fut repris par les chrétiens afin d’y fixer la naissance du Christ pour symboliser la victoire de la lumière sur les ténèbres.

Durant l’époque médiévale, la dégustation de ce gâteau se poursuivit et devint prétexte à de grandes réjouissances mais aussi de charité auprès des plus démunis, selon le principe du partage, symbolisé par le récit biblique de l’Épiphanie. À l’occasion, dans chaque foyer, une part était toujours laissée de côté. Appelée « la part de Dieu », cette dernière était destinée à un pauvre hère, si ce dernier venait frapper à la porte de la maison.

Une galette... royaliste ?

Lors de la Révolution française, la Convention vit dans cette simple pâtisserie un danger pour la toute jeune République. Son nom, la galette des rois, ne pouvait être que le triste écho d’une période de tyrannie devant être oubliée et effacée, amenant ainsi au souhait, selon Edmond et Jules de Goncourt dans leur Histoire de la société française pendant la Révolution, que « l’innocente royauté du gâteau des rois soit abolie ». Cependant, échouant à faire interdire cette tradition, les révolutionnaires décidèrent alors de renommer la fête de l’Épiphanie en fête du Bon Voisinage et le gâteau en galette de l’Égalité. Cette dernière ne devait contenir aucune fève car, pour les sans-culottes, aucun homme ne pouvait être supérieur à un autre. Cet héritage révolutionnaire persiste encore à notre époque. En effet, depuis 1975, il est de coutume que le chef de l’État déguste une galette sans fève. En effet, selon les principes de la République, le Président ne saurait être roi, une ironie pour un régime républicain décrit parfois comme monarchique.

Aujourd’hui, la galette des rois n’est plus un symbole religieux, d’autant qu’elle n’a jamais été sacralisée par l’Église comme étant un élément de sa liturgie. Elle n’est qu’un élément de notre culture gastronomique, porteur non plus seulement d’un message religieux mais aussi de valeurs humaines comme celle du partage.

Eric de Mascureau

Date de dernière mise à jour : 06/01/2024

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