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Marseille : les riverains s’organisent pour lutter contre le trafic

Il y a moins d’une semaine, Gérald Darmanin était en visite à Marseille pour aborder, entre autres, la question du trafic de stupéfiants. Il s’est félicité des résultats obtenus au cours de l’année passée grâce au pilonnage des points de deals par les forces de l’ordre. À en croire les mots du ministre de l’Intérieur, le gros problème de la cité phocéenne était en passe d’être réglé. Sur le terrain, la réalité est tout autre. Particulièrement dans le quartier Colbert où les habitants d'une résidence doivent s’organiser pour tenter de faire fuir une vingtaine de dealers.

Les riverains, premier rempart

Depuis plusieurs mois, des trafiquants ont élu domicile en bas de leur immeuble pour y vendre de la drogue. Au micro de BFM TV, un locataire raconte : « Ils vendent leur marchandise devant la porte de sortie. Ça me dérange de les voir comme ça, de mes propres yeux je les vois, ils vendent devant nous. » Un autre explique que « le parking est squatté ». Les habitants de la résidence gérée par UNICIL n’en peuvent plus.

Début janvier, ils ont interpellé le bailleur social en envahissant ses locaux pendant près de 45 minutes. Et, si cela ne suffit pas, s'ils ne sont pas entendus, ils passeront à la vitesse supérieure en arrêtant de payer leur loyer, menacent-ils.

Ce n’est pas la première fois, à Marseille, que les habitants d’une résidence doivent s’unir pour s’opposer au trafic de stupéfiants. Il y a un an, les locataires de la cité des Campanules, dans le XIe arrondissement, s’étaient relayés pendant dix jours dans le hall de leur immeuble pour éviter l’installation d’un point de deal. Renaud Muselier, président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, s’en était réjoui sur l’antenne de CNews : « Je félicite les habitants, c’est très courageux, ce qu’ils ont fait. Ils ont finalement forcé l'État, le bailleur social, tout le monde, à bouger. Et je pense que c'est tout à fait remarquable et qu'il faut le saluer. Je crois que chacun doit prendre son destin en main. »

La police et l’État en soutien

Y a-t-il vraiment de quoi jubiler ? Que des civils doivent être en première ligne de la lutte contre le trafic de drogue et que l’État et la police viennent « en soutien » n’a rien d'enthousiasmant. Pourtant, à Marseille, c’est monnaie courante. Les honnêtes citoyens doivent faire du bruit pour attirer l’attention de la police et de ses donneurs d’ordres.

En octobre dernier, le doyen de l’université Aix-Marseille, Bruno Decreuse, l’avait bien compris. Il avait annoncé la fermeture de l’antenne Colbert de la faculté d’économie et de gestion pour des problèmes de sécurité liés au trafic de drogue afin d’obtenir la présence permanente de policiers.

Ces résidents marseillais, issus du même quartier, demandent, eux aussi, « des services de police 24 heures sur 24 ». Ils ne seront probablement pas entendus car, comme l’explique à BV Rudy Manna, porte-parole du syndicat Alliance Police, « c’est impossible. Les policiers ne peuvent pas être 24 heures sur 24 sur des points de stups. C’est absolument irréaliste. » Il précise : « Si on le faisait pour eux, il faudrait le faire sur tous les points de deal et on ne pourrait intervenir sur rien d’autre. » Les locataires peuvent néanmoins espérer une action ponctuelle qui chasserait les dealers, puisque « quand c’est médiatisé, il y a une réaction des pouvoirs publics et donc une présence policière ». Faute de pouvoir régler le problème du trafic de stupéfiants dans la deuxième ville de France, l’État le déplace, au gré des plaintes des citoyens.

Sarah-Louise Guille

Date de dernière mise à jour : 08/01/2024

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