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Que reste-t-il des libertés ? Le bilan ...

Je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître … Ce sont les premiers mots du magnifique texte de Charles Aznavour composant « La Bohème », cet immense succès que personne ne pourra oublier tant il est rempli d’une rare poésie et d’une touchante nostalgie rappelant un passé inoubliable.

En 1965, au moment où est sortie cette magnifique chanson devenue un succès planétaire, les Français vivaient dans une ambiance plutôt heureuse, la liberté étant un bien acquis garanti par les valeurs de la République. Évidemment, la vie n’était pas dénuée de problème, mais aucune époque ne révélait parfaite, même quand le Pays était stable et prospère.

Au-delà des besoins de chaque citoyen, au-delà de ses aspirations, qu’elles soient sociales, politiques ou cultuelles, il est une situation où l’individu ne subit aucune contrainte externe, à quelque titre que ce soit, dans la mesure évidemment du strict respect des lois régissant la société dans laquelle nous vivons.

Depuis 1965, les choses ont évolué et si l’on ne peut que se réjouir du progrès qui a jalonné jusqu’ici toutes les décennies passées, c’est-à-dire es avancés sociales, le modernisme industriel, la recherche médicale, il est un point qui s’est nettement assombri depuis quelques années notamment, touchant le citoyen au plus profond de lui-même, dans ses propos comme dans ses positions qu’elles fussent politiques ou autres.

Ainsi, le citoyen ne peut plus s’exprimer ouvertement. Lentement, mais sûrement, la censure a gagné du terrain, le privant de liberté au risque même d’être poursuivi par la justice, si celle-ci considère à tort ou à raison, qu’il y a eu un manquement à l’ordre public au sujet d’une déclaration supposée outrancière, diffamatoire, ou discriminatoire.

En clair, les libertés sont de plus plus restreintes et chaque jour, il est facile de constater que le principe de liberté se réduit à vue d’œil comme une peau de chagrin.

Au point qu’il faudra bientôt réinventer une littérature et spécialement un dictionnaire qui bannira de nombreux mots de notre langue française, sous prétexte qu’ils portent atteinte aux origines ethniques, à la religion, à la culture de diverses communautés, et plus généralement, à la dignité des individus.

Alors, dans un climat plutôt délétère, faut-il restreindre les libertés comme s’applique à le dire aujourd’hui une partie de la classe politique ?

A dire vrai, il ne faut rien exagérer. A l’heure actuelle, tout est prétexte à dénonciations. Vraies ou fausses. La calomnie fait partie du quotidien à tous les niveaux de la société. Depuis quelques mois, les tensions de la rue explosent et la haine se développe chez de nombreux citoyens qui n’hésitent plus à porter des accusations sur son voisin, sur son collègue de travail, sur son employeur, sur un élu de la Nation, sur un journaliste, sur un religieux, etc … etc …

Et là dessus, viennent s’ajouter le racisme, l’antisémitisme, l’homophobie et toutes sortes de discriminations, situations douloureuses et lamentables devenues récurrentes depuis quelques années. Et à partir de ces accidents sociétaux qui touchent toutes les populations, la République se divise et se fracture inévitablement. Dans un tel contexte, l’État aurait du agir depuis longtemps. En son temps, le président Sarkozy n’a rien fait. Il en a été de même pour son successeur, le président Hollande qui a voulu éviter tout affrontement. Quant au président Macron, pris en étau par les événements, il se décide enfin au bout de trois ans à annoncer de futures mesures fortes et qui, sur le fond, faut-il le reconnaître, ne manquent pas d’intérêt. Une réalité ou encore une fois, un effet d’annonces ? En vérité, inutile de trop rêver : ces mesures ne verront peut-être jamais le jour et, dans le cas contraire où seraient votées, elles ne seront pas appliquées.

Mais, de toute manière, à quoi cela sert-il ? A encombrer une fois de plus le début public, les médias, les plateaux télé ou les chaînes de radio ? Qui est pour ? Qui est contre ? Et qu’en pensent les Français qui ne sont pas consultés ? Même si certains sondages (plus ou moins fiables) prétendent refléter l’esprit de l’opinion publique à un moment donné.

A dire vrai, il ne faudrait pas que l’on oublie aujourd’hui que La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale selon la constitution, assurant l’égalité devant la loi de l’ensemble des citoyens, sans distinction d’origine, de race et de religion.C’est l’article 1 de la Constitution du 4 octobre 1958 (72 ans déjà) qui apporte la définition exacte de l’État républicain et qui précise que notre pays respecte toutes les croyances.

