ÉCOLOGIE : Avec la nouvelle taxe carbone de l’UE, les plus précaires vont trinquer !

ZFE depuis le 1er janvier avec interdiction de circulation des véhicules classés Crit’air 5, Crit’air 4 en 2024, Crit’air 3 en 2025 ; interdiction de la vente des voitures thermiques à l’horizon 2035 ; interdiction de vendre ou louer un logement classé E ou F à partir de 2035 ; inflation, hausse vertigineuse des coûts de l’énergie… On continue ?

Eh bien oui ! Figurez-vous en effet que le Parlement européen, au mépris de toutes les crises qui secouent le continent, a adopté mardi « le paquet Fit for 55 », soit cinq textes concernant le marché du carbone désormais étendu aux particuliers via les transports et le bâtiment.

GILETS JAUNES

On découvre en effet qu’au moment où nous faisions nos courses de Noël, le nez rivé sur l’inflation galopante (exactement dans la nuit du 17 au 18 décembre 2022), les eurodéputés et les Etats membres avaient acté la création d’un second marché carbone « incluant les distributeurs qui fournissent des carburants pour le chauffage des bâtiments et le transport routier », système voté le 18 avril et qui entrera en vigueur à partir de 2027. Avec le louable objectif, comme toujours, de réduire les émissions de gaz à effet de serre en Europe, et ses conséquences désastreuses, comme toujours aussi.

Des voix « autorisées » s’étaient pourtant élevées pour dénoncer ce qui découlerait inévitablement de telles mesures, à savoir creuser les inégalités, pénaliser les ménages les moins aisés et… réveiller les Gilets jaunes, pour ne parler que d’eux. Ainsi, notamment, Eloi Laurent, économiste à Sciences Po Paris, qui mentionnait dans une étude qu’avec de telles mesures, « Le premier décile [soit les 10 % de la population ayant les plus bas revenus] est largement plus affecté que les autres déciles. L’impact est 1,5 fois supérieur à l’impact moyen dans la population. »

De même le chercheur Béla Galgóczi relevait, dans un document pour l’Institut européen des syndicats, qu’en augmentant en bout de chaîne le prix du carburant et du chauffage, « l’Union européenne risque d’avoir un impact massif sur les inégalités au sein des Etats membres, mais aussi entre eux ».

Plus près de nous, c’est l'Insoumise Manon Aubry qui s’est indignée devant l’assemblée (clairsemée) du Parlement européen : « Ce n’est pas aux classes populaires de payer le coût de la transition écologique ! », dit-elle. Et de rappeler que ses collègues de Renaissance, notamment Marie-Pierre Védrenne, pourtant en charge des négociations de son groupe sur le Fonds social du climat, avait tenu ce même propos dans une interview d’EurActiv. « Et que font-ils, trois mois après ? » dit Manon Aubry. « Ils votent, l’air de rien, un dispositif qui élargit la taxe carbone aux ménages. Et donc ils acceptent de faire payer les particuliers, et en particulier les ménages les plus précaires. A croire définitivement qu’ils n’ont rien appris de la crise des Gilets jaunes ! »

Pourtant les chiffres sont accablants et les parlementaires eux-mêmes en conviennent : « L’objectif de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre pour 2030 augmenterait d’environ 0,7 à 0,8 point de pourcentage la part des dépenses des ménages liées à l’énergie. »

Pendant ce temps les grandes entreprises voient leurs quotas, c’est-à-dire leurs droits à polluer (que certains revendent grassement), prolongés jusqu’en 2036

Marie Delarue

Date de dernière mise à jour : 19/04/2023

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