Aussi, la réforme voulue par Emmanuel Macron, bien que profitable en apparence, n’apporte pas de vraies solutions nouvelles. En fait, il suffirait d’appliquer strictement la loi du 9 décembre 1905 qui reste un monument politique issu de la IIIème République. A l’origine, cette loi concerne la séparation des Églises et de l’État. Elle est l’aboutissement d’un long processus de laïcisation et de sécularisation engagé à partir de la Révolution française. Elle proclame la liberté de conscience. Elle a pour corollaire la liberté religieuse, la liberté du culte et la non-discrimination entre les religions. Alors que l’État ne reconnaissait jusqu’à cette époque que quatre cultes (catholique, réformé, luthérine et israélite), il payait alors les ministres du culte et participait à leur désignation. Les autres cultes n’étaient pas reconnus. A partir de la loi de 1905, l’État devient neutre et désormais, aucune religion n’est consacrée légalement. Ainsi, toutes les religions sont alors traitées de manière égale.

Nous ne reviendrons pas sur tous les détails qui constituent la législation de 1905. Je rappellerai ici seulement que ladite loi traite spécialement de la police des cultes : principalement, elle proscrit la tenue de réunions publiques dans les locaux cultuels. Elle interdit aussi d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou quelque emplacement considéré comme public. Il s’agit donc d’affirmer la neutralité idéologique de l’État et de la République.

Avec la loi du 9 décembre 1905, un nouvel équilibre est donc institué entre l’État, la société et l’ensemble des religions. La laïcité qui n’avait pas été bien définie par la loi, a été depuis confortée largement. Cette laïcité est devenue un principe à valeur constitutionnelle avec les Constitutions du 27 octobre 1946 (IVème République) et du 4 octobre 1958 (Vème République). Dans ces conditions, la laïcité fait partie des valeurs fondamentales de notre système républicain et il est apparaît impossible de la modifier à quelque titre que ce soit, et encore moins de la supprimer comme certains le souhaiteraient. La République laïque est ancrée dans nos institutions comme l’est de nos jours la suppression de la peine de mort. Autrement dit, tout changement ne peut être négociable dans le cadre du progrès démocratique et social.

Mais pour en revenir aux libertés qui nous échappent, personne n’aurait pu croire, voici quelques années encore, que nous serions soumis aujourd’hui ,à une censure collective. Car, si le contrôle de l’État s’est toujours manifesté au fil des décennies et même au cours des siècles passés, la censure ne se manifestait guère entre les organismes médiatiques et les citoyens. De nos jours, les choses ont bien changé et les modérateurs s’en donnent à cœur joie : il suffit de répondre à un article par un commentaire qui ne convienne pas à celui ou à celle qui assure le contrôle des réponses, pour que les propos avancés soient supprimés, même s’ils ne comportent aucun dérapage racial ou discriminatoire.

En clair, nous sommes entrés dans un type de société où l’interdit domine : Le citoyen n’a plus le droit de s’exprimer et de libérer sa parole. S’il le fait, il est censuré et même poursuivit devant la Justice et très souvent, sans aucune raison valable. La pensée unique a pris le dessus et de plus en plus, les hommes se censurent entre eux, ce qui réjouit pleinement les dirigeants politiques.

Alors, qui sont ceux ou celles qui évoquent l’atteinte à la liberté de la presse ? Ou de la liberté tout court ? Visiblement, la possibilité de pouvoir propager ses idées, de les faire connaître sur les réseaux sociaux ou sur d’autres supports, cette liberté est bien compromise désormais. C’est la porte ouverte à toutes les dictatures qui anéantiront bientôt notre monde. L’homme veut asservir l’homme comme par le passé et un pas vient d’être franchi vers la servitude. Alors que l’esclavage antique est montré du doigt par les démolisseurs de culture, les « déboulonneurs » de statues, les « débaptiseurs » de rues, un autre asservissement est en train de naître : celui de réduire la liberté des citoyens à tous les niveaux et de les empêcher de parler, d’échanger et de contester.

Après cela, n’appelons plus la nation française « République ». C’est un outrage à la démocratie et à tous aînés qui ont combattu jusqu’à la mort pour défendre et sauver la Patrie.

Pierre Reynaud

LA LIBERTÉ


 

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